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« Il faut développer la pluriactivité des saisonniers »

Enquête | L’entretien avec | publié le : 22.06.2010 | PROPOS RECUEILLIS PAR E. S.

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« Il faut développer la pluriactivité des saisonniers »

Crédit photo PROPOS RECUEILLIS PAR E. S.

E & C : Vous organisez en fin d’année un forum social des saisonniers : quel en est l’objectif ?

R. D. : Nous voulons faire des propositions pour améliorer les conditions de vie et de travail des saisonniers, en construisant de nouveaux droits et en partageant les bonnes pratiques.

De plus, nous voulons braquer les projecteurs sur l’emploi saisonnier, au moment où se renégocie la convention de l’assurance chômage, car, régulièrement, il est question de supprimer les allocations pour les saisonniers après trois saisons. Cette règle a d’ailleurs déjà été appliquée entre 2006 et 2008. Les partenaires sociaux estimant que l’allocation de remplacement risque d’être transformée en allocation de complément.

E & C : Vous parlez du travail saisonnier comme d’un laboratoire de la précarité. Que voulez-vous dire ?

R. D. : Non seulement les saisonniers ne touchent pas la prime de précarité du CDD classique, mais en plus leurs allocations Assedic sont minorées, alors qu’ils payent les mêmes cotisations que les autres salariés. Or les saisonniers ne profitent pas de l’assurance chômage : en 2007, seuls 87 000 ont touché des indemnités. Par ailleurs, les CDD saisonniers ont tendance à être étendus à de nouveaux secteurs : musées, stations-service, même les banques. C’est un contrat emblématique d’une certaine idéologie, celle qui veut qu’on ne rémunère les salariés que pour le temps passé au travail. Avec le CDI, il y a des périodes de moindre activité, où l’on n’est pas sous la pression immédiate du résultat. Les saisonniers, eux, travaillent à flux tendu, font des heures supplémentaires qui, dans 25 % des cas, ne sont pas rémunérées.

E & C : Que préconisez-vous pour sécuriser les parcours des saisonniers ?

R. D. : Plusieurs pistes sont possibles, comme la reconduction automatique des contrats d’une saison à l’autre en cas d’évaluation positive, le versement d’un 13e mois au prorata temporis, de la prime de précarité… Il faut aussi trouver le moyen de développer la pluriactivité en facilitant l’accès aux formations diplômantes. La France est la première destination touristique, il est logique qu’il y ait des besoins de main-d’œuvre saisonnière. Mais il est anormal que l’on puise sans contreparties dans ce réservoir. Les aides au logement et au transport devraient ainsi être incluses dans le contrat saisonnier.

E & C : La saisonnalité est-elle toujours subie ?

R. D. : Certains saisonniers, en général des femmes, affirment trouver dans les mois d’intersaison des aspects positifs, un moyen de se réoxygéner. Néanmoins, les enquêtes montrent que ce phénomène est minoritaire : 90 % des saisonniers qui travaillent entre huit et dix mois par an souhaitent avoir un CDI. La plupart n’ont pas choisi la forme de leur contrat.

E & C : Les employeurs peuvent-ils tirer un bénéfice d’une meilleure prise en charge des saisonniers ?

R. D. : Certainement. Il y a, du côté des employeurs, plusieurs approches. Ceux qui, à court terme, profitent d’un salariat fragile. Et ceux qui sont prêts à investir dans la formation, le logement, la rémunération des saisonniers. C’est une démarche citoyenne et pragmatique : si l’on veut attirer les touristes, il faut une bonne qualité de service et, pour cela, des salariés formés qui se sentent bien au travail.

* Du 3 au 5 décembre à Aubagne (13).

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