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Les pratiques

La SNCF jongle avec la poursuite d’activité des salariés âgés

Les pratiques | Retour sur… | publié le : 23.11.2010 | H. T.

La réforme du régime de retraite des cheminots rend bien délicat l’exercice d’ajustement des entrées et des sorties à la SNCF, qui doit suivre de près les demandes de liquidation.

Décidé en 2007, le nouveau régime de retraite en vigueur à la SNCF a supprimé la mise à la retraite d’office à 55 ans (50 ans pour les agents de conduite), le seuil demeurant valable pour l’ouverture des droits. Dès sa mise en œuvre en 2008, beaucoup ont saisi cette possibilité de jouer les prolongations. D’autant qu’à la suppression de la “clause couperet” ont été associées différentes mesures visant à accompagner financièrement les agents dans leur poursuite de carrière. Parmi celles-ci, la création d’un dixième échelon d’ancienneté et une majoration salariale spécifique. Le tout sans décote jusqu’en juillet 2010.

Moins de départs, moins d’embauches

Confortés dans leur choix par un outil en ligne de simulation de pension, 2 000 cheminots sur les 6 000 nouveaux retraités attendus ont, sur la seule année 2009, décidé de différer leur départ. Un effet d’aubaine pour des quinquagénaires ayant à faire face à de nouvelles dépenses liées, par exemple, aux études tardives de leurs enfants. Et un plan de recrutement à revoir pour la SNCF, par ailleurs confrontée à la nécessité de redéployer des effectifs internes dans un contexte difficile. En 2009, l’entreprise n’aura finalement réalisé que 2 700 embauches, contre 5 200 en 2008.

En 2010, pourtant, davantage de quinquas ont choisi “la quille”. L’entreprise, qui avait prévu 4 300 départs en retraite, en a enregistré 800 de plus. Ce qui l’a amenée, cette fois, à accroître son volume d’embauches. « Nous étions partis sur 2 300 recrutements. Nous allons monter à 3 200, soit 900 de mieux », indique François Nogué, le DRH. « Nous nous attendions à cette inversion de courbe, commente-t-il. Tous ceux qui ont atteint leurs objectifs en termes de majoration de pension finissent par partir. Et nous avons nettement perçu, en mai et juin derniers, l’effet psychologique de la nouvelle réforme des régimes de retraite. Dans l’incertitude des éventuelles répercussions sur les régimes spéciaux, beaucoup ont décidé de nous quitter. »

L’explication ne convainc guère Alain Cambi, secrétaire fédéral de SUD Rail : « La direction a volontairement sous-évalué ses projections afin de pouvoir annoncer des recrutements supplémentaires qui compensent tout juste les départs », soutient-il. Le secrétaire général adjoint de l’Unsa Cheminots, Roger Dillenseger, admet pour sa part la possibilité d’un effet de « ras-le-bol » dû au cumul des réformes. Mais il pointe aussi « l’inquiétude liée aux réorganisations successives de l’entreprise, notamment du fret, qui incitent les cheminots à mettre en balance les contraintes financières et professionnelles ».

Des salariés plus actifs

Le pronostic pour 2011 ? « Nous devrions dépasser les 5 000 départs en retraite, avance François Nogué. Mais il y a toujours un facteur d’incertitude, d’autant que la nouvelle réforme ne s’appliquera aux cheminots qu’au terme de l’échéancier prévu pour leur régime, à partir de 2017. » Une chose est sûre : depuis 2008, la SNCF est bel et bien contrainte de piloter ses ressources humaines à vue, les cheminots étant simplement tenus de faire leur demande de liquidation six mois avant la date de départ choisie.

« Nous devons maintenant gérer des comportements individuels. Les gens ne sont plus passifs vis-à-vis de leur retraite mais élaborent une stratégie d’optimisation de leur départ », analyse le DRH, qui ne peut que constater l’accélération du vieillissement de la pyramide des âges. Et l’accroissement de la masse salariale !

Déficit de conducteurs

Autre inconvénient lié à la spécificité des métiers de l’entreprise : « Les départs sont annoncés six mois avant, mais il faut, par exemple, de neuf à douze mois pour former un conducteur. D’où un déficit de ressources dans certains services, accentué par le retard pris dans la réaffectation du personnel touché par la restructuration du fret », expose Roger Dillenseger. Et d’insister sur « l’effet insidieux » de la réforme du régime pour les salariés : « Avant juillet 2010, la prolongation de l’activité était “tout bénéfice” financièrement parlant. Désormais, les cheminots travailleront plus longtemps pour compenser la décote. » Laquelle s’annule à un âge pivot qui s’établira, à terme, à 58 ans et demi.

UNE PYRAMIDE DES ÂGES VIEILLISSANTE

• Sur les quelque 153 000 salariés de l’Epic SNCF, 27,7 % (près de 42 400) se situent dans la tranche d’âge des 49-54 ans. Entre 2006 et 2010, le nombre de cheminots âgés de 55 à 60 ans est passé de 1 400 à 8 000 personnes. Selon le DRH François Nogué, cette tranche d’âge devrait représenter 10 % de l’effectif (soit 15 000 personnes) en 2014.

• Du coup, l’âge moyen, qui est passé de 40,7 ans à 41,5 ans entre 2000 et 2009, devrait dépasser 44 ans d’ici à cinq ans.

• Actuellement, l’âge moyen de départ en retraite est de 55 ans et 6 mois (50 ans et 9 mois pour les conducteurs).

Auteur

  • H. T.