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Trombinoscope

SANS | publié le : 29.01.2002 |

Société de services en informatique, genre un peu agité. A force de muter chaque semestre d'un site dans un autre, de renouveler quasi totalement ses équipements de bureautique, et d'intégrer en permanence de nouveaux experts, tous plus scintillants les uns que les autres, il devient difficile de savoir qui fait quoi : téléphones qui sonnent dans le vide, noms inconnus de quiconque, le succès a des contreparties pénibles pour le client. Détresse de la standardiste, qui fait ce qu'elle peut.

L'idée (pourtant évidente) vient alors de réaliser un trombinoscope pour faciliter la vie des clients réguliers, et accessoirement améliorer, en interne, la visibilité de toute l'organisation. « Vous comprenez, cette ruche est devenue un foutoir incompréhensible. Au-delà des pertes immédiates de performance, je trouve que nous ne sommes pas très accueillants pour les nouveaux intégrés. Peut-être qu'un trombino attestera de la réalité de notre effort d'intégration ? »

DRH autoproclammé, lo d'animateur TV, enthousiasme un peu automatique, mon interlocuteur guette mon approbation. Pourquoi pas, en effet. En tous cas, ça vaut le coup d'essayer. Risques nuls, résultats possibles, allons-y pour un trombinoscope.

Aucune consigne n'est alors donnée, chacun fournissant la photo de son choix, et c'est là que l'expérience s'avère la plus intéressante :

Qui sommes-nous au travail ?

La variété des réponses mérite d'être examinée : photo arrachée d'un vieux forfait de ski, photo d'identité noir et blanc, version police judiciaire, photo couleur manifestement réalisée par un professionnel, tenue austère sans rapport avec la réalité quotidienne, sourires de circonstance (genre le plus représenté), air martial, appliqué, détendu, hébété, absent, perdu, jovial, crispé, c'est un extraordinaire défilé de personnalités.

Moi qui les connais quasi tous, je fais part à certains de mon étonnement sur le choix de leur photo.

Deux réponses très significatives :

« Ce n'est pas moi, c'est ma photo. C'est comme ma vie au boulot. Ce n'est pas moi, c'est mon travail. Je ne mélange jamais », me dit le premier.

« Moi, j'ai choisi exprès la photo la plus neutre, la plus transparente ; je déteste qu'on me montre comme un objet décoratif », affirme le second.

Petite schizophrénie ordinaire, armée des ombres, qui sommes-nous vraiment dans l'entreprise ?