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Les pratiques

Pays-BasLes patrons interdits de contrôle sur les e-mails personnels

Les pratiques | publié le : 14.09.2010 | DIDIER BURG

Revirement de la jurisprudence : elle interdit la consultation des courriels personnels des salariés par l’employeur. Les entreprises ajustent leur politique en la matière.

La curiosité est un vilain défaut… qui risque maintenant de coûter cher aux entreprises néerlandaises. Sur décision du tribunal administratif d’Alphen aan den Rijn en mai dernier, un employeur a été condamné à verser des indemnités pour un licenciement abusif, intervenu après qu’il avait lu les e-mails d’une de ses salariés qui avait négligé d’éteindre son PC en partant le soir.

Même si celle-ci affirmait avoir commis des illégalités dans son travail dans des courriels adressés à des clients, le juge a considéré que l’entreprise n’avait pas respecté la vie privée de sa salariée en consultant son ordinateur. Un véritable revirement de jurisprudence, alors que précédemment, dans des affaires semblables, les juges néerlandais ont en général fait primer le principe de la découverte de la vérité sur celui du respect de la vie privée.

Droits de l’homme

Cas d’espèce pour l’instant aux Pays-Bas, cette décision s’avère cependant dans la droite ligne de l’article 8 de la Convention des droits de l’homme, qui interdit aux entreprises de consulter les courriels privés de leurs salariés, même si ceux-ci ont été échangés grâce à des moyens techniques appartenant à l’employeur.

Certaines entreprises ont déjà pris les devants. A l’avant-garde dans ce domaine, la société Qurius, dirigée par Leen Zevenbergen, l’auteur du best-seller Brûle ta cravate et danse*, qui prône une politique de laisser-faire sur ce sujet. Pour lui, rien de plus normal que les salariés utilisent Internet pour leur usage privé au bureau : « Si votre propre téléphone mobile sonne sur le lieu de travail, il est tout de même normal de répondre. Vouloir interdire à vos collaborateurs de se servir d’Internet pour leurs affaires privées relève du XIXe siècle », déclare ce dirigeant, dont la société est partenaire de Microsoft.

« Les salariés ont besoin de se distraire et de trouver d’autres sources d’inspiration. Mettre en place des contrôles sur l’utilisation d’Internet est une preuve de défiance qui va à l’encontre de la confiance dont les collaborateurs ont besoin pour oser faire avancer les choses dans l’entreprise », poursuit Leen Zevenbergen, qui ne verrait pas d’inconvénient à ce que ses salariés travaillent sur la plage.

« Quand, où et comment les employés réalisent leurs tâches importe peu. Il faut que leur travail soit bien fait et dans les temps, explique-t-il. Il appartient aux salariés d’être responsables. »

De sérieuses limitations

Cette tolérance à tout crin est loin d’être en vigueur partout malgré les évolutions juridiques. Au sein de l’entreprise postale TNT, le principe d’une autorisation d’Internet dans le cadre de l’usage privé est assorti de sérieuses limitations. Outre les filtres pour les sites pornographiques et l’interdiction formelle de consulter ceux diffusant des idées racistes ou discriminatoires, TNT procède à des contrôles généraux sur l’utilisation d’Internet dans l’entreprise, permettant de déceler les excès.

Autre moyen à disposition : l’enquête interne diligentée suite au comportement répréhensible du salarié, par exemple en cas de divulgation d’informations à l’extérieur de l’entreprise. Si TNT peut s’y autoriser, c’est parce que le salarié est averti au préalable des mesures qui le concernent. Et que le comité d’entreprise est toujours informé. Des dispositions qui ressemblent à celles qu’impose par exemple la Cnil aux entreprises françaises. « Nous ne procédons à aucune consultation secrète des ordinateurs », affirme-t-on au siège de TNT. Dans ce cas, le principe du respect de la vie privée du salarié est appliqué.

* Ed. ESF, avril 2010.

Auteur

  • DIDIER BURG