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Complémentaire santé : ce que les branches recommandent

Zoom | publié le : 15.12.2015 | Séverine Charon

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Complémentaire santé : ce que les branches recommandent

Crédit photo Séverine Charon

En 2015, plus de 40 branches sont parvenues pour la première fois à négocier un accord en santé. La recommandation ou la corecommandation d’un organisme assureur a souvent été choisie, mais la mise en œuvre des actions de solidarité reste à préciser dans la très grande majorité des cas.

La généralisation de la complémentaire santé entre en vigueur le 1er janvier prochain, mais il est pourtant délicat de dresser un panorama des obligations conventionnelles qui pèsent sur les entreprises. L’année 2015 a en effet été riche en négociations : plus de 60 accords ont été signés, et les deux tiers correspondent à la mise en place d’obligations nouvelles au niveau de la branche. « Au lendemain de la signature de l’ANI du 11 janvier 2013, on attendait beaucoup plus d’accords. Une branche sur cinq avait déjà un accord en santé, c’est le cas aujourd’hui d’une branche sur trois. Ce n’est pas un raz de marée. La suppression des clauses de désignation est un facteur explicatif. La publication très tardive des textes également », estime Pierre-Alain Boscher, directeur métier protection sociale chez Optimind Winter, un cabinet d’actuariat conseil, qui a accompagné plusieurs branches.

« De nombreuses branches sont parvenues à un accord, et les négociations continuent. Notre grande déception reste l’absence d’accord dans certaines grandes branches, comme la métallurgie. Il y a des chambres patronales qui ne veulent pas contraindre leurs adhérents », estime Dominique Drouet, secrétaire confédérale à la CFDT. Manquent donc à l’appel : la métallurgie et le commerce de gros, dont les organisations patronales ont labellisé des contrats faute d’accord, mais aussi l’industrie textile et toutes les branches du bâtiment. La chimie et les agents généraux d’assurances ont choisi le référencement, à l’issue d’un accord instituant une couverture minimale. D’autres branches, comme la banque et toutes les familles d’assureurs et l’hospitalisation privée n’ont même pas engagé de négociations.

Nouveaux accords en 2016

Cette fin d’année n’est toutefois pas une date butoir, et de nouveaux accords pourraient voir le jour en 2016. « Nous sommes en train d’essayer de parvenir à un accord avec l’UNAPL pour les salariés des professions libérales, qui ne sont pas organisées en branche, comme les cabinets d’infirmiers et de kinésithérapeutes, indique Dominique Drouet. En cette fin d’année, les accords envoyés à la Direction générale du travail vont suivre un processus accéléré afin d’aboutir à l’arrêté d’extension le plus rapidement possible. » Si certains accords de branche n’étaient pas étendus au 1er janvier 2016, ils n’auraient de caractère obligatoire que pour les entreprises adhérentes d’organisations patronales signataires.

Majoritairement, les accords signés en 2015 font appel au mécanisme de recommandation ou de corecommandation, et imposent donc que 2 % des cotisations soient consacrées à financer des avantages non contributifs. Le contenu de ces actions, prévention santé ou action sociale, s’annonce comme un grand chantier de 2016.

Par ailleurs, « les accords de branche en frais de santé signés ne font pas de distinction entre cadres et non-cadres », observe Jérôme Bonizec, directeur général d’Adéis. Ces accords imposent en général des couvertures légèrement supérieures au panier minimum de l’ANI – prise en charge de dépassement d’honoraires sur consultations, léger relèvement des prestations en optique et en dentaire et prise en charge fréquente d’actes non remboursés par la Sécurité sociale, comme l’ostéopathie. Pour un panier ANI à 25 euros en moyenne, les accords de branche instituent des cotisations financées à parité entre employeur et salarié, aux alentours de 32 à 35 euros. Seule la branche des bureaux d’études, impose la mise en place d’une couverture pour le salarié et ses enfants, avec une cotisation nettement plus élevée que la moyenne, à 45 euros. Autre exception, la branche des gardiens d’immeubles, qui lie santé et prévoyance.

« Les partenaires sociaux de la branche du travail temporaire ont choisi d’apporter une vraie réponse en santé aux salariés qui travaillent durablement dans la branche, ce qui représente environ 800 000 personnes, soit plus d’un tiers des effectifs totaux. Une condition d’ancienneté et une portabilité conventionnelle ont été définies pour répondre aux spécificités de la branche. Ce dispositif nécessite encore d’être adapté par rapport aux novations de la LFSS 2016 », explique Pierre-Alain Boscher. Les salariés, une fois qu’ils ont travaillé dans la branche 414 heures sur douze mois glissants, ont droit à la couverture. Ce dispositif a nécessité la mise en place d’un gestionnaire unique, différent des deux assureurs recommandés.

Des obligations méconnues

« Pour l’instant, les entreprises relevant des accords frais de santé signés en 2015 dans leur branche sont encore un peu perdues. Elles méconnaissent notamment leurs obligations en termes de garanties minimales – différentes du panier de soin ANI – et de mise en œuvre des actions de solidarité prévues par l’accord de branche qui les concerne », souligne Jérôme Bonizec. « La difficulté pour la plupart des branches consiste à faire adhérer suffisamment d’entreprises pour que la mutualisation joue et que le régime puisse fonctionner. C’est une question d’autant plus cruciale pour les branches où les salariés ont plusieurs employeurs, comme le travail temporaire ou la propreté », remarque de son côté Pierre-Alain Boscher.

« La conformité en tout point des contrats santé proposés par les autres assureurs que les organismes recommandés est un vrai sujet. Pour un employeur, choisir un organisme recommandé, c’est la sécurité les yeux fermés, y compris pour les actions de solidarité obligatoires qui évolueront probablement chaque année », ajoute Jérôme Bonizec. Impossible toutefois de prédire le succès de ce nouveau dispositif de recommandation.

D’autant que certains accords, pourtant signés en 2015, doivent déjà faire l’objet d’un avenant. Comme le PLFSS 2016 prévoit que l’obligation de financement de l’employeur d’au moins 50 % ne concerne pas la seule couverture de l’ANI, les partenaires sociaux de la production agricole, du golf, du cartonnage, de l’import-export et de la distribution directe doivent revoir leur copie.

Auteur

  • Séverine Charon