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Préparer les salariés au virage vert

Enquête | publié le : 31.08.2010 | VIOLETTE QUEUNIET

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Préparer les salariés au virage vert

Crédit photo VIOLETTE QUEUNIET

Pression réglementaire et coût de l’énergie renforcent l’intérêt des entreprises pour les problématiques environnementales. Certaines en font une opportunité en « verdissant » leur offre. De la simple sensibilisation à l’intéressement, en passant par de la formation lourde, les entreprises cherchent à adapter leurs salariés à cette nouvelle donne.

Souci de maîtriser les dépenses d’énergie en période de crise, prise de conscience écologique, peur du gendarme : il y a un peu de tout ça dans l’intérêt porté à l’environnement par les entreprises. Une récente étude à l’international de Regus(1) révèle ainsi que les entreprises françaises sont parmi les plus soucieuses de l’environnement : 59 % contrôlent leurs émissions d’énergie et 54 % ont défini une stratégie environnementale.

A l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), Sylvie Padilla, responsable du service entreprises et écotechnologies, confirme cette tendance : « Nous sommes beaucoup sollicités par des fédérations professionnelles ou de grands groupes qui veulent mettre en place un management environnemental. » L’organisme a ainsi travaillé avec la Fédération des entreprises de propreté sur le volet environnemental de leur démarche de développement durable (lire p. 25)

Des compétences nouvelles à développer

Le Grenelle de l’environnement a certainement accéléré la prise de conscience, même si la loi qui en est issue(2) reste, de l’avis des experts, en deçà des ambitions initiales. Certaines dispositions impactent les entreprises : le bilan carbone obligatoire pour celles de plus de 500 salariés ; la mise en place progressive d’un affichage du prix carbone sur les produits ; l’expérimentation de péages urbains qui auront des conséquences sur l’activité des transporteurs ; le renforcement des dispositifs visant à l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments.

Pour les secteurs les plus touchés, il devient crucial de sensibiliser les salariés à l’environnement, voire de les doter de nouvelles compétences. « La formation des salariés a été le mot d’ordre général et un sujet de travail majeur pour les représentants des entreprises aux groupes de travail du Grenelle de l’environnement », indique Marie-Jeanne Bazin, membre de la commission nationale Environnement et développement durable de la CGPME. C’est d’autant plus vrai dans les secteurs qui intègrent désormais l’environnement dans leur offre commerciale.

Dans une convention signée le 10 juin dernier avec le ministère du Développement durable et EDF, la profession du bâtiment vient ainsi de s’engager à former 120 000 salariés du secteur aux économies d’énergie d’ici à 2012. Pour les métiers du chantier, il s’agit d’adaptations techniques. Mais les enjeux environnementaux changent en profondeur d’autres fonctions de ce secteur, à l’exemple du groupe Vinci (lire p. 23).

Quand elles mettent en œuvre ces actions de sensibilisation, les entreprises sont souvent surprises par l’adhésion des salariés. « Le développement durable est un levier très puissant de motivation des équipes, à condition qu’il s’inscrive dans la stratégie générale de l’entreprise », observe André Sobczak, directeur de l’Institut pour la responsabilité globale dans l’entreprise et professeur à Audencia Nantes. A condition aussi que la question de l’environnement s’incarne vraiment dans le quotidien des salariés.

La communication venue du siège en matière de développement durable ne suffit pas pour les motiver, comme le prouve, a contrario, l’expérimentation menée par le club Déméter auprès de 1 000 salariés dans 6 entrepôts de logistique (lire p. 26). Alors même qu’ils étaient sceptiques sur l’engagement de leur entreprise, 80 % d’entre eux ont déclaré qu’ils avaient un rôle personnel à jouer dans ce domaine. « Il n’existe pas d’autre sujet qui recueille autant de suffrages. Même sur la sécurité, on n’a pas ces taux-là. Si le sujet passe bien, c’est qu’il est porteur de sens. Aujourd’hui, chacun d’entre nous est concerné par l’environnement. Le salarié transfère dans l’entreprise ce qu’il fait déjà chez lui », observe Jean-Marie Picard, animateur du club Déméter et professeur à l’université d’Aix-Marseille 2.

Pour maintenir cet engagement et tenir compte des efforts des salariés, certaines entreprises redistribuent une part des économies que leurs écogestes ont générées, voire les associent aux décisions (lire p. 26). Les PME ne sont pas à la traîne. « Les exemples les plus innovants proviennent des entreprises de petite taille », constate André Sobczak. Un constat à méditer, à l’heure où la quête de motivation des salariés constitue le Saint Graal des DRH. L’ANDRH ne vient-elle pas de proposer de faire de l’engagement sous toutes ses formes un levier de performance individuelle et collective ?

Une problématique transversale

Pourtant, les services RH restent en retrait sur le volet environnement des démarches de développement durable, comme le souligne Stanislas Dupré, directeur général d’Utopies, agence conseil en développement durable (lire p. 27). Ils auraient pourtant, selon lui, un rôle majeur à jouer, au-delà des actions de formation et de sensibilisation des salariés.

« Le développement durable est une problématique transversale : les risques environnementaux sont aujourd’hui des risques juridiques et financiers. L’exemple du pétrolier BP est frappant : la plus grosse entreprise sur la place financière de Londres a perdu près des deux tiers de sa valeur suite à la fuite de pétrole au large de la Louisiane, ajoute-t-il. A l’avenir, les directions juridiques et financières, pour s’améliorer dans leur métier, devront s’appuyer sur la direction du dé­veloppement durable. Décloisonner les services est une problématique pour les RH. »

(1) Etude menée en mars 2010 auprès de 15 000 entreprises dans 75 pays.

(2) Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite Grenelle 2.

L’essentiel

1 La problématique de l’environnement est de plus en plus prise au sérieux par les entreprises et peut impacter leur offre, donc leurs métiers

2 Préparer les salariés au “virage vert” devient une nécessité. Les secteurs les plus touchés mettent en place des actions de sensibilisation et de formation.

3 L’environnement est un thème fédérateur qui suscite généralement l’engagement des salariés. Les services RH pourraient davantage s’en saisir.

Auteur

  • VIOLETTE QUEUNIET