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Les quinquas plus ou moins malades de leur métier

L’actualité | publié le : 21.09.2010 | VIRGINIE LEBLANC

En pleine réforme des retraites, l’Ined (1) souligne que, si l’espérance de vie s’accroît, il est nécessaire de s’attacher à l’état de santé de la population en fin de vie active, très inégalitaire.

Les problèmes de santé surviennent dès 50 ans pour une partie de la population et rendent difficile son maintien en emploi en fin de vie active, soulignent les chercheurs Emmanuelle Cambois, Jean-Marie Robine et Thomas Barnay, dans une contribution intitulée “Espérances de vie, espérances de vie en santé et âges de départ à la retraite : des inégalités selon la profession en France”. « La réforme des retraites ne prend pas en compte l’état de santé avant l’âge de départ en retraite ; certains seniors ne sont plus en mesure de travailler en état de santé, même actuellement jusqu’à 60 ans, et on allonge leur durée d’activité », commente Emmanuelle Cambois.

Espérance de vie et qualifications

L’espérance de vie française est l’une des plus élevées au monde, dépassant 80 ans depuis le début des années 2000, mais l’espérance de vie en bonne santé est très inégalitaire en fonction de la catégorie socioprofessionnelle. A 50 ans, en 2003, l’espérance de vie des professions les plus qualifiées atteint 32 ans pour les hommes, soit près de 5 ans de plus que celle des ouvriers. Pour les femmes, l’écart est de 2 ans avec une espérance de vie maximale pour les professions les plus qualifiées de 36 ans. A partir de 50 ans, les ouvriers passent en moyenne plus de la moitié de leur vie en mauvaise santé alors que pour les plus qualifiés, cette période est réduite à un tiers. De plus, 25 % à 28 % des quinquagénaires en emploi s’estiment en mauvaise santé.

Par ailleurs, les chercheurs soulignent que la santé influence fortement la décision de prendre une retraite anticipée. Les cadres envisagent de partir relativement tard (60,6 ans) et 42 % estiment pouvoir choisir le moment du départ en retraite. En revanche, seuls 33 % des ouvriers qualifiés déclarent pouvoir faire ce choix. Les cadres partent effectivement à 59,5 ans pour les hommes et à 57,3 ans pour les femmes, et les ouvriers à 57 ans pour les hommes et à 53,8 ans pour les femmes.

La cessation d’activité pour un motif de santé (suivi d’une longue maladie déclarée par les individus) apparaît associée à une cessation d’activité anticipée en moyenne de 5 années chez les hommes et de 4,5 années chez les femmes, toutes choses égales par ailleurs. Cette anticipation atteint 7 années pour les ouvriers qualifiés dans l’industrie, la manutention, le magasinage et le transport.

Inégalités sociales

L’article mentionne une étude réalisée auprès de personnes parties en retraite avec une carrière incomplète, qui confirme le rôle déterminant d’une dégradation de la santé (Barnay, Briard, 2009). Ainsi, les mères de famille aux revenus modestes sont relativement plus nombreuses à être éligibles à des pensions d’inaptitude ou d’invalidité au moment de partir en retraite. « Les inégalités sociales en matière de retraite précoce concernent plus largement des situations précaires, dans lesquelles les arbitrages entre revenus du travail et revenus de compensation sont cruciaux », pointent les chercheurs.

Pour conclure leur présentation, ils soulignent que « ces résultats témoignent de la nécessité pour les politiques publiques de suivre l’évolution de l’état de santé des actifs âgés, en lien avec leur profession, leurs conditions de travail et leur situation sociale en général ».

(1) In Retraite et société, Cnav, août 2010, L’Etat de santé des travailleurs âgés, numéro coordonné par Emmanuelle Cambois (Ined), Thomas Barnay (CNRS) et Jean-Marie Robine (Inserm).

Auteur

  • VIRGINIE LEBLANC