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Modeste premier bilan pour les accords et les plans d’actions

L’actualité | publié le : 29.06.2010 | GUILLAUME LE NAGARD, CELINE LACOURCELLE

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Modeste premier bilan pour les accords et les plans d’actions

Crédit photo GUILLAUME LE NAGARD, CELINE LACOURCELLE

Les ambitions inscrites dans les accords ou les plans d’actions pour l’emploi des seniors mis en place par les entreprises sous contrainte financière et de calendrier s’avèrent limitées, selon une enquête d’Inergie pour l’ANDRH, dont Entreprise & Carrières détaille les résultats exclusifs.

Les seniors sont les principales victimes de la forte hausse du chômage enregistrée en mai. Les chiffres annoncés par le ministère de l’Emploi le 24 juin suscitent de nouveaux doutes sur le sort des actifs âgés, au terme de la future réforme des retraites qui doit rallonger la vie professionnelle. Les entreprises de plus de 50 salariés ont été contraintes de négocier des accords ou de préparer des plans d’actions pour l’emploi des seniors, sous peine d’être pénalisés à hauteur de 1 % de leur masse salariale. Alors que le ministère du Travail en annonce 33000, les premières analyses de leur contenu traduisent d’abord la prudence des employeurs, qu’il s’agisse d’une note de la DGT rédigée pour le COR sur quelques dizaines d’accords (lire p. 8), ou de l’enquête réalisée par Inergie auprès de 353 adhérents de l’ANDRH* et dont Entreprise & Carrières détaille les résultats exclusifs.

Engagements

44 % des entreprises disposent d’un accord, 36 % se contentant d’un plan d’actions. Quelques entreprises ne seraient pas en règle avec les ­exigences de la loi de financement de la Sécurité sociale (7 %) et d’autres sont couvertes par un accord de branche. Mais beaucoup ont donc abouti à une signature, s’entendant avec les représentants syndicaux sur la détermination de 3 domaines d’engagements au moins parmi les 6 précisés par décret, sur un objectif chiffré de maintien dans l’emploi ou de recrutement, et sur un certain nombre d’indicateurs de mesure.

« Dans les grandes entreprises, les directions et les DRH avaient souvent déjà commencé à discuter avec les partenaires sociaux, analyse Michel Yahiel, président de l’ANDRH. Chacun a bénéficié d’expériences et des diffusions de pratiques depuis le plan Larcher de 2006. Le sujet était ouvert dans les branches, dans les organisations professionnelles, à l’ANDRH. » Mais la mise sous contrainte financière et l’agenda de négociation imposés aux entreprises pouvaient faire craindre des accords a minima.

Maintien dans l’emploi

Selon l’enquête d’Inergie, trois quarts des entreprises se sont engagées sur un objectif de maintien dans l’emploi des salariés de plus de 55 ans (voir graphique ci-contre). Dans ce cas, 43 % seulement ont défini un objectif de maintien à 100 % de la proportion de ces salariés au sein de leur effectif ; 50 % se contenteront d’une population de seniors inférieure à son niveau actuel, dont 13 % ne s’engagent que sur un maintien à 60 %. Des ambitions d’autant plus modestes que, dans de nombreux cas, « l’objectif est quasi assuré au regard de la démographie des entreprises et, si l’on anticipe, de la réforme des retrai­tes », fait remarquer Sylvain Niel, avocat au cabinet Fidal et président du Cercle des DRH.

Recrutement

L’objectif de recrutement n’a été retenu que par 1 entreprise sur 5 (voir graphique). Dans 41 % des cas, il porte sur moins de 5 % d’embauches de seniors pour l’ensemble des recrutements. Néanmoins, un peu plus de la moitié des entreprises qui s’engagent sur les recrutements ont l’intention d’embaucher 5 % à 15 % de seniors. Sur l’ensemble de l’échantillon considéré (comprenant les entreprises qui n’ont pas pris d’engagement sur le recrutement), elles ne représentent que 10 %. « Rappelons que ces accords ou plans d’actions ont été élaborés en période de forte incertitude sur l’activité des entreprises, souligne Michel Yahiel. Il pouvait difficilement en être autrement. »

Parmi les domaines d’engagement, celui du “développement des compétences et des qualifications et de l’accès à la formation” a été le plus choisi (76 %), devant l’“anticipation de l’évolution des carrières professionnelles” (72 %). L’amélioration des conditions de travail et le traitement de la pénibilité, ainsi que le recrutement de salariés âgés arrivent bien plus loin (59 % et 33 %. Voir graphique ci-dessus).

Les outils mis en œuvre sont peu originaux : le bilan de seconde partie de carrière à 45 ? ans – issu de l’ANI de 2003 sur la formation et repris dans le plan Larcher de 2006 – s’impose (68 % de l’ensemble des entreprises et 95 % de celles qui ont choisi le domaine d’action lié à l’anticipation des carrières). Le parrainage intéresse 54 % des entreprises engagées sur la transmission des savoirs. La préparation à la retraite est le dispositif le plus utilisé pour les entreprises engagées sur l’aménagement des fins de carrière (69 % et 46 % du total des entreprises).

Les possibilités de réduction du temps de travail séduisent aussi les signataires (53 % et 35 %), tout comme le cumul emploi-retraite (25 % et 17 %). « Utilisé dans la modalité permettant une liquidation des droits avec une reprise en CDD, ils intéressent indéniablement les employeurs en leur permettant de maîtriser la date de sortie de leur seniors », détaille Philippe Caré, de Mercer.

Défauts congénitaux

« Beaucoup d’entreprises ont repris les dispositifs internes déjà en place. Ainsi, la majorité s’est conformée à la nouvelle loi, mais sans un vrai travail d’approfondissement et de diagnostic en amont sur l’employabilité de leurs seniors », constate Sylvain Niel. Rien d’étonnant, pour Anne-Marie Guillemard, sociologue et professeure à l’université de Paris-Descartes, qui pointe les autres défauts congénitaux de cette politique de l’emploi imposée : « Une entreprise ne va pas, sur un laps de temps si court, se lancer, par exemple, dans la révision de ses rémunérations pour lisser les carrières et réduire le coût des seniors comparativement aux juniors, alors que ce coût représente un frein à leur maintien en emploi. Je suis convaincue qu’une obligation de négociation assortie d’une telle sanction financière sans mécanismes d’incitation préalables n’était pas une bonne idée. D’autant plus quand on exige des entreprises qu’elles travaillent sur les seniors, alors qu’il faudrait aborder la gestion de tous les âges. »

En attendant, parmi les entreprises de l’échantillon qui ont dû réduire leurs effectifs depuis douze mois, 60 % seulement affirment n’avoir mis en œuvre aucune mesure d’âge particulière. Si le consensus avec les partenaires sociaux semble avoir été trouvé rapidement sur les accords, les dispositifs permettant des départs ciblés de seniors restent eux aussi largement utilisés.

* 353 DRH et RRH, interrogés du 22 avril au 7 mai 2010.

Auteur

  • GUILLAUME LE NAGARD, CELINE LACOURCELLE

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