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Que deviennent les députés "sociaux" de la majorité sortante?

Social | publié le : 20.06.2022 | Benjamin d'Alguerre

Ils ont été les figures de proue de la majorité sortante à l’Assemblée Nationale sur les dossiers sociaux pendant le précédent quinquennat, qu’il s’agisse d’emploi, d’apprentissage, de formation professionnelle, de santé au travail, de droits sociaux des travailleurs des plateformes ou de retraites. Certains ont conservé leur siège, d’autres ont été battus dimanche dernier. Tour d’horizon.

Carole Grandjean

Circonscription : 1re de Meurthe-et-Moselle

Les Nancéiens viennent d’accorder à Carole Grandjean un second mandat en lui permettant de battre, dimanche dernier, son concurrent de la Nupes, Nordine Jouira. L’occasion, pour cette ancienne cadre RH du groupe Elior de poursuivre un travail parlementaire assidu qui avait débuté dès 2017 par son activité de rapporteuse du titre 3 de la loi "pour la liberté de choisir son avenir professionnel" – celui consacré aux entreprises inclusives, à l’insertion du handicap dans l’emploi, au détachement des travailleurs ou aux moyens de l’Inspection du travail pour lutter contre le travail illégal – et poursuivi par la rédaction de trois rapports successifs. Un premier consacré au sujet très clivant des fraudes aux prestations sociales, le deuxième sur la constitution d’un socle européen des droits sociaux qui prévoyait en particulier la création d’une Agence européenne du travail, une forme d’Inspection du travail à l’échelle de l’UE qui a commencé ses activités en 2019, et l’introduction d’un congé parental de 4 mois, et le troisième (en collaboration avec la députée LFI Danièle Obono) sur la protection sociale des travailleurs des plateformes, dont les conclusions en matière de dialogue social des travailleurs des plateformes ont en partie été reprises pour mettre en place l’Autorité de régulation des plateformes d’emploi (Arpe) qui vient de chapeauter les premières élections professionnelles des livreurs et chauffeurs VTC.

Sylvain Maillard

Circonscription : 1re de Paris

Lui aussi a gagné son ticket pour un retour sur les bancs de l’Assemblée. Le député de la première circonscription de Paris, venu de l’UDI a remporté son duel face à Thomas Luquet de la Nupes. Élu en 2017, ce chef d’entreprise se qualifiant de "centre-droit" avait été l’un des premiers parmi les nouveaux arrivés au Palais-Bourbon à s’impliquer sur les questions d’assurance-chômage en vertu de quoi il s’était vu confier la mission de rapporteur du premier volet de la réforme "pour la liberté de choisir son avenir professionnel" portée par Muriel Pénicaud. Lors de l’évaluation de cette loi, réalisée en 2022, il réclamait une réécriture des dispositifs relatifs à l’indemnisation des démissionnaires et des travailleurs indépendants qui n’ont pas trouvé leur public.

Cendra Motin

Circonscription : 6e de l’Isère

Le fait d’avoir été cinq ans durant l’une des députées les plus assidues à l’Assemblée nationale n’a pas sauvé le siège de Cendra Motin, ex-LREM passée chez Horizons, battue dimanche dernier par Alexis Jolly, du Rassemblement national. Ancienne vice-présidente de la commission des finances de l’Assemblée, c’est en remplaçant au pied levé Olivier Véran, devenu ministre de la Santé après le départ d’Agnès Buzyn en février 2020, comme rapporteuse sur le projet de réforme des retraites, que Cendra Motin a mis un pied dans les affaires sociales, elle qui s’était surtout spécialisée dans les sujets liés au prélèvement à la source. En avril 2020, cette dirigeante d’un cabinet RH avait provoqué un tollé chez les syndicats en proposant un amendement au projet de loi portant sur diverses dispositions d’urgence pour faire face aux conséquences de l’épidémie de Covid-19 autorisant les entreprises à verser les reliquats des frais de fonctionnement des CSE sous forme de primes aux salariés.

