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« Soutenir le tissu local facilite sa propre gestion de l’emploi »

Enquête | L’entretien avec | publié le : 11.05.2010 | RECUEILLIS PAR E. S.

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« Soutenir le tissu local facilite sa propre gestion de l’emploi »

Crédit photo RECUEILLIS PAR E. S.

E & C : Vous avez étudié les politiques d’appui à l’emploi local menées par quel-ques grands groupes, parfois dès le tournant des années 1980, comme Saint-Gobain, Lafarge ou l’ex-Rhône-Poulenc. Quelles raisons les ont incités à engager ces actions ?

M. R. : A ce moment-là, pour faire face à de lourdes restructurations qui laissaient les territoires sinistrés, et dès lors que les mesures de mutation géographique ou de préretraite s’avéraient insuffisantes, ces groupes ont cherché comment favoriser la reconversion des sites et le reclassement sur place des salariés. Ils se sont alors lancés dans des actions de revitalisation, afin de soutenir localement l’activité économique et l’emploi. Si des préoccupations de maintien de l’emploi ou d’aménagement du territoire pouvaient animer les entreprises publiques, tous ces groupes avaient un intérêt stratégique à le faire : au moment où l’on annonce des licenciements collectifs, ce type d’initiatives permet de contenir les conflits sociaux et d’éviter les tensions avec les acteurs politiques locaux, en particulier s’il faut négocier la fermeture d’un site polluant.

E & C : Ces dispositifs de soutien au développement local ont perduré dans le temps, y compris après ces restructurations. Pourquoi ces groupes, mondialisés, ont-ils continué à s’impliquer localement ?

M. R. : Ces politiques à chaud ont en effet été pérennisées et ont, du coup, servi à accompagner à froid les transformations des entreprises. Car, même quand ils ne sont pas en période de restructuration, les groupes sont en reconfiguration permanente. Ils créent un atelier dans un établissement, en ferment dans un autre, réorganisent ailleurs… sans forcément quitter le territoire.

Quand on connaît sans arrêt des mouvements de compression et d’expansion, on a intérêt à ce que le bassin d’emploi dans lequel on s’insère reste dynamique. Que ce soit pour reconvertir la main-d’œuvre en trop, ou bien pour répondre aux besoins de recrutement de profils spécifiques. Car si l’on ne trouve pas les compétences localement il faut, d’une part, pouvoir les créer par le montage de formations, et d’autre part, que le territoire soit attractif, notamment en termes d’infrastructures. Dès lors, pour profiter dans la durée du renouvellement des ressources locales, il faut y participer. Au fil du temps, pour ces groupes, les dispositifs de soutien au développement local ont fini par servir à gérer non plus des situations de crise, mais leur flexibilité de l’emploi.

E & C : De quelle façon ?

M. R. : D’abord, on reclasse plus facilement dans des PME à qui l’on a donné un coup de pouce, et qui peuvent embaucher en priorité les anciens salariés du groupe. De même, pour encourager les salariés à créer leur propre entreprise, il est utile d’entretenir de bonnes relations avec les acteurs locaux (CCI, chambres des métiers, etc.).

Enfin, en participant régulièrement à des initiatives avec les institutions locales, par exemple à des forums pour l’insertion des jeunes, ou à la création d’une pépinière d’entreprises, les groupes ont connaissance des projets en cours et savent vers quels interlocuteurs se tourner au moment où ils ont une problématique d’emploi ou de qualification à résoudre. Ce sont des relations souvent informelles, mais qui permettent d’entretenir un réseau de proximité, essentiel pour conforter l’ancrage territorial des entreprises.

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