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Les pratiques

La fonction publique consomme l’intérim avec modération

Les pratiques | Retour sur… | publié le : 07.09.2010 | CÉLINE LACOURCELLE

Depuis onze mois, les trois fonctions publiques ont la possibilité de recruter des intérimaires. Si les agences de travail temporaire sont fin prêtes à investir ce créneau, les administrations, elles, ne se pressent pas.

Il faudra du temps pour que la greffe prenne. C’est en substance la conclusion avancée tant du côté de la fonction publique que du travail temporaire, deux mondes autorisés à travailler ensemble depuis la loi du 3 août 2009. Son article 21, précisément, admet le recours à l’intérim dans les trois fonctions publiques pour le remplacement momentané d’un agent absent, la vacance temporaire d’un emploi ne pouvant être immédiatement pourvu du fait de son statut, un besoin occasionnel ou saisonnier et, enfin, un accroissement temporaire d’activité.

200 à 300 clients

Jean-Baptiste Thiercelin, directeur du pôle public de Randstad, déclare totaliser aujourd’hui entre 200 et 300 clients parmi lesquels des préfectures, des communautés de communes, des syndicats mixtes… Dans 9 cas sur 10, leurs besoins se portent sur des catégories B et surtout C. « On note beaucoup de curiosité de la part de la fonction publique territoriale », observe Christophe Catoir, directeur général des opérations Est-sud d’Adecco France. « Certains ministères ont rédigé des notes de services donnant le feu vert à leurs services déconcentrés », ajoute Jean-Baptiste Thiercelin. Dans l’hospitalière, la pratique de l’intérim, plus ancienne, est déjà une habitude.

Henri Robert, secrétaire général de l’Agence de services et de paiement de l’Etat, en charge du versement de certaines aides publiques, a expérimenté le travail temporaire à deux reprises. « Notre effectif de 2 500 agents reçoit le renfort temporaire et saisonnier de plusieurs centaines de CDD chaque année. Nous avons intégré des intérimaires non pour remplacer ces contrats, mais pour pallier les besoins nés de situations d’urgence et de courte durée. Ce qui a été le cas, cet été, lorsque le ministère de l’Agriculture a avancé le paiement des aides européennes aux agriculteurs. » Même approche très ciblée de la part de Raphaël Baudrimont, DRH de l’Institut national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (une centaine d’équivalents temps plein), qui a notamment intégré des intérimaires en remplacement de deux agents subitement absents. « L’intérim est un outil RH très utile dans de petites structures comme la nôtre, pour aider à assurer la continuité de notre mission de service public. » Rien ne laisse toutefois penser que les intérimaires vont se substituer aux 800 000 emplois occupés en moyenne par des contrats de droit privé. Pourtant, les entreprises de travail temporaire (ETT) en sont convaincues : le potentiel est important. « Lorsque La Poste et France Télécom sont devenues des établissements publics, il a fallu près de quatre ans pour construire une vraie collaboration. Aujourd’hui, ce sont nos premiers clients », se souvient Christophe Catoir.

Pas de consensus du côté syndical

Si aucun bilan n’est pour l’heure disponible au Prisme, l’organisation patronale du secteur, on sait déjà qu’il n’y a pas eu de ruée vers cette nouvelle forme d’emploi. Il faut dire qu’elle ne fait pas consensus, en particulier du côté des syndicats. « Les expériences à l’hôpital n’ont pas toutes été heureuses. Le renfort d’intérimaires ayant déstructuré certaines équipes en place », signale Anne Baltazar, secrétaire nationale FO Fonctionnaires, qui s’interroge sur la capacité de ces recrues d’un nouveau genre à intégrer en si peu de temps l’état d’esprit de service public appris et conforté par l’expérience. Brigitte Jumel, secrétaire générale de l’Uffa CFDT, trouve, quant à elle, qu’« il y a déjà fort à faire avec les nombreux statuts, publics, privés et aidés. » Les responsables des différentes administrations utilisatrices prennent donc le soin d’expliquer leur démarche. Ainsi, Henri Robert a peaufiné l’information préalable diffusée tant aux représentants du personnel qu’aux agents, et Raphaël Baudrimont a, lui, clairement annoncé en interne la nature des missions, destinées à pourvoir l’imprévisible.

Nécessaire pédagogie

Reste aux ETT à faire un peu de pédagogie. « Nous avons organisé une trentaine de petits déjeuners entre permanents de Randstad et représentants des administrations pour une meilleure connaissance réciproque », souligne Jean-Baptiste Thiercelin, qui a également proposé dans toutes les agences du réseau une journée de formation pour briefer les équipes sur l’organisation de la fonction publique. L’occasion de présenter le droit des marchés publics, potentiel frein au recours à l’intérim. En effet, au-delà de 4 000 euros (soit l’équivalent d’une mission de 1,5 mois en catégorie C), les établissements publics ont l’obligation de faire jouer la concurrence.

Le prochain chantier sur les contractuels, programmé au deuxième semestre par Georges Tron, secrétaire d’Etat à la Fonction publique, sera sans aucun doute l’occasion d’aborder cette timide pratique de l’intérim. Les syndicats y comptent bien.

Auteur

  • CÉLINE LACOURCELLE