logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Dossier

La formation en ligne décolle

Dossier | publié le : 01.02.2008 | Anne-Cécile Geoffroy, Sabine Germain

Une offre d’e-learning plus en phase avec les besoins, des attentes moins ambitieuses à son égard : les entreprises se sont peu à peu rodées aux nouveaux outils. Elles les intègrent dans leur stratégie de formation en parallèle de méthodes plus classiques.

Paris ne serait plus seulement la capitale de la mode… elle serait aussi celle de l’e-learning ! « C’est en France que les grandes tendances émergent, assure Sally-Ann Moore, fondatrice du salon ILearning Forum Paris, qui se déroule les 4 et 5 février au palais des Congrès. En 2003 et 2004, le marché était déprimé. Aujourd’hui, on sent une vraie renaissance. La maturité des entreprises vis-à-vis des technologies a beaucoup évolué », continue la responsable du salon professionnel. « Après une ère de glaciation et de défiance, nous vivons une nouvelle étape, convient de son côté Pascal Debordes, directeur du pôle conseil et formation en grands déploiements de la Cegos. Notre activité e-learning est en augmentation de 30 %. On prévoit une croissance de 50 % de notre business sur ce champ à l’avenir. » Dans la deuxième édition de son enquête sur les modalités de formation dans les grandes entreprises, publiée en juin dernier, l’organisme de formation révèle que 37 % des salariés interrogés ont bénéficié d’une formation en ligne. Un taux en progression de 5 points sur un an. Ce regain se joue principalement dans les structures de plus de 1 000 salariés.

Moins techno, plus pédago. Si les réticences des entreprises tombent les unes après les autres, c’est que les acteurs du marché ont fait évoluer leur offre technologique et pédagogique pour coller au mieux aux attentes de leurs clients. « Il y a encore quelques années, les fournisseurs de solutions technologiques négligeaient complètement les aspects pédagogiques, raconte Guillaume Coppin, responsable des activités de formation chez Arinso France, société spécialisée dans la mise en place de systèmes d’information pour les ressources humaines. Des plates-formes pédagogiques, comme Saba, sont très poussées sur le plan technologique, mais les pédagogues ont beaucoup de mal à se les approprier. » De nouveaux produits sont aujourd’hui disponibles, tels Elearning Manager, développé par la société E-Doceo ; WBT Manager, d’X-Per Team, ou encore Ganesha, une plate-forme libre d’accès. Pour rassurer les entreprises, les fournisseurs de solutions ont également cherché à rendre leurs outils compatibles avec les contenus standards disponibles sur le marché. « Le développement des normes AICC, Scorm ou encore QTI a participé à lever les réticences. Elles permettent à n’importe quel contenu de s’adapter aux solutions technologiques choisies par les entreprises et d’évaluer les temps de formation des salariés », précise Arnaud de Corgnol, directeur d’X-Per Team, un prestataire global d’e-formation.

Les entreprises et les prestataires ont également modéré leurs attentes vis-à-vis des solutions d’e-learning. Alors que, au début de la vague, nombre de spécialistes annonçaient la mort pure et simple des formations traditionnelles, l’expérience montre qu’il n’en est rien. « Les entreprises ont compris récemment qu’il fallait mixer les méthodes pédagogiques, souligne Marc de Quercize, directeur d’IProgress, filiale de Bernard Julhiet Group. C’est flagrant lorsqu’on étudie les appels d’offres. Nous proposons donc une offre multimodale qui allie une formation traditionnelle sous forme d’ateliers à de l’e-learning, des séquences vidéo ou encore des livres directement téléchargeables sur notre portail. » Chez HSBC, l’e-learning fait dorénavant partie de l’offre de formation que l’entreprise propose aux salariés. « On se pose désormais systématiquement la question de savoir s’il est utile d’articuler les formations en salle avec celles en ligne », explique Hervé d’Harcourt, directeur de la formation.

D’égal à égal. En sept ans de pratique, les entreprises ont également fait leur apprentissage. Elles sont désormais capables de parler d’égal à égal avec les prestataires. Elles cherchent aussi à garder la main sur la création de contenu. « Quand on se lance dans l’e-learning, il y a quatre règles à respecter, note Pierre Prével, responsable de la coordination e-learning à Crédit agricole SA. La première est de s’entourer d’un bon réseau de prestataires maîtrisant la pédagogie, la deuxième de s’équiper d’un LCMS (learning content management system), qui permet de créer du contenu et de le maintenir. La troisième règle est de disposer d’une bonne plate-forme de formation (LMS : learning management system). La quatrième, d’organiser des groupes de projets avec des experts des métiers, des formateurs et des apprenants qui valideront les modules réalisés, ce qui garantit de couvrir les besoins du terrain. » Le loueur de matériel de bricolage et de chantier Kiloutou s’est affranchi petit à petit de ses prestataires. « Au début nous avons fait développer nos modules de formation à l’extérieur. Désormais, nous sommes capables de le faire nous-mêmes », précise Sébastien Quéva, chef de projet formation chez Kiloutou. La plate-forme de l’entreprise, lancée en 2003, abrite déjà 50 modules de formation organisés par filières de métiers. Chez Aldes, une PME lyonnaise de 500 salariés spécialisée dans la ventilation et la climatisation, les modules de formation sont développés par des formateurs internes. « Il n’est pas question de confier nos savoir-faire à des prestataires extérieurs, même si cet effort de formalisation des savoirs n’est pas facile à mettre en œuvre pour notre société », explique José Felix, DRH d’Aldes.

Des projets d’envergure. Les entreprises ont surtout intégré l’e-learning dans leur stratégie de formation pour déployer à grande échelle des projets stratégiques lourds. HSBC France a ainsi renforcé sa politique de formation en ligne à l’occasion de l’installation d’un nouveau système d’information baptisé HUB : « 6 000 collaborateurs ont été formés en treize semaines, pendant lesquelles nous alternions formation en salle et modules d’e-learning pour leur faire prendre en main les fonctionnalités du nouveau système », précise Guillaume Duguet, responsable de l’e-learning. Chez Airbus, c’est un projet identique, Business Focus RH, qui a favorisé l’utilisation de l’e-learning. Le constructeur aéronautique, présent dans quatre pays européens, a ainsi formé ses 55 000 salariés aux nouveaux process RH comme la gestion de la performance ou encore la gestion des compétences. « Toute la difficulté était de mettre rapidement en place des solutions adaptables à toutes les cultures présentes dans le groupe. Pour chaque process RH revisité, les modules d’e-learning ont été développés en quatre mois », indique Suzie Lewis, responsable de la conduite du changement pour ce projet.

Des délais difficiles à tenir avec les formations classiques en salle. « Les formations en ligne peuvent se comparer à du prêt-à-porter, assure Pierre Prével. Elles permettent de réaliser des projets en juste-à-temps, au rythme de chaque apprenant et en fonction de ses besoins. » La prochaine évolution de l’e-learning serait à chercher dans les outils qui se développent autour du Web 2, comme les Wiki, les systèmes de gestion de contenu ou les réseaux sociaux. « Il y a un vrai déficit d’information sur ces outils collaboratifs. J’ai encore du mal à voir ce que ces technologies vont pouvoir nous apporter, constate Pierre Prével, du Crédit agricole SA. Nous faisons des tests mais les taux d’utilisation sont souvent décevants. » Les prestataires d’e-learning seraient donc un poil en avance sur les besoins des entreprises. L’avenir le dira.

A.-C.G.

Auteur

  • Anne-Cécile Geoffroy, Sabine Germain