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Grogne sociale et craintes pour l'emploi chez Atos France

Liaisons Sociales Magazine | Dialogue Social | publié le : 04.06.2015 | Anne Fairise

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Les syndicats du groupe informatique ont programmé une nouvelle journée de grève, le 23 juin. La direction se serait, elle, réunie en début de semaine pour étudier la mise en œuvre d’un plan social.

« La journée du  19 mai ne sera pas sans lendemain ». Les sept syndicats d’Atos France (17200 salariés) n’entendent pas relâcher la pression après la mobilisation « réussie » de la mi-mai. Une journée symbolique, organisée presque un an, jour pour jour, après l’absorption de l’ex-icône Bull par le groupe de Thierry Breton.Selon le décompte des organisations syndicales CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, SUD et Unsa, quelque 2000 salariés ont débrayé sur la vingtaine de sites hexagonaux, dont 200 devant le siège de l’entreprise, à Bezons (Val d’Oise). 

Une « première »Et un signe du malaise qui règne dans l’entreprise de services du numérique, engagée dans une très difficile renégociation de ses accords sociaux. Les discussions sur le temps de travail sont particulièrement tendues. Atos France, qui souhaite harmoniser les statuts et les pratiques, veut réduire à 9 le nombre de jours de RTT. Ce qui signifie une perte de 2 à 5 jours RTT selon les sociétés. Elle se refuse, en outre, à étendre à toutes les sociétés d’Atos France la pratique de paiement des jours de fractionnement en cours chez Bull. En matière de garanties santé et prévoyance, elle propose de réduire la part du financement patronal. 

Afflux de ruptures conventionnelles

Autant de propositions qualifiées de « régression sociale » par l’intersyndicale, née début avril du regroupement de tous les syndicats, représentatifs ou non. Celle-ci a d’autres motifs de mécontentement, à commencer par le gel des salaires en 2015, annoncé suite à la suspension des négociations en mars. Inacceptable à ses yeux alors que « les actionnaires ont reçu des dividendes en hausse de 14% au titre des résultats 2014 et qu’une nouvelle augmentation de 10% par action est prévue dans les deux prochaines années ». 

Autre sujet d’inquiétudes : le volume des « ruptures conventionnelles imposées ». Fin 2014, l’inspection du travail est intervenue auprès de la direction pour lui rappeler que « la rupture conventionnelle ne peut être utilisée comme un moyen de contourner les règles du licenciement économique collectif ». 

Dans le collimateur, Atos Intégration et Atos Infogérance. Le seuil maximum toléré par l’administration (dix ruptures par mois) y a été largement dépassé en 2013 et 2014. « Un moyen de gérer les doublons entre les équipes d’Atos et de Bull. Les commerciaux ont été les premiers touchés. Ils se voyaient proposer deux ans de salaire pour partir », précise un salarié.

« Nouvelle dynamique »

Sur tous ces sujets, les syndicats disent n’avoir obtenu « aucune réponse précise ». Ils ont pourtant rencontré les 26 et 27 mai le DRH monde Philippe Mareine (autre première), en présence de Jean-Marie Simon, le directeur général d’Atos France et ex-DRH groupe. Celui-ci tente depuis plusieurs semaines d’apaiser les tensions. Début avril, il a initié un cycle de rencontres bimensuelles avec les syndicats représentatifs pour lancer « une nouvelle dynamique de dialogue social ». 

« Leur seule réponse a été de nous renvoyer aux négociations programmées. On a vite vu le résultat. Lors de la reprise des discussions sur le temps de travail, le 28 mai, la direction est revenue avec la même proposition de réduire le nombre de jours RTT », déplore Didier Deplancke, DSC CFDT, premier syndicat d’Atos France.

Prochaine grève le 23 juin

L’intersyndicale fait donc monter la pression. Elle appelle, dans un tract distribué ce 4 juin, à des assemblées générales sur tous les sites « dans la semaine du 15 au 19 juin ». Et annonce d’ores et déjà « une nouvelle grande journée d’action et de grève nationale » le 23 juin, « si la direction ne fait pas d’avancée suffisante ». 

Seule concession annoncée la semaine dernière par Jean-Marie Simon, la réouverture des négociations annuelles obligatoires, entreprise par entreprise. Atos Infogérance devrait ouvrir le bal dès le 8 juin. « C’est une première petite avancée concrète. Mais nous attendons de connaître le montant et la forme de distribution qui seront proposés par la direction », précise Olivier Debroise, coordinateur CFE-CGC groupe. 

D’ores et déjà, les syndicats craignent qu’il y ait peu de grain à moudre. Le chiffre d’affaires d’Atos France au premier trimestre 2015 est pratiquement inchangé, à 403 millions d’euros (-0,3%). « Mais les résultats annoncés sont très en deçà des objectifs fixés », pointe Didier Deplancke, de la CFDT, qui émet des « réserves sur les comptes présentés ». « Beaucoup de provisions nous semblent exagérées et le calcul de la quote-part reversée par les sociétés au groupe est nébuleux », précise-t-il. Chez Bull, le comité central d’entreprise a demandé une expertise sur les comptes. 

D'après les rumeurs internes, les résultats du second trimestre 2015, qui seront annoncés en juillet, ne seront toujours pas à la hauteur des objectifs fixés. Au point de pousser Thierry Breton à prendre des mesures ? Selon nos informations, une réunion sur la mise en œuvre d’un plan social s'est tenue en début de semaine, mardi 2 juin, au siège d’Atos France à Bezons. Et Jean-Marie Simon, l’actuel directeur général France, devrait être remplacé. Ce que l'entreprise dément formellement. "Aucun projet de plan social n'est prévu en France et la rumeur sur un possible départ de Jean-Marie Simon est infondée", déclare la direction.

Il y a un an, lors du rapprochement d’Atos France et de Bull, les deux groupes avaient garanti que celui-ci ne serait pas suivi d’un plan social et que l’ajustement des effectifs se ferait naturellement, par le non-remplacement des départs. 

Auteur

  • Anne Fairise