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Politique sociale

Faut-il modifier le mode d'alimentation du FRR ?

Politique sociale | publié le : 01.06.2006 |

Raoul Briet Président du conseil de surveillance du Fonds de réserve des retraites (FRR)

Le FRR bénéficie de trois types de ressources. L'une est garantie et stable : c'est une recette fiscale de 1,3 milliard d'euros. La deuxième est hypothétique : c'est l'excédent des régimes sociaux (Cnav et FSV). La troisième dépend de choix faits par les pouvoirs publics quant à l'utilisation du produit des cessions d'actifs (dotations en capital d'entités publiques, désendettement de l'État, abondements du FRR). Compte tenu du caractère peu vraisemblable de la réapparition prochaine d'excédents sociaux, la structure actuelle de financement est donc fragile. Il serait souhaitable de définir un mode d'alimentation plus stable et plus prévisible. Le Fonds y gagnerait, y compris sur le plan de sa gestion financière. Ce sujet est étroitement lié à celui du rôle que l'on entend faire jouer au FRR après 2020. Veut-on qu'il couvre un tiers ou la moitié des besoins de financement prévisionnels ? Entre 2020 et 2040 ou entre 2020 et 2050 ? Ces questions dépassent de beaucoup le débat sur le chiffre symbolique de 150 milliards d'euros souvent cité. Les prochains travaux du COR devraient en éclaircir les termes, permettre à la collectivité nationale de s'accorder sur le rôle assigné au FRR et définir un mode et un rythme d'alimentation cohérent avec ce rôle.

Anne Lavigne Directrice du laboratoire d'économie de l'université d'Orléans.

Le FRR pourrait être un formidable outil de politique économique. Grâce à une gestion financière collective, publique et sécurisée, le FRR permet de lisser le surcoût induit par le passage à la retraite des générations nées après la guerre au cours des vingt prochaines années. Mais son mode de financement, pour l'essentiel fondé sur des abondements non pérennes, obère son efficacité malgré les performances remarquables de sa gestion financière. Des travaux menés au laboratoire d'économie d'Orléans montrent, sous des hypothèses démographiques, économiques et financières prudentes, et en maintenant les taux de remplacement actuels, qu'une hausse progressive des taux de cotisation (salariés et employeurs) d'environ 2,5 points d'ici à 2027 et d'environ 1 point jusqu'en 2050 permettrait une accumulation régulière de 90 milliards d'euros jusqu'en 2027. Une transformation du FRR en fonds structurel disposant en permanence d'une année de prestations entraînerait une hausse supplémentaire des taux de cotisation d'environ 0,5 point. Asseoir le financement du FRR sur des hausses raisonnables de taux de cotisation semble être une réforme prometteuse, comme le montrent certaines expériences étrangères.

Henri Sterdyniak Économiste à l'OFCE.

Le FRR a pour objectif de répartir équitablement sur l'ensemble des générations le coût des retraites des années 2020 à 2050, où le nombre de retraités sera particulièrement élevé. Dans cette optique, il ne peut être financé que par les futurs retraités. Le poids portant sur chacun doit être proportionnel à la retraite qu'il touchera dans le futur. La hausse du financement doit assurer une augmentation effective du taux d'épargne et du taux d'investissement de la nation. Aussi le FRR devrait-il être financé par les cotisations salariés, qui devraient être progressivement augmentées, de sorte à lisser et à garantir les hausses nécessaires. En sens inverse, le risque est grand qu'une nouvelle ponction sur les ménages affaiblisse le dynamisme de la consommation, d'autant plus que la France ne pourra la compenser par une baisse de son taux d'intérêt ou de son taux de change. Aussi, cette augmentation ne pourra intervenir qu'en période de forte croissance. En attendant, il est socialement et économiquement absurde de prétendre financer le FRR par le produit de privatisations, surtout quand elles risquent de nuire à la maîtrise par la nation de son développement économique (GDF, EDF, ADP).

Pour en savoir plus

FRR, Situation financière du FRR au 31 mars 2006, mai 2006.

www.fondsdereserve.fr

COR, Retraites : perspectives 2020 et 2050, 3e rapport, mars 2006.

www.cor-retraites.fr

Caisse des dépôts, Questions retraite, n° 2005-68, juillet 2005.

cdc.retraites.fr

Lavigne A., Berger C., le FRR peut-il faire face au déséquilibre du régime général ?, février 2005.

OCDE, les Pensions dans les pays de l'OCDE : panorama des politiques publiques, mai 2005.