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DIF et contrat de pro font leur percée

Dossier | publié le : 01.09.2007 |

Si le succès des deux dispositifs phares de la réforme n’est pas encore manifeste, leur logique s’impose dans les pratiques des DRH. À commencer par l’individualisation des parcours et la codécision pour le DIF. De son côté, le contrat de professionnalisation est salué pour sa simplicité et sa capacité à favoriser une intégration rapide dans l’emploi.

LE DIF RENFORCE L’INDIVIDUALISATION DES PARCOURS

Si certains DRH dénoncent le droit individuel à la formation (DIF) comme une bombe à retardement, d’autres prennent les devants en incitant leurs troupes à écluser leur crédit annuel de vingt heures afin de limiter les risques d’explosion budgétaire. Véronique Gentet, DRH de l’éditeur de logiciels Viveo, appartient à la seconde catégorie. Dès 2005, la SSII de 330 salariés a exhorté ses managers à relayer, lors des entretiens annuels d’évaluation, le dispositif phare de l’accord de 2003 sur la formation. Pour aiguiser l’appétit de ses ingénieurs et cadres en grande majorité bardés de diplômes, Viveo a élaboré un catalogue de formations « diffables », principalement des stages relativement courts qui visent à renforcer les compétences des salariés, comme l’ont fait 28 % des entreprises, si l’on en croit la quatrième édition du baromètre annuel de la Cegos.

Une logique de codécision. Cœur de la réforme, le DIF, qui octroie à chaque salarié en poste depuis un an un crédit de vingt heures par an cumulable sur six ans, reflète la préoccupation des partenaires sociaux d’individualiser les parcours et de faire du salarié un acteur de sa destinée professionnelle. Susceptibles d’être réalisées hors temps de travail en contrepartie d’une allocation égale à 50 % de la rémunération nette, les formations relèvent de l’initiative du salarié, en accord avec son employeur. « La rencontre s’opère d’autant mieux que la hiérarchie intermédiaire a été préparée à la conduite d’entretiens », notait la DGEFP dès octobre 2006. « En théorie, le DIF doit permettre à chacun de construire son propre parcours de formation, observe Véronique Gentet. En pratique, les salariés n’ont pas le temps de réfléchir à leur évolution professionnelle. D’où la nécessité d’amorcer le mouvement en leur proposant des formations internes effectuées sur leur temps de travail. » Avec succès, puisque 66 salariés de Viveo ont fait valoir leur DIF en 2006, soit 30 % des heures de formation financées par l’entreprise.

Cahin-caha, une logique de codécision commence à s’instaurer, si l’on en croit la lente progression du DIF. Globalement, d’après la Cegos, 13 % des salariés projettent de faire valoir leur droit en 2007, contre 9 % en 2006. Selon le rapport annexé au projet de loi de finances pour 2007, 130 000 salariés ont déjà bénéficié d’une action de formation au titre du DIF en 2005. En janvier 2006, Agefos PME en finançait 27 000, contre 992 l’année précédente. De son côté, Opcalia (ex-Opcareg) revendiquait 12 000 DIF en 2006 et en attend quatre fois plus en 2007. « Chez nos adhérents, le DIF concerne plutôt des publics moins prioritaires dans les plans de formation, plus féminins, dans le secteur des services, et des salariés travaillant dans des PME », se réjouit Joël Ruiz, directeur général de l’Agefos PME.

De là à conclure que le DIF contribue en partie à réduire les inégalités d’accès à la formation, un des principaux objectifs de la réforme, semble hâtif, quatre ans après l’adoption de la loi. « Les ingénieurs et cadres qui connaissent le mieux les dispositifs se sont essentiellement emparés de ce nouveau droit », observe le responsable d’un Opca interprofessionnel. Si des progrès restent à faire pour informer les grands oubliés de la formation, de leur côté, les entreprises apprennent à articuler plan, DIF et périodes de professionnalisation. Et s’inquiètent à juste titre de l’attitude de 70 % des salariés qui se contentent de capitaliser leur droit (cent vingt heures sur six ans).

S. D.

LE CONTRAT DE PRO MONTE EN PUISSANCE

Objectif : 180 000 contrats de professionnalisation dès la première année ! C’est ce qu’annonçait François Fillon, alors ministre des Affaires sociales, du Travail et de la Solidarité, lors du vote de la réforme de l’alternance de 2004. Avec 145 400 contrats signés en 2006 (11 500 en 2005), deux ans et demi après leur naissance, on est loin du compte. Pour autant, les professionnels ne s’alarment pas de ce retard à l’allumage. « Mettre en place une telle réforme, c’est long. Souvenons-nous qu’il a fallu au moins cinq années pour lancer le contrat de qualification, il y a vingt ans », commente Jean-François de Zitter, vice-président de la Fédération de la formation professionnelle. Les chiffres de la Dares attestent la montée en puissance de ce contrat venu à lui seul remplacer le contrat de qualification, le contrat d’orientation et le contrat d’adaptation. « Personne ne se plaint que tout cela ait été simplifié, d’autant que les frontières entre les trois contrats précédents n’étaient pas toujours claires », assure Philippe Morvan, directeur de la formation chez Colas, une société de travaux publics qui a signé cette année 307 contrats de pro.

