logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Enquête

Le géant que les Américains aiment détester

Enquête | publié le : 15.06.2010 | CAROLINE CROSDALE

Image

Le géant que les Américains aiment détester

Crédit photo CAROLINE CROSDALE

A Wal-Mart, enseigne emblématique du hard discount, les salaires et les avantages sont aussi bas que les prix. Et les syndicats n’ont pas droit de cité.

Pour tenir son engagement “every day low prices”(1), la direction de Wal-Mart contrôle d’une main de fer ses dépenses. Sam Walton, le fondateur de l’hypermarché de Bentonville, une petite ville de l’Arkansas, a systématiquement refusé le militantisme syndical parmi ses troupes, afin d’éviter toute inflation sur les salaires. Officiellement, la porte du patron est toujours ouverte : il n’y a donc nul besoin d’un intermédiaire syndical entre Sam Walton et ses “associés”.

En réalité, il n’y a personne pour négocier avec la direction sur les salaires, les évolutions de carrières ni sur tout autre sujet qui fâche. Cet antisyndicalisme vaut toujours aujourd’hui pour les 2,1 millions d’employés de Wal-Mart dans le monde.

Echec des tentatives de syndicalisation

Il y a dix ans, les bouchers de Jacksonville dans l’Etat du Texas ont voté, à plus de 50 %, en faveur de l’introduction d’un syndicat dans leur centre de préparation. Quelques mois plus tard, Wal-Mart a fermé le site. La même stratégie a été appliquée en 2004 dans le magasin de Jonquière au Québec, dont l’existence économique ne s’est soudain plus trouvée justifiée, après l’engagement de certains employés dans un syndicat. Le seul militantisme que la direction de Wal-Mart tolère est celui des troupes de All China Federation of Trade Unions, un syndicat lié au gouvernement chinois, très peu revendicatif.

L’antisyndicalisme de Wal-Mart a attiré les foudres de United Food and Commercial Workers (UFCW) et de Service Employees International Union (SEIU), deux syndicats américains de la profession qui s’empressent de comparer les feuilles de paye. En Californie, à qualification égale, un employé encarté auprès de UFCW gagne 26 % de plus que son confrère de Wal-Mart et, dans le Massachusetts, c’est 19 % de mieux.

Le recours à la plainte collective

Les conditions de travail sont également un sujet épineux. La direction de Wal-Mart emploie d’ailleurs un bataillon d’avocats pour faire face à une cinquantaine de class actions, des poursuites judiciaires collectives, dans plusieurs Etats. Les plaignants accusent leurs managers de leur avoir fait faire des heures supplémentaires non payées, et d’avoir supprimé les moments de pause pour déjeuner ou aller aux toilettes. Depuis 2001, une plainte collective pour discrimination vis-à-vis des femmes plane également sur Wal-Mart. Cette action en justice concerne plus de 1,6 million d’associées et ex-employées. Les 6 Californiennes à l’origine de la poursuite judiciaire affirment avoir été moins bien payées et beaucoup moins promues que leurs collègues masculins.

Wal-Mart, enfin, est connu pour la modestie de son assurance santé. En 2006, la direction du groupe a essayé de corriger le tir en proposant à ses salariés à temps partiel une couverture minimale pour 702 dollars par an. Mais l’intéressé doit avoir passé au moins un an dans la compagnie avant de postuler. Et le turn-over chez Wal-Mart est si important que nombre d’associés n’ont pas le temps d’être assurés.

Une image qui lui vaut parfois des levées de boucliers de la population. En 2004, les résidents de la commune californienne d’Inglewood ont par exemple refusé, par référendum, après des semaines d’agitation, l’implantation un centre géant de Wal-Mart. Ils craignaient notamment que le groupe n’écrase la concurrence et que ses standards sociaux ne tirent vers le bas les salaires et les conditions de travail locaux.

(1) « Tous les jours des petits prix ».

WAL-MART

• Activité : grande distribution hard discount.

• Effectif : 2,1 millions de salariés dans le monde.

• Chiffre d’affaires 2009 : 405 milliards de dollars.

Auteur

  • CAROLINE CROSDALE