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Les intranets résistent aux syndicats

Dossier | publié le : 01.01.2000 | E. B.

Rien n'oblige une direction à ouvrir son intranet aux représentants du personnel. Reste aux élus la possibilité d'utiliser les sites Internet de leurs organisations syndicales.

La législation du travail risque de prendre un sacré coup de vieux avec l'arrivée des nouvelles technologies. Comme en témoigne la question posée à Martine Aubry en février 1999 par le député UDF Jean-François Chossy : « Les représentants du personnel peuvent-ils utiliser le site Internet de leur entreprise pour s'adresser aux salariés ? » La réponse de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité ne pouvait être qu'évasive : « Il appartient aux organisations syndicales de rechercher, par voie d'accord avec leur employeur, les modalités d'accès à la messagerie générale et de diffusion de messages à caractère syndical. » En substance, aucune réglementation ne contraint un employeur à ouvrir son site Internet ou son intranet aux représentants du personnel. Donc, il faut négocier.

Pour le moment, les accords d'entreprise portant sur ce thème ne sont pas légion et les directions ne se bousculent pas pour entamer des discussions. Certaines, même, reviennent de loin. Chez IBM, jusqu'à l'année dernière, les représentants syndicaux n'avaient pas le droit d'utiliser la messagerie électronique pour communiquer entre eux. Aujourd'hui, son utilisation est sévèrement encadrée. La direction tolère les communications uniquement entre membres d'une même organisation syndicale détenteurs d'un mandat ou entre élus d'un comité d'établissement, du CHSCT ou du CCE. À la Snecma, la direction utilise la messagerie pour tenir informés les cadres et agents de maîtrise de l'état des négociations sur les 35 heures. Les syndicats, quant à eux, sont juste autorisés à l'employer pour adresser un compte rendu à une liste limitée d'adhérents et de sympathisants après chaque réunion avec la direction.

Négociations suspendues

Ailleurs, comme chez Bull, c'est plutôt le règne du non-dit. Les élus utilisent la messagerie entre eux mais l'accès à l'intranet leur est refusé pour le moment. À la Société générale, la direction avait proposé aux représentants syndicaux de leur octroyer un espace sur l'intranet pour un loyer de 14 000 francs annuels. Tout en se réservant le droit de revenir en arrière si la charte éditoriale n'était pas respectée. Les organisations syndicales ayant refusé, toute négociation sur ce thème est suspendue sine die. Ce qui n'empêche pas les syndicalistes d'utiliser le Net entre eux grâce aux boîtes aux lettres gratuites qui se multiplient sur Internet. Autre solution retenue par certains, l'utilisation du site Internet de leur organisation syndicale. Toutes les centrales en sont en effet dotées à présent. Dernier en date, celui de SUD PTT, destiné aux agents de La Poste et de France Télécom : « Nous souhaitons en faire une vitrine de nos idées et un instrument de communication avec le personnel, explique Michel Bély, responsable du site à SUD. Dans notre esprit, les nouvelles technologies doivent s'intégrer dans le droit d'expression syndicale, au même titre que les distributions de tracts à la sortie des établissements ou des panneaux d'affichage. »

À France Télécom, les négociations sur la création d'espaces réservés aux organisations syndicales à l'intérieur de l'intranet n'ont pas abouti. « Nous voulions bénéficier, comme la direction, de la possibilité d'envoyer des informations en masse sur la messagerie. Pour l'instant, les négociations sont au point mort. Nous compenserons avec notre site Internet. » Chez Ubi Soft, une société de services informatiques, les employés sont allés jusqu'à créer un site pour dénoncer leurs conditions de travail. Et la direction a fini par se rendre à leurs arguments. En somme, c'est grâce à Internet que les représentants syndicaux pourront contourner l'interdiction qui leur est faite d'utiliser… les intranets.

Auteur

  • E. B.