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Les pratiques

Maigre bilan à mi-parcours du “CDD de mission”

Les pratiques | Retour sur… | publié le : 01.06.2010 | MARIETTE KAMMERER

En test jusqu’en 2013, le CDD à objet défini, destiné aux cadres et ingénieurs, n’a pas vraiment trouvé preneur sur le terrain. Seules quelques branches et entreprises ont négocié sa mise en application.

Qu’est devenu le CDD à objet défini (CDD OD) ? Deux ans après sa création par la loi du 25 juin 2008, ce CDD long, réservé aux cadres et ingénieurs, a rencontré très peu de succès, bien que réclamé de longue date par le patronat. A ce jour, seules deux ou trois branches et une poignée d’entreprises ont conclu un accord permettant d’y recourir.

Un contrat éloigné des besoins réels

« Il faut laisser le temps de la négociation, de la procédure d’extension, puis du recrutement, estime Jean-Claude Guéry, directeur des affaires sociales de l’AFB (Association française des banques). Ce contrat n’a pas vocation à être très répandu, il concerne des projets et situations très spécifiques. » Trop tôt pour parler d’un échec de la mesure ? Néanmoins, on peut s’étonner que les branches les plus intéressées par ce contrat, la métallurgie et l’industrie automobile par exemple, n’aient pas signé d’accord : « Cela montre bien que la flexibilité réclamée par le Medef ne correspond pas aux besoins des employeurs », tranche Marie-Françoise Leflon, secrétaire nationale à la CFE-CGC.

Cumul des contraintes

Parmi les raisons de cet échec, la lourdeur d’utilisation est sans doute dissuasive. « Ce CDD est déjà restrictif et contraignant de par la loi, or les négociations de branche ou d’entreprise y ajoutent de nouvelles contraintes qui peuvent le rendre quasi-inutilisable, constate Francis Bergeron, DRH de SGS France, société spécialisée dans le contrôle, les inspections et les certifications. C’est pourquoi les négociations ont échoué dans certaines branches. »

Les entreprises trouvent parfois plus simple d’embaucher en CDI, puis de signer une rupture à l’amiable : « C’est le cas dans la branche Syntec, qui n’a pas souhaité mettre en place le CDD OD et utilise beaucoup les ruptures conventionnelles », souligne Régis Granarolo, président du Munci*. Selon Danielle Kaisergruber, consultante spécialiste de la flexisécurité, « il existe déjà de multiples formules de recrutement, pas toujours bien connues, il est inutile d’en créer de nouvelles, il vaut mieux tendre à la simplification. »

Dans le secteur de la recherche, ce contrat présente pourtant un intérêt évident. « Il va nous permettre d’embaucher des chercheurs pour trois ans, ce qui correspond à la durée d’un protocole de recherche », explique Sébastien Bosch, DRH adjoint de la Fédération des centres de lutte contre le cancer, dans la branche associative sanitaire et sociale (Bass). Dans cette branche, signataire d’un accord en juin 2009, le CCD OD servira aussi pour des missions d’évaluation et de développement de la qualité, et permettra de faire des économies : « Nous pourrons recruter directement des experts au lieu de faire appel à des cabinets extérieurs très coûteux », estime la CFE-CGC, seule signataire de l’accord.

La fédération bancaire, qui a signé un accord en mai 2009, fait la même réflexion : « Les évolutions des systèmes informatiques ne seront plus confiées à la sous-traitance, cela coûtera moins cher et on aura le choix du recrutement », estime Jean-Claude Guéry. C’est justement ce qui inquiète le représentant du Munci*: « Le CDD OD entre en concurrence directe avec les prestations des SSII et des informaticiens indépendants, ce n’est pas étonnant que Syntec n’ait pas voulu autoriser ce contrat dans sa branche. »

Répondre à des besoins ponctuels

Pour l’instant, les recrutements en CDD OD demeurent plus que confidentiels. SGS France vient de parapher les premiers contrats avec des experts chargés de prospecter le marché du contrôle radar sur les routes et autoroutes. Le groupe a signé un accord en janvier 2010 pour répondre à des besoins ponctuels : « A chaque nouvelle législation, nous recrutons des équipes commerciales et des experts pour prospecter les entreprises soumises à cette nouvelle norme, explique Francis Bergeron, ces missions durent entre deux et trois ans, puis nous passons à un autre marché. » Ce contrat sera utilisé seulement dans les sociétés du groupe qui n’ont pas accès au contrat de chantier, et concernera à peine 20 personnes sur 500 recrutements.

* Munci : association professionnelle des informaticiens.

DÉFINITION ET FONCTIONNEMENT DU CDD OD

• Le CDD à objet défini, créé à titre expérimental pour cinq ans, est encadré par l’ANI du 11 janvier 2008 et la loi du 25 juin 2008 sur la modernisation du marché du travail. Il doit permettre de recruter des cadres et ingénieurs pour des missions comprises entre 18 et 36 mois. Le recours à ce contrat est subordonné à la conclusion d’un accord de branche étendu ou, à défaut, à un accord d’entreprise précisant les motifs et les conditions de recours.

• Le CDD peut être rompu au bout de 18 mois ou de 24 mois pour un motif réel et sérieux, sinon il se termine à la fin de la réalisation du projet, après un délai de prévenance de 2 mois minimum. Le salarié perçoit une indemnité de fin de contrat de 10 % de son salaire total brut.

Auteur

  • MARIETTE KAMMERER