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Les Pratiques

Une réglementation inadaptée

Les Pratiques | L'AVIS DU JURISTE | publié le : 27.06.2006 | Alice Fages Juriste en droit social

Si, pour le salarié, la solution du travail à domicile est tentante pour faire l'économie des temps de transport, cette pratique se heurte à des difficultés juridiques qui n'incitent pas les employeurs à y recourir.

L'une des premières difficultés pour rédiger le contrat est la fixation du volume de travail et de son corollaire, la rémunération. L'article L. 721-7 C.tr. impose à l'employeur d'établir un carnet sur lequel figurent la nature, la quantité de travail, les temps d'exécution, les prix de façon ou salaires applicables. A défaut, le nombre d'heures de travail n'étant pas connu, la présomption de travail à temps complet s'applique (Cass. soc. 19/1/2005, n° 03-47.343). La difficulté réside généralement dans la fixation du temps d'exécution de la tâche, l'employeur devant se référer à un temps moyen d'exécution. Compte tenu de la sanction encourue, cet élément est d'importance et devra donc faire l'objet d'une attention particulière.

Une fois ce premier écueil passé, une autre difficulté surgira si la quantité de travail fournie par l'employeur varie de façon importante. Si le principe est que l'employeur n'a pas l'obligation, sauf clause contractuelle contraire, de fournir un volume de travail constant, « il ne peut cependant modifier unilatéralement et sans justification la quantité de travail fourni et la rémunération », la clause de variabilité insérée à cet effet étant nulle (Cass. soc. 5/4/2006, n°03-45.888). Dans cette affaire, la salariée, correctrice de copies à domicile, avait vu sa rémunération annuelle baisser de moitié en quatre ans ; elle a bénéficié d'importants dommages et intérêts pour réparer le préjudice résultant de la faute de l'employeur, celui-ci ne justifiant la diminution de travail fourni par aucun élément objectif. Peut-on, a contrario, considérer qu'en présence d'éléments objectifs (baisse d'activité...), l'employeur pourrait sans risque diminuer la quantité de travail fourni ? Nous ne le pensons pas, et il est alors conseillé d'engager une procédure de licenciement : mais, à quel moment faudra-t-il la déclencher ?

Enfin, concernant la fixation du lieu de travail, l'insertion d'une clause de mobilité dans le contrat, qui permettrait à l'employeur de pouvoir imposer au salarié de travailler au siège de l'entreprise si la solution du travail à domicile ne lui convient plus, n'a pas de valeur. Il a, en effet, été jugé que, malgré la clause, l'employeur ne peut modifier cette organisation sans l'accord du salarié (Cass. soc. 31/5/2006, n° 04-43.592).

Tout cela n'encourage pas les employeurs à tenter l'expérience du travail à domicile, et il est temps de le réformer, tout en prévoyant des spécificités pour le télétravail, afin de lever les freins au développement de ce nouveau mode d'activité.

Auteur

  • Alice Fages Juriste en droit social