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Les Pratiques

L'usine de Mulhouse fait de la place aux femmes

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 30.11.2004 | Christian Robischon

Grâce à plus de 250 embauches en trois ans, les femmes représentent près de 15 % de l'effectif du site alsacien du constructeur. Ses efforts portent, notamment, sur l'ergonomie des postes de travail.

C'est une petite révolution mentale qu'a consacré l'accord PSA sur le «développement de l'emploi féminin et l'égalité professionnelle», signé le 4 novembre 2003 par l'ensemble des syndicats. « Il y a vingt-cinq ans, on faisait peu de cas des femmes dans l'automobile. Nous n'étions là, paraît-il, que pour des salaires d'appoint, et c'étaient les hommes qui étaient bons à faire les voitures, se remémore Jacqueline Le Guilloux. C'est dire le chemin parcouru. » La déléguée FO peut d'autant plus se féliciter de l'accord que le site de Mulhouse, auquel elle appartient, fait figure de bon élève.

Progression supérieure à la moyenne

En trois ans, le site a recruté plus de 250 femmes, ce qui a fait passer leur part de 13 % à 17 % dans le personnel ouvrier et Etam. Il compte désormais 1700 salariées, représentant près de 15% de son effectif total, et rattrape peu à peu son retard sur la moyenne de PSA France (16 %). En 2004, les femmes ont ainsi représenté plus du quart des recrutements, contre 23 % en moyenne nationale.

L'usine aslacienne décline les quatre thèmes de l'accord : féminisation du recrutement, amélioration des conditions de travail, conciliation vie familiale/vie professionnelle, égalité des chances dans la progression de carrière. Cela sous le regard d'une commission paritaire de suivi, en veillant à ne pas tomber dans la discrimination positive ou la logique de quotas, et à ne pas se cantonner aux postes de bureau : les conductrices d'installation ou les femmes caristes ne sont plus rares.

Parcours qualifiant pour 39 femmes

Côté embauches, les jeunes filles se faisant toujours discrètes dans les filières industrielles, les recruteurs sont partis à leur recherche hors des quelques lycées de proximité qui constituent leur vivier traditionnel. Par ailleurs, PSA Mulhouse accueille 39 femmes dans le cadre de «Défi». Ce parcours qualifiant interentreprises vise à amener à un CQPM (certificat de qualification paritaire de la métallurgie) des diplômées d'un secteur très éloigné, comme la coiffure ou l'horticulture, en quête de reconversion. Avec de fortes chances d'embauche au final. Depuis 2003, des salariées ont aussi été recrutées, en CDD pour commencer, par la méthode de la simulation de l'ANPE : celle-ci s'adresse aux deux sexes, « mais ces tests mettent bien en évidence les qualités des femmes », constate Pierre Guénebaut, DRH de PSA Mulhouse.

Sur un marché local du travail plus tendu, les candidatures féminines ont, parallèlement, augmenté. Encore fallait-il leur trouver des postes adaptés. La proportion des postes classés «lourds» - fermés aux femmes pour des raisons physiques - se limite à 14 %. L'objectif consiste à la faire baisser à 8 % en 2008. Un chiffre «déjà atteint sur les postes spécifiques à la Citroën C4 (mise en production cet automne - NDLR)», affirme Pierre Guénebaut.

Détection des compétences

La meilleure conciliation vie privée/professionnelle fait, actuellement, l'objet d'une enquête. Quant à l'égalité des chances en matière de carrière, elle reste à atteindre, car les femmes sont sous-représentées dans la maîtrise. Elle repose sur la détection, par le personnel encadrant, des compétences connues ou plus cachées des salariées.

Ad ce souci de promotion interne, les syndicats ajoutent volontiers l'alignement des salaires féminins sur les salaires masculins. L'égalité est de mise à l'embauche, mais la « progression de carrière plus lente » crée ensuite un écart, reconnaît PSA. « Il s'est amoindri au fil du temps, mais il persiste », observe Jacqueline Le Guilloux. La rémunération figure dans la rubrique « Peut mieux faire », pour Joël Moreau, responsable CGT, qui attend aussi un effort plus conséquent sur la pénibilité des postes.

Pour développer l'emploi féminin hors des sentiers traditionnels, Mulhouse a pu s'appuyer sur un précédent. En effet, en 1999 et 2000, l'usine a reconverti en interne 800 femmes des ateliers de câblerie et sièges qui allaient être externalisés. Leur arrivée sur d'autres postes que ceux qu'elles occupaient traditionnellement a contribué à effacer les préjugés des hommes sur le travail de leurs collègues de l'autre sexe.

Paroles de salariée

A l'atelier des ensembles de roues, Patricia Brettrager a enfin trouvé le travail « le plus proche » de son brevet de bobinage en électromécanique, après des expériences en grande surface, en chocolaterie ou en bureau. « J'avais fait cette formation pour exercer un métier manuel. » Sa nomination comme conductrice d'installation leader, qui lui fait superviser 4 lignes de fabrication et 24 personnes, lui donne l'envie de monter dans la hiérarchie. « Si on le veut, on peut évoluer. » Mais les salariées en formation restent, malgré tout, rares : « En CQPM, j'étais la seule femme du groupe de 12 personnes. »

Auteur

  • Christian Robischon