Défiscalisation des heures sup, service minimum, fusion ANPE-Unedic, révision du contrat de travail… Rarement présidence aura été annoncée aussi réformatrice, avec un calendrier aussi comprimé. L'extrême difficulté de la feuille de route donnerait le mal d'altitude aux meilleurs alpinistes, avant même le début de l'ascension. Pour limiter les risques, Nicolas Sarkozy s'en remet à un « sherpa » aguerri, l'inusable Raymond Soubie, 67 ans, qui a tissé un réseau de relations incomparables depuis qu'il a été conseiller social de Jacques Chirac, puis de Raymond Barre, à Matignon de 1974 à 1981. S'il a quitté alors les cabinets ministériels pour prendre, notamment, la tête du groupe Liaisons puis fonder la société de conseil RH Altedia, cet énarque étiqueté centre droit a continué à graviter dans les sphères de l'État. Comme expert, aujourd'hui à la présidence du Conseil d'orientation pour l'emploi (COE), ou comme démineur. Séparer les problèmes, les traiter un par un, expliquer sans relâche : sa méthode fait florès. C'est lui qui a conseillé le gouvernement Raffarin pour la réforme des retraites. En le chargeant d'une mission sur le dialogue social, Nicolas Sarkozy envoie un signe fort aux partenaires sociaux. Présent lors des face-à-face organisés par le président avant sa prise de fonctions, le P-DG d'Altedia, qui a pris ses distances d'avec sa société cotée, suivra les rencontres bilatérales officielles dès fin mai et les quatre conférences tripartites de rentrée. Il sera aidé de Bertrand Martinot, 39 ans, qui quitte la DGEFP et la tête du service des politiques de l'emploi et de la formation professionnelle pour endosser le rôle de conseiller social de la présidence. Cet énarque, qui s'est frotté aux questions d'emploi à ses débuts à Bercy à la Direction de la prévision, a aussi connu la vie de cabinet, auprès du ministre délégué au Budget, Jean-François Copé, qu'il a conseillé sur les comptes sociaux.

Entre l'Élysée et Matignon, la ligne sera directe. Le Premier ministre François Fillon a en effet nommé au poste de conseiller social Éric Aubry, 51 ans, qui était depuis 2005 secrétaire général du COE… auprès de Raymond Soubie. Il l'a rappelé, plus exactement. Car cet énarque, passé par l'ambassade de France à Londres et par la direction des affaires sociales à la FFSA, a été le conseiller technique travail (2002-2004) de François Fillon, alors ministre des Affaires sociales. Avant de devenir directeur de cabinet de Gérard Larcher. Il s'appuiera sur deux conseillers techniques de poids. Pierre Mayeur, directeur actuel de la réglementation du recouvrement à l'Acoss, qui fut la cheville ouvrière de la réforme des retraites en 2003 auprès de Fillon, est chargé des finances sociales. Hervé Monange, administrateur au Sénat, passé par le cabinet Larcher où il suivait les relations du travail et l'emploi des seniors, reprend la partie travail. Autre membre de l'équipe Larcher à rejoindre Matignon : son ex-directrice adjointe de cabinet, Sophie Boissard, maître des requêtes au Conseil d'État, 37 ans, qui devient conseillère chargée des études et de la prospective. Cette normalienne et énarque, qui a été rapporteure de la commission de Virville sur la simplification du droit du travail, conserve la direction du Centre d'analyse stratégique, l'exPlan, dont elle conduit la réforme depuis 2005. Autant dire que le nouveau locataire de la Rue de Grenelle, Xavier Bertrand, est sérieusement encadré.

ÉRIC AUBRY

L'ancien directeur de cabinet de Gérard Larcher est nommé conseiller social à Matignon.

RAYMOND SOUBIE

L'actuel président du Conseil d'orientation pour l'emploi (COE) devient le sherpa social de l'Élysée.

SOPHIE BOISSARD

La nouvelle conseillère de François Fillon, chargée des études et de la prospective, conserve la direction du Centre d'analyse stratégique.