Travaillons-nous pour gagner de l’argent ? La question mérite d’être posée quand les patrons, d’un côté, se plaignent du coût trop élevé des salaires qui pénalisent le business ; et, de l’autre, enjoignent à leurs salariés un engagement sans faille au service de ces mêmes organisations. Nous expliquant que, dans le cadre sauvage de la compétition économique, le management par la bienveillance est plus efficace que le management par le contrôle, l’auteur, expert en psychologie positive, cherche certainement à s’inscrire dans cette tendance de fond de l’humanisme efficace, qui semble avoir universellement cours chez les théoriciens du management et des organisations.

Cependant, de manière étrange, cet appel généralisé à un management nouveau a maintenant plus de trente ans sans que la réalité ne paraisse changer, si ce n’est dans le sens du pire sur le terrain. Par ailleurs, ce management en douceur élude par sa récurrence et son insistance tout ce qu’il en est, à l’évidence, des rapports de force et de pouvoir économique et social dans les organisations, qui gagneraient à être enfin repensés plutôt que de décliner toujours cette vieille antienne vertueuse.

Certes, le management humaniste est sans doute plus efficace, mais qu’en est-il de notions aussi terre à terre que le partage de la valeur ajoutée entre le capital et le travail ? N’y a-t-il pas un vrai danger pour les travailleurs et la société à prendre la révolution du management pour une révolution tout court ?