La mafia la traita de « puttana », Milosevic de « nouvelle Gestapo » ! Dans leur bouche, ces insultes nauséabondes louaient la pugnacité de Carla Del Ponte, procureure au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. Marcel Schüpbach filme le travail de cette magistrate et de son équipe qui, obstinément, pourchassent les derniers criminels de guerre. De leur bureau à La Haye ou devant les Nations unies à New York en passant par Belgrade, ces justiciers font pression sur l’Union européenne, dénoncent l’indifférence de la communauté internationale et la complicité de certains États, Serbie en tête. Pour faire plier les puissants, ils disposent de peu de moyens. En parallèle, en Bosnie, les veuves rescapées du génocide attendent que justice soit faite.

Réalisé comme un James Bond, où s’enchaînent courses automobiles sur la côte adriatique, tractations secrètes et plan serré sur les gardes du corps, le documentaire tient en haleine. Sauf que les (très) méchants échappent aux (impuissants) gentils. En s’aventurant pour la première fois dans les coulisses du TPI, Marcel Schüpbach restitue pudiquement la solitude, les frustrations du juge et la douleur des femmes bosniaques.

Le mandat du TPI s’achève en septembre. Il reste six noms à rayer de la liste de Carla. Parmi eux, Radovan Karadzic et Ratko Mladic, responsables des massacres de Srebrenica. « Ce jour-là, l’enfer est descendu sur terre », témoigne une survivante. Le diable court encore.

La Liste de Carla, documentaire de Marcel Schüpbach (95 min). Sortie le 9 mai.