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Le CICE a soutenu les rémunérations dans l’intérim

Pratiques | RETOUR SUR… | publié le : 13.05.2014 | N. L.

Grands bénéficiaires du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) créé en 2012, plusieurs groupes d’intérim ont, sous la pression syndicale, choisi d’en affecter une partie aux salaires, mais en ciblant les permanents. Un usage non prévu à l’origine.

Adopté en décembre 2012 au Parlement, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) profite largement à l’intérim. Pour la première année, il correspond en effet à 4 % des rémunérations inférieures à 2,5 smic, ultra-majoritaires dans la profession, avec 600 000 intérimaires en équivalent temps plein. « Il représenterait près de 400 millions d’euros pour notre secteur sur la base des rémunérations versées en 2013, estime François Roux, délégué général de la fédération professionnelle Prism’emploi. C’est une mesure salutaire dans un contexte de chutes des marges depuis plusieurs années. »

Son objectif : améliorer la compétitivité des entreprises via des efforts d’investissements, de recherche, de formation, de recrutement, de prospection de nouveaux marchés ou encore de reconstitution de fonds de roulement. Des critères rappelés par la CFDT dans son mode d’emploi du CICE, où, de fait, ne figure pas l’augmentation des rémunérations. Ce qui n’a pas empêché les syndicats de l’intérim de revendiquer une part du CICE en monnaie sonnante et trébuchante pour les salariés. Contactés, certains DRH n’ont pas souhaité réagir.

Crit a été le premier à consentir, en janvier, une prime de 750 euros aux salariés permanents, lors de la NAO 2013. « Mais rien aux intérimaires, dont la masse salariale a pourtant généré l’essentiel du CICE », déplore un délégué syndical. Chez Start People, une prime de 1 500 euros en moyenne a été versée en avril pour le collège employés, entre 2 200 et 2 700 euros pour les responsables d’agence, selon François Garry, DSC FO. « Cela représente quand même 10 % de ce crédit d’impôt, juge-t-il. Mais les salariés des fonctions support, soit un tiers des collaborateurs, n’ont rien touché, pas plus que les intérimaires. »

Désamorcer la colère des salariés

Chez le néerlandais Randstad, les cinq syndicats de la filiale française ont exceptionnellement fait front commun durant la NAO, fin 2013. « Nous sortons d’un plan de départs volontaires, plusieurs centaines d’agences ont été fermées ou regroupées, précise Jean-Pierre Lac, DSC FO. Pourtant, la filiale française dégage un gros bénéfice et verse 115 millions d’euros de dividendes aux actionnaires. Nous souhaitions que le CICE, estimé par notre expert à 52 millions d’euros, aille pour moitié aux salariés sous forme d’embauches et d’augmentations. »

Faute d’accord, « la direction a octroyé unilatéralement une hausse salariale de 1,3 % et une prime forfaitaire de 1 000 euros en mars pour les seuls permanents, soit 4,5 % de l’enveloppe totale du CICE, ajoute son homologue CGT, Yolande Gobbo. Officiellement, ce n’était pas lié au CICE, mais une manière de désamorcer la colère des salariés. » Car le dispositif a avivé les débats sur le partage de la valeur ajoutée. « Nous avons de gros doutes sur l’utilisation du CICE pour renforcer la compétitivité », souligne Nadine Dupret, DSC CFDT. La question fera d’ailleurs l’objet d’une information-consultation du CE avant le 1er juillet.

Manpower, vient, lui, de transmettre à son CCE la liste des « dépenses-investissements attribuables au CICE », qui s’élève à 81 millions d’euros pour 2013. Il s’agit surtout de projets informatiques, d’autres investissements, de maintien ou d’embauche de CDD, une petite partie de l’enveloppe allant aux salaires. « Les personnels permanents devraient percevoir environ 1 000 euros, les intérimaires ne percevront rien », déplore un délégué syndical. Adecco n’a pas mené de discussions spécifiques, même si le CICE a été pris en compte dans le variable des personnels d’agence, permettant d’atténuer les effets d’un nouveau système de calcul de la rémunération (lire Entreprise & Carrières n° 1181).

Convergence des revendications

« Je ne commente pas la politique salariale de nos adhérents, mais après plus de deux ans de baisse du marché et de réorganisations, il n’est pas étonnant de constater une convergence des revendications syndicales, indique François Roux. Au niveau de la branche, le CICE permet de financer en partie notre accord de sécurisation des intérimaires, avec notamment le CDI intérimaire et l’allongement de la durée d’emploi. » Des discussions doivent bientôt s’ouvrir sur le pacte de responsabilité et ses contreparties.

UN IMPACT POSSIBLE SUR L’ÉPARGNE SALARIALE

Le Conseil d’État a décidé, en mars 2013, qu’aucun crédit d’impôt ne devait être intégré dans le calcul de la participation des salariés aux résultats. Le CICE, tout comme le crédit d’impôt recherche, ne sont donc pas pris en compte. « Cet arrêt défavorise fortement les salariés, avec une réduction mécanique de l’enveloppe de participation », relève Jean-Pierre Laporte, expert-comptable associé au cabinet Syndex.

En matière d’intéressement, l’impact du CICE peut être variable. « L’Autorité des normes comptables préconise clairement de l’enregistrer au crédit d’un compte de charges de personnel, explique Jean-Pierre Laporte. Ce qui facilite l’atteinte des objectifs, s’ils sont financiers - résultat d’exploitation, résultat opérationnel courant, etc. Mais la Compagnie nationale des commissaires aux comptes considère que le CICE peut aussi venir en déduction de l’impôt, ce qui n’aurait pas de conséquence sur les résultats. »

Auteur

  • N. L.