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Les fournisseurs mis sous surveillance

Entreprise & Carrières | Relations Sociales | publié le : 24.03.2015 | Virginie Leblanc

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Réputation oblige, les multinationales se préoccupent des conditions de travail chez leurs sous-traitants. Et les entreprises françaises pourraient être bientôt soumises à l’obligation de construire des plans de vigilance. Etat des lieux

Près de deux ans après l’effondrement de l’immeuble Rana Plaza au Bangladesh, le 24 avril 2013, occupé par de nombreux ateliers textiles travaillant pour des marques européennes et américaines, qui a causé 1 138 morts, plusieurs entreprises françaises – dont Carrefour et Auchan – ont signé l’accord sur la sécurité incendie et la sécurité des bâtiments au Bangladesh. Négocié à l’initiative d’IndustriALL et d’UNI Global Union, il conduit les quelque 190 signataires à s’engager dans des programmes d’inspection des usines – auxquels participent les travailleurs et les syndicats – et à élaborer des plans de correction. Des comités de santé et sécurité élus sont aussi chargés de déceler les risques. À ce jour, 1 100 usines ont été inspectées, 86 000 problèmes de sécurité relevés, et 500 plans d’actions approuvés.

Proposition de loi. Par ailleurs, la France va peut-être très prochainement se doter d’une loi instituant un devoir de vigilance des multinationales à l’égard de leurs filiales, de leurs sous-traitants et de leurs fournisseurs. La proposition de loi, déposée le 12 février par le grou­pe socialiste, à l’initiative des députés Dominique Potier et Philippe Noguès, doit être examinée le 30 mars à l’Assemblée nationale.

« La survenance des dommages portant atteinte aux droits humains et à l’environnement engagera la responsabilité civile de la société mère française. Sur le terrain, il nous paraît impossible d’imaginer une obligation sur un champ aussi vaste », observe Stéphanie Robert, directrice de l’Afep (Association française des entreprises privées). Selon elle, si les entreprises s’accordent sur la nécessité de faire preuve de vigilance au-delà de leurs propres frontières et sont favorables à la transparence sur les processus mis en œuvre, elles s’inquiètent de la faisabilité et des incidences de la proposition de loi : « En effet, aucun pays n’a transformé la vigilance raisonnable en obligation légale, en raison de la difficulté d’en définir le contenu. De plus, une loi purement française n’est pas le bon vecteur pour atteindre les objectifs du texte. »

Source d’inquiétude supplémentaire pour l’organisation, le texte prévoit que toute association de plus de cinq ans pourrait saisir le juge pour qu’il mette en jeu la responsabilité et prononce une amende pouvant s’élever à 10 millions d’euros, avec publicité de la sanction.

Mais les ONG qui ont porté cette proposition de loi, dont Sherpa, le Collectif de l’éthique sur l’étiquette, CCFD-Terre solidaire, entre autres, font valoir qu’il est  temps que les donneurs d’ordre prennent enfin leurs responsabilités : « Les chartes et les codes publiés par les entreprises étaient utiles il y a vingt ans, car elles n’avaient pas de discours sur la RSE. Aujourd’hui, ce sont plutôt des déclarations d’intention qui engagent surtout la chaîne de valeur et pas la multinationale. Les audits, s’ils sont importants, n’ont pas empêché la violation des droits humains au travail », constate Nayla Aljatouni, du Collectif de l’éthique sur l’étiquette, qui regroupe des organisations de la société civile, engagées pour défendre les droits humains au travail dans des secteurs à forte intensité de main-d’œuvre (habillement, jouet, électronique). Pour le collectif, exiger des délais de production et des prix intenables a forcément une incidence sur les conditions de travail des salariés des sous-traitants.

Selon le cabinet Deloitte, qui a publié en février une étude sur les droits de l’homme dans les grandes entreprises européennes, si 67 % d’entre elles formalisent leurs exigences vis-à-vis de leurs fournisseurs, seulement 23 % intègrent des critères relatifs aux droits de l’homme ou aux droits sociaux fondamentaux à la qualification et à la sélection de leurs fournisseurs, parmi lesquelles Carrefour.

Contrôle des engagements. Dans une étude à paraître prochainement, Vigeo a posé la question de la manière dont, concrètement, 25 grandes entreprises s’assurent de la tenue des engagements RSE dans le cadre de leur processus d’achats : « Les entreprises répondent : par les audits et par le choix d’être certifiées ou labellisées par tel ou tel organisme. Le problème

Auteur

  • Virginie Leblanc