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La réforme de la formation est peu lisible pour les entreprises

L’actualité | publié le : 08.06.2010 | LAURENT GÉRARD

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La réforme de la formation est peu lisible pour les entreprises

Crédit photo LAURENT GÉRARD

40 % des entreprises ne prennent pas en compte la nouvelle réforme de la formation professionnelle ; les autres, qui déclarent le faire, ne dominent pas le sujet, assure une étude du cabinet Tendance RH.

C’est un pavé dans la mare qu’il attendait de jeter depuis un bon moment ! Xavier Masse, dirigeant de Tendance RH, cabinet conseil en ingénierie de formation – dont l’ingénierie financière –, et ex-créateur du cabinet d’externalisation des services formation Cimes, regarde depuis longtemps les entreprises se débrouiller avec l’actuelle réforme de la formation professionnelle. Son constat : ce n’est pas un succès. Voulant objectiver son ressenti, il vient de boucler une étude, avec l’aide d’Opcalia Ile-de-France, réalisée du 15 février au 20 mai 2010 : 195 DRH et responsables formation d’entreprises de toutes tailles et de tous secteurs(1) ont répondu. Les résultats sont présentés aujourd’hui 8 juin. La même étude avait été menée en 2008, ce qui donne plusieurs points de comparaison.

Pas assez de communication

« Le fait le plus troublant dans l’étude de 2010 est que les entreprises ne comprenaient même pas les questions que nous leur posions, s’étonne encore Xavier Masse. Nous leur avons alors proposé de leur envoyer la loi et les premiers décrets, c’est-à-dire le B.A. BA : 70 % ont accepté ! C’est inimaginable. La portabilité du Dif, le reversement de 13 % au FPSPP, la fin des contrats de professionnalisation sur des titres reconnus par les seules conventions collectives, ça leur passait au-dessus de la tête ! La lenteur de la réforme et l’absence de décrets fondamentaux rendent l’affaire illisible pour les entreprises. Et tout le monde est fautif : l’Etat, les branches et les Opca, qui ne communiquent pas assez ou avec beaucoup de retard. »

Mise en œuvre opérationnelle

Donc, premier enseignement chiffré de cette enquête : 40 % des entreprises interrogées ne prennent pas en compte la nouvelle réforme dans leurs pratiques de formation. A l’inverse, 60 % des entreprises déclarent travailler à la mise en œuvre opérationnelle de certains éléments de la réforme, dont le DIF (87 %), l’entretien d’évaluation professionnel des plus de 45 ans (85 %), le développement du tutorat senior (51 %), les périodes de professionnalisation de plus de 120 heures (45 %), le passeport orientation et formation (42 %).

Critères restrictifs du cofinancement

Deuxième constat de l’enquête : les entreprises prévoient que les cofinancements d’Opca vont devenir plus difficiles. En 2008, 81 % en ont utilisé. Ce chiffre passe à 76 % en 2009, et pourrait tomber à 60 % en 2010 ! Pourquoi ? « Parce que les entreprises pensent que les critères d’éligibilité vont se durcir, et qu’elles voient dans ces cofinancements une lourdeur administrative supplémentaire ; de plus, depuis janvier, les Opca se taisent sur ce genre de question, explique Xavier Masse. En réalité, la question du cofinancement est à analyser sous deux angles différents. Sur les DIF et périodes de professionnalisation, les entreprises réduisent leurs ambitions sachant que les critères de cofinancement seront plus restrictifs. En revanche, sur le plan de formation, leurs attentes sont en forte augmentation, passant de 49 % en 2008 à 72 % en 2010. Elles souhaitent pouvoir au minimum récupérer les 13 % de versements au Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels ; mais là, il va y avoir des surprises. »

Troisième révélation : 75 % des entreprises ne connaissent pas les fonds d’urgence formation du FUP-FPSPP (qui font l’objet d’appels à projet en ce moment) pour l’aide au reclassement de salariés en voie de licenciement ou de chômage partiel. Seule 1 entreprise sur 4 en connaît l’existence et seules 7 % les utilisent. « Il y a eu de la communication autour de ce fonds d’urgence, reconnaît Xavier Masse, mais c’est quand même d’une logique et d’une construction très compliquées. »

Besoin de conseils, d’outils et de méthodes

En conséquence, de quoi les entreprises estiment-elles avoir besoin pour mettre en œuvre la nouvelle réforme ? De conseils et d’outils (45 %) ainsi que de méthodes (34 %). Auprès de qui pensent-elles devoir les trouver ? Auprès des Opca : 66 % des responsables interrogés souhaitent en effet que ces organismes proposent d’autres services, en particulier du conseil. Ce chiffre était de 62 % en 2008.

(1) 70 entreprises de 0 à 50 salariés ; 80 de 50 à 250 ; le reste étant composé d’entreprises de plus de 250 salariés, dont 11 entreprises du CAC 40.

Coup de mou sur les budgets

→ Les budgets formation en 2010 ? 50 % seront constants (contre 58 % en 2008), mais 33 % seront à la baisse (27 % en 2008) et seuls 17 % seront à la hausse (15 %), assure l’étude Tendance RH.

→ Etonnamment, ce sont les entreprises de plus de 50 salariés qui annoncent plus souvent des budgets à la baisse : dans 39 % des cas contre seulement 26 % pour les entreprises de moins de 50 salariés. « Cette baisse résulte d’un choix stratégique de l’entreprise en rapport avec la situation économique, analyse Xavier Masse. Elle n’est pas forcément liée aux 13 % reversés au FPSPP. »

La portabilité du DIF n’emballe pas

→ 53 % des DRH et responsables formation estiment que la portabilité du DIF se traduira d’abord par une lourdeur administrative supplémentaire. Ce chiffre est cependant en régression par rapport à celui de 2008 (57 %).

→ Bonne nouvelle : le sentiment de charge financière chute de 43 % à 29 % entre 2008 et 2010.

→ Mauvaise nouvelle : les entreprises ne pensent pas que la portabilité du DIF sera un moyen de favoriser l’utilisation de ce droit par les salariés : le taux d’avis positifs sur cette question passe de 40 % en 2008 à 19 % en 2010.

Auteur

  • LAURENT GÉRARD

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