Un dossier sur » la prochaine Amérique « constitue le plat de résistance de la revue. Écrite avant la crise financière, l’analyse de la confrontation Obama/McCain amène Mathieu Laine à prévoir l’avènement d’un pouvoir » atomisé, multipolaire, en compétition « . Après l’État providence, prédisait l’auteur, c’est la politique elle-même qui risque de perdre une grande part de son prestige et de son influence. Annick Steta se penche sur les enjeux économiques de l’élection, mettant en évidence » l’angoisse des classes moyennes « et disséquant les propositions des candidats, parmi lesquelles un système de couverture maladie universelle, comme le sénateur démocrate souhaite en implanter une dans son pays.

Thème à la mode, la responsabilité sociale des entreprises revient de plus en plus dans les discours entrepreneuriaux, mais les syndicats restent discrets sur le sujet. Bien que, comme l’a montré le passage de l’ancienne secrétaire générale de la CFDT, Nicole Notat, à Vigeo, la rivière RSE rejoigne manifestement le fleuve syndical. Les experts de l’Ires s’interrogent sur la compatibilité de la RSE avec le droit du travail européen. À ne pas manquer, l’article d’Élise Penalva Icher, qui analyse les stratégies de légitimation sur le terrain de l’investissement socialement responsable, à la disposition du syndicalisme.

Un sujet de société particulièrement » lourd « figure au menu de la revue Études : celui de » la condition postmortelle « , pour reprendre le titre de l’auteur, Céline Lafontaine. Celle-ci définit cette expression un peu étrange comme étant le fait d’une société » où le vieillissement est vécu comme une maladie « et où » la volonté de prolonger indéfiniment la vie ici-bas se substitue au désir d’atteindre l’immortalité dans l’au-delà « . Le progrès technique dans la santé rend les limites de la mort de plus en plus » malléables « , troublant le débat sur l’euthanasie. Un sujet qui va s’imposer dans les grands débats de politique sociale, tels que les politiques de santé ou les systèmes de retraite.

Menace sur la citoyenneté sociale : c’est le sociologue Robert Castel qui lance ce cri d’alarme. À ses yeux, les mutations du capitalisme sont en train de remettre en cause le laborieux compromis social construit en France depuis la seconde moitié du XIX^e siècle. La citoyenneté sociale, que Castel caractérise par « le fait de pouvoir disposer d’un minimum de ressources et de droits indispensables pour s’assurer une indépendance sociale », subit un double choc : celui du chômage massif et celui de la précarité. L’auteur craint qu’une telle situation ne conduise à une délégitimation de la citoyenneté politique. Bref, ce sont les fondements de notre démocratie que ces évolutions mettent en fin de compte en jeu.