Dans le secteur du BTP, où tous les moyens sont bons pour faire face à la pénurie de personnel – 30 000 recrutements sont nécessaires chaque année –, on se réjouit de cet outil qui facilite une intégration rapide. En effet, la durée de la formation, établie à 15 % du temps de travail, et les contrats, en principe conçus pour être courts (six à douze mois), correspondent bien à la demande urgente de compétences des entreprises du secteur. « Dans notre profession, la moitié des contrats de professionnalisation n’excède pas un an », témoigne Daniel Van Eslande, directeur de la formation à la Fédération nationale des travaux publics, qui soutient à fond ce nouveau mode d’insertion et de formation. Pour preuve, le secteur a conclu 2 485 contrats de professionnalisation l’an dernier et, à la mi-2007, la tendance était à une hausse de 50 %, en droite ligne avec l’objectif de 3 000 contrats annuels que s’est fixé la branche.

Le textile, une branche généreuse. Dans le secteur textile, frappé par la concurrence asiatique, on assiste également à une utilisation massive de ce contrat d’alternance nouvelle mouture : 1 500 signés en 2005, 1 900 en 2006… Mais là, il s’agit davantage d’aider les jeunes à s’insérer, tout en incitant les entreprises à embaucher. Du coup, la branche, responsable depuis la réforme de la gestion des politiques de formation et des fonds collectés, a voulu être généreuse. Les contrats ont bien souvent été prolongés à vingt-quatre mois, et l’Opca a offert des forfaits de prise en charge systématiquement au-dessus des 9,15 euros l’heure prévus par la loi si le cycle donne lieu à une certification. « Nous avons même inventé le contrat de pro “recherche”, qu’une vingtaine de jeunes expérimentent actuellement. Ils peuvent accéder à des formations de troisième cycle pointues, destinées à améliorer la valeur ajoutée de nos entreprises textiles françaises », explique Xavier Royer, directeur du Forthac, l’organisme collecteur de la branche textile. Lequel a très vite engagé les 22 millions d’euros qu’il a collectés pour financer les contrats de professionnalisation.

En attendant, les entreprises du secteur se sont approprié l’outil, avec opportunisme. « Ce n’est pas un énième contrat aidé pour augmenter l’embauche de personnes en difficulté. C’est un moyen intelligent de former des gens qui ont la volonté d’intégrer l’entreprise et, en plus, il nous a permis de modeler le contenu des formations selon les besoins spécifiques de notre métier de dentellier. Nous allons même jusqu’à envoyer nos propres salariés comme formateurs », témoigne Éric Damperont, directeur général de l’entreprise Solstiss, dans le Nord, qui emploie 230 personnes et a conclu 17 contrats de professionnalisation.

Devant cette mise en route à présent évidente, même ceux qui se sont montrés les plus réfractaires au contrat de professionnalisation lors du lancement de la réforme se sont laissés apprivoiser. Non sans continuer d’apporter des critiques constructives. C’est le cas de Xavier Baux, le président de la Chambre syndicale des organismes de formation en alternance, qui va même jusqu’à réclamer 70 000 contrats de plus par an : « Nous demandons aux politiques d’assouplir cette gestion par branche professionnelle pour éviter qu’une possible embauche n’échoue seulement parce que la qualification ne correspond pas aux priorités fixées par la branche qui doit la financer, défend-il. Il faut qu’un Opca interprofessionnel puisse pallier ces défaillances car, sinon, au bout, c’est encore un jeune de plus qui n’aura pas de boulot. »

D. A.

Vinci Park roule pour le DIF

Olivier Reboul est totalement acquis au concept de formation tout au long de la vie. Directeur de la formation chez Vinci Park, il recourt largement aux périodes de professionnalisation et au DIF pour renforcer les compétences des 2 400 agents, assistants ou responsables d’exploitation et les préparer à l’évolution de leur métier. Avant la réforme, la filiale du numéro un de la construction spécialisée dans le stationnement payant consacrait 1,2 % de sa masse salariale à la formation. Aujourd’hui, 2,6 %. En 2007, 60 % des demandes de formation étaient satisfaites au titre du DIF, contre 7 % en 2006. « Nous avons dû expliquer que le DIF était, certes, un droit à l’initiative du salarié, mais qu’il s’exerçait avec l’accord de l’employeur, précise Olivier Reboul. Il a fallu aussi surmonter les réticences des managers, qui voient le DIF comme une obligation, non comme un outil de développement. »

Vinci Park a prévu, dans son accord d’entreprise, d’inscrire les formations courtes sur le temps de travail, les longues tout ou en partie sur le temps libre. La filiale a aussi défini des critères pour le DIF. Un impératif : la formation doit être en lien avec le poste actuel ou futur. « Une formation qui vise à acquérir une compétence de base s’inscrit dans le plan, précise Olivier Reboul. À l’inverse, elle relève du DIF si elle améliore les compétences personnelles. » Les salariés peuvent aussi débloquer leurs cent vingt heures pour suivre des formations plus longues. Certains ont pu effectuer un cycle qualifiant de cent cinquante heures préparant aux fonctions de responsable d’exploitation. D’autres ont réappris à lire et à écrire.

Les 44 ans et plus représentaient en 2005

seulement 1,2 % des contrats de pro, alors que, pour cette population, les entreprises sont exonérées de charges sociales

Source : Dares.