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Enquête

L’entreprise soigne le retour de ses absents

Enquête | publié le : 14.09.2010 | CHRISTIAN ROBISCHON

S’inspirant d’une pratique de sa maison mère suédoise, l’usine d’Angers a créé l’entretien de réaccueil pour les absents de longue durée. Ce rendez-vous est conçu pour dédramatiser l’absence. Le même esprit guide la gestion plus informelle des défections courtes.

Scania Angers ne prend pas à la légère le retour de ses “grands” absents. Depuis le début de cette année, l’usine d’assemblage de poids lourds ménage un “entretien de réaccueil” aux salariés qui reviennent d’un arrêt maladie de quatre mois, ou à ceux qui ont cumulé 6 arrêts ou plus durant les douze mois. Elle confie aux managers n + 1, les responsables de clusters (îlots de production), ce moment de reprise de contact.

Gestion “soft”

Depuis son instauration, l’entretien de réaccueil a concerné 15 opérateurs sur les 27 répondant aux critères d’éligibilité (les autres ne sont pas revenus). Pour une moitié d’entre eux, il a été complété par des entretiens auprès d’autres services, en fonction de chaque besoin individuel. Par exemple avec le service médico-social ou l’ergonome, si un aménagement de poste s’impose, ou le service RH lorsqu’apparaît un questionnement sur la motivation du salarié, son évolution de poste ou de carrière.

La direction présente l’initiative comme un outil de gestion “soft” de l’absentéisme. « Nous l’avons instauré pour débanaliser le phénomène, sans le prendre pour une fatalité. L’entretien propose d’aborder la question autrement que par l’arsenal répressif de type contre-visite médicale, que nous avons délibérément exclu car nous ne l’avons pas estimé efficace », souligne Karine Desgages, responsable emploi-formation.

La démarche répond à une demande des élus du CHSCT, souligne la CFDT. L’IRP la concevait comme préventive car l’absentéisme ne constitue pas un problème “historique” de l’usine, réputée aussi dans le tissu local pour son turn-over quasi-nul de 1 %. Le CHSCT avait considéré un tel outil utile pour remettre un absent dans le bain. « Nous voulions qu’il n’appréhende pas son retour, et que celui-ci se fasse sur son poste sans changer d’affectation, quitte à redémarrer un temps sur un poste de travail allégé. C’est bien ainsi que cela se passe », ajoute Marc André, délégué CFDT. L’entretien aborde également les réorganisations éventuellement intervenues dans le service.

Scania Angers n’a pas eu de mal à donner suite à la requête. Filiale du groupe suédois, l’entité française a pu puiser dans le vaste catalogue d’outils RH-santé au travail de sa maison mère. L’entretien de réaccueil y figure et elle en a repris fidèlement les critères d’éligibilité.

Absences de longue durée

La focalisation sur les absences de longue durée – en cumul ou d’un seul tenant – et d’origine médicale lui a semblé logique. L’usine angevine a en effet identifié les TMS comme son principal souci. Elle en recense 65 déclarations en maladie professionnelle, en grande majorité pour les membres supérieurs (poignet, coude, épaule) très sollicités par le geste de visser les pièces permettant d’assembler les camions.

Sans être légion, les “petites” absences ne sont pas inexistantes. L’absentéisme inférieur à trois semaines dépasse légèrement les 3 %. Il est redescendu près de ce seuil-cible après une montée de quelques points au printemps dernier, au retour de quinze mois de chômage partiel. L’absentéisme global, comprenant arrêts maladie, accident du travail et maladies professionnelles, se situe aux alentours de 5 %. Il atteint là aussi l’objectif maison.

Surveillance des “petites” absences

L’employeur a conscience que les absences de courte durée peuvent résulter d’autres facteurs que les débuts de problèmes physiques, et que leur répétition est à surveiller. La défection d’un salarié de moins de 30 ans sous couvert de certificat médical peut cacher en réalité un problème de démotivation, reconnaît-il. De plus, complète Karine Desgages, « nous avons à l’esprit que notre moyenne d’âge se situe à 40 ans, or c’est souvent l’âge des remises en question de tous ordres, professionnels comme privés, qui peuvent interférer sur l’assiduité au travail ». Dans ces cas, le manager n + 1 entre à nouveau en action : il lui est demandé de privilégier l’entretien informel et de garder un œil un plus vigilant sur le comportement au poste de travail. Chacun d’eux a été sensibilisé en juin au thème des risques psychosociaux.

En revanche, ces responsables d’îlots de production n’ont pas été spécifiquement formés à l’entretien de réaccueil. Ils ne suivront une séance de deux jours que cet automne. La direction a voulu ce séquençage, afin de laisser l’initiative se mettre en place avant d’opérer les ajustements.

SCANIA PRODUCTION SAS (ANGERS)

• Activité : production de 10 000 à 12 000 camions par an.

• Effectifs : 513 salariés, dont 373 opérateurs (groupe Scania : 32 000 salariés).

• Chiffre d’affaires groupe : 6,6 milliards d’euros en 2009.

Auteur

  • CHRISTIAN ROBISCHON