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Trois recettes pour dépenser moins

Dossier | publié le : 01.09.2006 | S. D.

Passer les fournisseurs au crible, lancer des appels d'offres restreints, utiliser les enchères inversées sur des offres catalogue… les entreprises testent plusieurs formules pour rationaliser leurs achats de formation. Exemples chez Nestlé, Dell et à La Poste.

NESTLÉ RESTREINT SON CHOIX DE PRESTATAIRES

Le géant de l'agroalimentaire suisse a déniché le profil idéal pour occuper le nouveau poste d'acheteur spécialisé dans les prestations intellectuelles (formation, conseil en management, recrutement, informatique, juridique, etc.). Nommée en juin 2005 pour gérer un portefeuille de 35 millions d'euros, Catherine Geoffroy a longtemps travaillé dans les services de formation. Une expérience qui l'aide à appréhender la spécificité des achats dont elle a la charge et rassure ses interlocuteurs internes. « Lorsque j'ai appris que j'allais devoir travailler avec un acheteur, j'ai craint, d'une part, d'être laissée à l'écart du processus d'achat, d'autre part, que l'unique critère de sélection soit le prix, au détriment de la qualité », se souvient Anne-Marie Patrel, responsable de la formation au « campus », centre de formation de Nestlé.

Dès son arrivée, Catherine Geoffroy a appliqué à la formation les gammes du métier d'acheteur et généralisé la mise en concurrence. « Les responsables de formation avaient l'habitude de fonctionner avec les mêmes organismes dans une relation de partenariat, analyse l'acheteuse. Le fait de recréer un challenge entre les fournisseurs identifiés sur un domaine défini les incite à se remettre en cause, à améliorer la qualité et les coûts. » Catherine Geoffroy a aussi commencé à établir un référencement pour jouer sur les volumes. « Nous cherchons à optimiser notre panel et à passer, par exemple, sur certaines familles, de huit à trois prestataires. Et, à l'inverse, quand le prestataire jouit d'une situation de monopole, à élargir le référencement. » Pour évaluer la prestation des organismes au moment du référencement ou lors d'appels d'offres, la direction des achats et celle de la formation ont coconstruit une grille reprenant les tarifs commerciaux, le profil des formateurs, la connaissance du marché, etc. Les fournisseurs présélectionnés passent ensuite sous les fourches caudines du binôme. « Le début de l'entretien est centré sur les aspects pédagogiques, puis je passe la main à Catherine qui entame les négociations commerciales, raconte Anne-Marie Patrel. Nous fonctionnons en binôme sur toutes les étapes du projet, de la rédaction du cahier des charges à l'évaluation des prestations achetées. » La direction des achats impose aux responsables de formation de s'adresser aux prestataires référencés et rejette les demandes non conformes. « Les achats sont plus largement impliqués en amont des projets, ajoute Catherine Geoffroy. On travaille mieux ensemble. »

LA POSTE MULTIPLIE LES APPELS D'OFFRES

Depuis l'année dernière, l'équipe d'acheteurs spécialisés auparavant rattachée à la direction centrale de la formation de La Poste a rejoint celle des achats. Un changement d'organigramme qui fait de l'achat de formation une opération comme une autre. L'entreprise publique, qui externalise seulement 20 % de ses actions de formation, s'efforce de rationaliser ses procédures d'achat depuis une dizaine d'années. Obéissant à un cadre réglementaire, La Poste lance systématiquement un appel d'offres restreint pour des marchés compris entre 35 000 et 420 000 euros, seuil au-delà duquel l'appel est public.

C'est ce qu'a récemment fait La Poste pour déployer une formation de cinq jours sur la responsabilisation du management, qui concerne 2 500 cadres dans les centres de courrier. « Nous commençons par élaborer un cahier des charges en collaboration avec la direction des achats qui exerce sa vigilance sur les aspects plus commerciaux et juridiques », explique Anne Deville, directrice de l'université courrier, qui assure trois cent mille jours de formation par an. « Sur la dizaine de prestataires à qui nous l'envoyons, nous en recevons ensuite trois ou quatre en commission tripartite réunissant à la fois un acheteur, un responsable de formation et un opérationnel. Pour rendre la sélection plus objective, la direction des achats nous impose une grille d'évaluation qui passe au tamis le CV des formateurs, la compétence pédagogique, les tarifs, etc. » Si cette procédure rend les règles plus transparentes, elle rallonge le circuit de décision, obligeant les RH à anticiper davantage leurs besoins de formation. Parallèlement, La Poste a entamé un référencement d'une dizaine de prestataires sur les sessions informatiques et intraentreprises.

DELL RECOURT AUX ENCHÈRES INVERSÉES

Depuis 2003, le constructeur informatique a recouru par deux fois aux enchères inversées pour des stages de bureautiques et linguistiques. Le premier concernait une centaine de stagiaires, le second environ 500 managers répartis sur quatre sites français et étrangers. Cette procédure vivement décriée consiste à mettre en concurrence un nombre limité de prestataires qui enchérissent à la baisse pour remporter le marché. « Nous avons d'abord lancé un appel d'offres restreint auprès de huit organismes qui ont dû répondre à un cahier des charges reposant uniquement sur des critères qualitatifs (support d'apprentissage linguistique, contenu pédagogique, profil des intervenants, etc.) », raconte Christelle Vidalot, acheteuse multidisciplinaire. Jonglant entre le nettoyage, la sécurité, le courrier, etc., elle ne consacre que 10 % de son activité à la formation. Les quatre prestataires placés en short list sont ensuite connectés sur une plate-forme électronique sécurisée durant une demi-heure, chacun pouvant consulter l'offre concurrente et baisser son prix. Sur l'un des deux marchés, l'offre la moins-disante a finalement été rejetée. « Les enchères inversées n'ont porté que sur l'aspect quantitatif et nous ont fait gagner du temps dans les négociations, la partie la plus délicate, raconte Élodie Lombardo, responsable de la formation sur le site de Montpellier. Plutôt que de multiplier les rencontres avec les prestataires, en un quart d'heure les jeux étaient faits. Nous avons aussi obtenu des conditions tarifaires plus favorables, mais notre objectif n'est pas d'entraîner la faillite de nos prestataires. » Dell, qui consacre 5,3 % de sa masse salariale à la formation, estime cette pratique adaptée à l'achat de formations sur catalogue et souhaite renouveler prochainement l'expérience. En moyenne, selon divers témoignages, les enchères inversées entraînent une diminution d'au moins 20 % du prix des prestations intellectuelles. Dénoncées par des représentants d'employeurs, FFP et Medef en tête, elles restent rares dans le domaine de la formation continue. Jusqu'à quand ?

Auteur

  • S. D.