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« Les résultats les plus spectaculaires sont obtenus en jouant sur l’organisation du travail »

Enquête | L’entretien avec | publié le : 14.09.2010 | PROPOS RECUEILLIS PAR VIRGINIE LEBLANC

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« Les résultats les plus spectaculaires sont obtenus en jouant sur l’organisation du travail »

Crédit photo PROPOS RECUEILLIS PAR VIRGINIE LEBLANC

E & C : Pourquoi n’y a-t-il pas de consensus sur le calcul de l’absentéisme ?

D. M. : Aucun organisme indépendant ne mesure l’absentéisme en France, et toutes les entreprises ne le calculent pas de la même façon. Grâce aux indemnités versées par l’assurance maladie, on estime l’absentéisme maladie autour de 3 % à 3,5 %.

Selon l’étude que j’ai réalisée en analysant une centaine de bilans sociaux de grandes entreprises, le taux global grimpe à 7 % en moyenne, tandis qu’Alma Consulting, qui interroge essentiellement des PME, l’estime à 4,85 % dans son baromètre. Mais l’impor-tant est de regarder son évolution.

E & C : Justement, quelles tendances marquantes peut-on observer depuis quelques années ?

D. M. : La Cnam a estimé que l’absentéisme avait augmenté de 31 % entre 1998 et 2003. Les 35 heures sont une explication à cette tendance. L’intensification du travail et le développement des TMS ont entraîné chez des personnes plus âgées un besoin d’arrêts de courte durée plus nombreux. Les salariés ont aussi pris goût à des week-ends prolongés et ont eu moins de scrupules à être absents. Le phénomène s’est stabilisé en 2004-2006, puis est reparti à la hausse.

La situation est aujourd’hui paradoxale car quand le chômage augmente, l’absentéisme devrait baisser. On observe d’ailleurs des arrêts maladie de longue durée en lien avec des réorganisations, sans qu’il y ait d’études précises sur ce sujet.

E & C : Pourquoi a-t-il continué à augmenter en 2009 ?

D. M. : La conflictualité des grandes grèves de début 2009 est une première explication. Certains n’osent pas faire grève mais manifestent leur mécontentement par l’arrêt maladie.

La deuxième cause est liée au chômage partiel : la fin de cette période de sous-activité a rendu difficile, pour certains, le retour au rythme antérieur.

Troisième explication : la grippe H1N1. Les entreprises étaient enclines à accepter davantage d’arrêts maladie plutôt que de risquer la contamination de leurs équipes.

E & C : Le retrait des salariés est aussi dû à des problèmes relationnels avec leur hiérarchie…

D. M. : Oui, une bonne partie des arrêts de longue durée sont liés à des problèmes relationnels avec les managers, qui se traduisent par des dépressions. En outre, nombre d’entreprises qui nous contactent pour travailler à la prévention du stress et des risques psychosociaux font le lien entre leur taux d’absentéisme et le niveau de stress ressenti par leurs collaborateurs.

E & C : Face à l’absentéisme, quelle est la première attitude d’une entreprise ?

D. M. : Le réflexe est souvent la prévention par la peur du gendarme et l’utilisation des contre-visites médicales. C’est une solution de facilité dont les résultats ne sont pas flagrants. En réalité, il y a peu de fraude.

A contrario, les résultats les plus spectaculaires sont obtenus par les entreprises qui jouent sur l’organisation du travail. Par exemple, en changeant les horaires de ses agents de propreté, la mairie de Rennes a fait diminuer son taux d’absentéisme de 45 % en un an en 2008. D’un horaire de début de soirée, ils sont passés à un horaire de journée, entre 12 heures et 14 heures.

Une autre solution efficace est la sensibilisation des managers et de l’ensemble des salariés à cette question. Diffuser les indicateurs tous les mois dans les équipes en les comparant à la moyenne nationale et aux autres services peut avoir un effet d’émulation. De plus, les entretiens de retour créent une dynamique de dialogue positive et responsabilisent le manager et le salarié, mais ils nécessitent des formations, ou au moins un guide d’entretien.

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