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La CFDT dévoile un contre-projet ambitieux

Liaisons Sociales Magazine | Protection Sociale | publié le : 23.09.2015 | Anne Fairise

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La centrale réformiste passe à l'offensive dans la perspective de la reprise des négociations, le 16 octobre. Elle prône notamment une fusion des caisses Agirc et Arrco et une hausse modérée des cotisations patronales.

« Le patronat doit démontrer qu’il veut négocier et pas simplement imposer ses vues ». À moins d’un mois de la reprise des négociations sur l’avenir des régimes de retraite complémentaire Agirc (cadres) et Arrco (tous les salariés), Laurent Berger appelle la délégation patronale à la raison. Et le secrétaire général de la CFDT qualifie déjà la réunion du 16 octobre d’« épreuve de vérité pour le dialogue social ». Les négociations sont suspendues depuis fin juin.

Pointées, l’attitude des employeurs qui « joue la montre pour mettre les syndicats au bord du précipice et les obliger à signer » et le dévoiement des discussions. « Une négociation sur les retraites complémentaires ne doit pas conduire à revoir les règles de la retraite de base. On ne peut pas lui faire jouer un rôle qui n’est pas le sien », a expliqué Laurent Berger, mercredi 23 septembre, lors de sa conférence de rentrée. Pour lui, les mesures drastiques proposées par la délégation patronale, telles les décotes temporaires et dégressives entre 62 et 65 ans, « visent à pousser les salariés à prolonger leur carrière et donc à reculer l’âge de la retraite ».

Conclure avant décembre

Inacceptable pour la CFDT, qui refuse par ailleurs tout système d’abattement. Pour sortir de l’impasse, le syndicat revient avec une contre-proposition qui « préserve l’équilibre financier et renouvelle le pacte intergénérationnel des retraites par répartition ». Une voie d’entrée, espère-t-elle, « pour relancer les négociations » et les conclure avant fin décembre.

À court terme, la CFDT  se dit prête à des mesures temporaires d’économies, pour stopper l’aggravation du déficit technique. Elle met en discussion un décalage de la date de revalorisation annuelle des pensions complémentaires (d’avril à octobre), qui entraînera un gel pendant six mois. Elle propose aussi de baisser le taux de rendement du point de retraite, « en restant au-dessus de 6% » et de poursuivre, « pendant trois ans », la sous-indexation des pensions complémentaires, en les revalorisant de 1 point de moins que l’inflation (le patronat réclame 1,5 point de moins).

Un seul régime de retraite complémentaire dans le Privé

Mais le cœur de sa proposition est l’instauration, sur 2019-2024, d’un régime unifié de retraites complémentaires pour tous les salariés, par la fusion de l’Agirc et de l’Arrco. Elle interviendrait après une mutualisation, dès 2017, des réserves de deux régimes afin d’assurer le paiement des pensions. Cette simplification ne serait pas sans impact sur le statut cadre, aujourd’hui lié à l’affiliation à l’Agirc et non aux missions ou aux compétences des intéressés. Les branches devraient alors ouvrir des négociations sur le sujet.

Pour financer ce régime unifié, la centrale de Belleville propose un partage des efforts entre employeurs, salariés et retraités. Les entreprises verraient leurs cotisations augmenter, de façon « raisonnable », de 0,1% par an pendant trois exercices, de 2019 à 2021. Tout nouveau retraité (hormis les plus modestes) verserait, lui, une nouvelle « contribution de solidarité intergénérationnelle », à hauteur de 4% de sa retraite complémentaire, sur une durée limitée à deux ans. Une période qui correspond « à la différence entre l’âge effectif de départ et l’âge d’équilibre du régime de retraite ».

Autre source de financement : une taxation des employeurs se séparant (par licenciement ou rupture conventionnelle) des plus de 50 ans. « Les entreprises font un usage abusif des ruptures conventionnelles avec leurs salariés seniors », rappelle Jean-Louis Malys, secrétaire national chargé des retraites. Montant estimé des recettes ? Plus d’un milliard d’euros en 2020.

Autre économie possible, selon la CFDT, la mise sous condition de ressources des pensions de réversion des retraites complémentaires versées au conjoint survivant. Gain estimé : 0,3 milliard d’euros dès 2020.

Trouver une solution durable

Selon les calculs testés par les services de l’Agirc et de l’Arrco, cette refonte permettrait de retrouver un équilibre budgétaire autour de 2020, et même de dégager un excédent en 2030 (+700 millions d'euros). Une perspective à laquelle le Medef ne peut être insensible. Le 15 septembre, son président, Pierre Gattaz, affirmait que le patronat ne signerait un accord assurant la pérennité des régimes que « si une solution durable » était trouvée. Il y a urgence. L’Agirc a vu son déficit se creuser à 1,985 milliard et l’Arrco à 1,153 milliard en 2014. Si rien n’est fait, leurs réserves seront épuisées d’ici à 2018 pour l’Agirc, et d'ici à 2027 pour l’Arrco.

Reste que la contre-proposition cédétiste intègre beaucoup de pilules difficiles à avaler pour les employeurs. Notamment la hausse des cotisations à laquelle seule l'UIMM (industrie), à la recherche d'un compromis, semble se résoudre. Autre point dur, les décotes. « Plus que les cotisations, c’est le principal point de blocage », lâche-t-on à la centrale de Belleville. Réponse le 16 octobre.  

Auteur

  • Anne Fairise