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“Fini la politique du stop and go”

Actu | Veille | publié le : 01.06.2007 | Fanny Guinochet

L'Agefiph fête ses 20 ans. L'occasion pour son président, Tanguy du Chéné, d'amorcer un virage stratégique. Interview.

Quel bilan tirez-vous de ces vingt ans ?

En 1987, lors de la création de l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph), à peine 7 000 personnes handicapées étaient embauchées par an contre 111 000 aujourd'hui. Notre action a donc porté ses fruits. Le regard sur le handicap a changé. Les débats autour de la loi de février 2005, qui a considérablement accru les obligations des entreprises en matière d'emploi des personnes handicapées, ont généré une véritable prise de conscience. Nous sommes optimistes, tout en mesurant le travail qu'il reste à accomplir.

Quelles sont vos priorités pour l'avenir ?

Si nos programmes ont été efficaces, nous avons trop souvent mené une politique en dents de scie, que je qualifierais de stop and go : quand les fonds disponibles augmentaient, nous amplifiions nos actions, puis nous les stoppions lorsque les fonds retrouvaient leur niveau antérieur.

Notre nouvelle stratégie est fondée sur une approche plus lissée, tout en anticipant davantage les évolutions du marché de l'emploi et en prenant mieux en compte les besoins des employeurs et des personnes handicapées. Depuis décembre, une commission interne définit une stratégie d'intervention pour les trois ans à venir. Elle s'articulera autour de deux axes : du côté des personnes handicapées, il s'agit de libérer les potentiels en jouant sur la formation, l'orientation, mais aussi l'accompagnement à l'élaboration des projets professionnels, et, du côté des entreprises, il convient de pérenniser l'emploi, via l'adaptation des postes, mais aussi des environnements de travail.

Aujourd'hui, une entreprise sur deux ne remplit pas ses obligations légales en matière d'emploi de personnes handicapées. Comment y remédier ?

Les entreprises sont bien plus préoccupées par la question du handicap que les chiffres ne le laissent penser. Ainsi, 50 % remplissent totalement leur obligation d'emploi, 27 % d'entre elles la remplissent partiellement sans toutefois atteindre le taux de 6 %. Finalement, seules 23 % ne se préoccupent pas du tout du handicap. Ce sont vers elles, soit 23 000 entreprises, que nous allons prioritairement porter nos efforts. Nous prévoyons de les rencontrer pour les sensibiliser et, bien sûr, leur proposer des solutions concrètes. Cela s'avère d'autant plus nécessaire que depuis l'entrée en vigueur de la loi handicap, le 1er janvier 2006, les entreprises ont vu le montant de leur contribution financière à l'Agefiph augmenter. Et, en 2010, les employeurs récalcitrants, qui n'auront pris aucune initiative depuis plus de trois ans, verront cette contribution passer à 1 500 fois le smic horaire, soit presque l'équivalent d'un salaire annuel. Entre 2006 et 2007, les montants collectés par l'Agefiph ont augmenté de 30 %, faisant passer notre budget d'intervention à hauteur de 550 millions d'euros contre 410 millions en 2006. Rappelons que 60 % de nos financements concernent des aides directes aux personnes handicapées et aux entreprises.

Quels sont les obstacles à l'insertion professionnelle des personnes handicapées ?

Il convient de briser les tabous et d'informer les employeurs et les collectifs de travail que le handicap ne se limite pas au fauteuil roulant. Par ailleurs se pose le problème de la pénurie de main-d'œuvre et de sa faible qualification. En effet, 80 % des demandeurs d'emploi handicapés ont un niveau égal ou inférieur au BEP ou CAP (niveau 5), contre 60 % pour le reste de la population. De nombreuses entreprises souhaiteraient embaucher mais se ravisent, faute de profils adaptés. Dans le prolongement de l'opération Handicompétences, lancée en 2006, nous allons redoubler d'efforts en matière de formation.

Comment allez-vous célébrer ce 20e anniversaire ?

Nous avons invité 500 décideurs de la sphère politique, économique et associative à débattre, le 5 juillet, au palais Brongniart, sur le thème « d'égal à égal ». Nous dévoilerons à cette occasion notre nouvelle identité visuelle, plus conforme à notre positionnement « services ».

TANGUY DU CHÉNÉ

63 ans.

Président de l'Agefiph et conseiller du président du groupe Banque populaire.

Auteur

  • Fanny Guinochet