Catherine Fabre

Circonscription : 2e de la Gironde

L’une des rares spécialistes de la formation professionnelle que comptait le groupe LREM à l’Assemblée nationale ne rempilera pas non plus pour cette nouvelle mandature. Avec 46,6 % des suffrages au second tour des élections législatives, Catherine Fabre perd son mandat au profit du candidat Nupes Nicolas Thierry. Ancienne journaliste économique et enseignante en gestion des ressources humaines au sein de l’Institut d’administration des entreprises (IAE) de l’Université de Bordeaux (Bastide), la bordelaise s’était fait connaître en devenant rapporteuse du volet consacré à la formation professionnelle et à l’apprentissage de la réforme "pour la liberté de choisir son avenir professionnel" de 2018 . Quatre ans plus tard, "en pure volumétrie, la réforme de 2018 a permis une augmentation significative du nombre d’apprentis – le seuil des 700 000 vient d’être dépassé – alors que leur nombre ne décollait pas depuis presque cinquante ans. Sur le plan culturel, la bataille semble aussi être en train de se gagner : le regard sur l’apprentissage change énormément. L’alternance est de plus en plus perçue comme une formation d’excellence associée à un excellent taux d’insertion sur le plan professionnel. À niveau égal, un diplôme obtenu par l’alternance insère mieux dans l’emploi et permet d’accéder à un meilleur salaire dès l’entrée dans le monde du travail", expliquait-elle à Liaisons Sociales Magazine en février dernier.

Charlotte Parmentier-Lecocq

Circonscription : 6e du Nord

L’auteure de la loi sur la santé au travail de février 2021 qui porte son nom a gagné son billet de retour pour le Palais-Bourbon en battant dimanche sa concurrente de la Nupes Célia Pereira. Quasi-inconnue avant son élection en 2017, cette consultante RH spécialisée dans les petites structures (PME, TPE, association) s’est fait remarquer en publiant coup sur coup deux rapports parlementaires sur la santé au travail. Le premier en collaboration avec le consultant Bruno Dupuis et l’ancien secrétaire confédéral de la CFDT Henri Forest recommandait la création d’une agence unique "France Santé Travail" regroupant Anact, INRS et OPPBTP financée par une cotisation unique des entreprises. Une proposition qui a suscité des levées de boucliers à la fois du côté des syndicats, redoutant une étatisation du système, et du patronat, refusant l’idée d’une charge supplémentaire sur les entreprises. Le second, coécrit avec Pascale Coton, ancienne numéro 2 de la CFTC, et Jean-François Verdier, ancien directeur de l’administration et de la fonction publique, proposait pour sa part la mise en place d’un grand plan "santé au travail" pour la fonction publique et d’une mutualisation des moyens public-privé. Mais c’est surtout sa loi du 17 février 2021, adoptée au lendemain de la signature de l’ANI "santé au travail" des partenaires sociaux fin 2020 qui a marqué les relations sociales en basculant les politiques de santé, de la réparation à la prévention, et instaure notamment une forme de décloisonnement entre santé au travail et santé publique.

Laurent Pietraszewski

Circonscription : 11e du Nord

L’ancien secrétaire d’État aux Retraites et à la Santé au travail ne fera pas son retour au Palais-Bourbon, battu sur ses terres de Lomme et d’Armentières, dans le Pas-de-Calais, par son concurrent de la Nupes, Roger Vicot. Soutien d’Emmanuel Macron de la première heure, adhérent à La République en marche dès 2016, cet ancien DRH d’Auchan s’était imposé comme un poids lourd des dossiers sociaux dès sa première élection à l’Assemblée nationale en 2017 en devenant notamment rapporteur du projet de loi autorisant le Gouvernement à réformer le Code du travail par ordonnances. Un texte auquel il avait imposé sa patte par amendements, concernant notamment l’encadrement de la rupture conventionnelle collective, la désignation de délégués du personnel dans les entreprises par les syndicats n’ayant pas obtenu 10 % des voix aux élections professionnelles ou la révision des critères de pénibilité au travail. Avoir contribué à en retirer quatre de la liste des dix établis pendant le quinquennat de François Hollande (postures pénibles, exposition aux agents chimiques dangereux ou aux vibrations mécaniques et manutention manuelle de charges) lui avait valu de sérieuses critiques de la part de la gauche. Actif sur la réforme de l’assurance-chômage puis sur celle des retraites, il se retrouve en charge d’animer le réseau d’"ambassadeurs" missionnés pour défendre le projet de réforme alors porté par Jean-Paul Delvoye, Haut-commissaire aux Retraites, auprès des électeurs et des médias. Ce dernier évacué après la révélation de ses multiples mandats non déclarés, c’est naturellement Laurent Pietraszewski qui lui succède pour reprendre le dossier des retraites, mais cette fois avec la fonction de secrétaire d’État et la mission supplémentaire d’élaborer les protocoles sanitaires contre la pandémie de Covid-19 dans les entreprises sous la double responsabilité des ministères du Travail et de la Santé. Après le départ de Muriel Pénicaud du ministère du Travail et son remplacement par Élisabeth Borne, son secrétariat d’État aux Retraites – le projet de réforme a entre-temps été enterré par la pandémie – se voit étendu aux questions de Santé au travail.

Auteur

  • Benjamin d'Alguerre