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Le contrôle des arrêts de travail s'intensifie

Dossier | publié le : 01.05.2006 | V.D.

Après une hausse spectaculaire au début des années 2000, la progression des arrêts maladie, et donc des dépenses y associées, connaît un répit. Et pour cause : les contrôles deviennent monnaie courante. Mais l'évolution des arrêts de longue durée et des mises en invalidité est inquiétante.

La peur du gendarme a fini par payer. Alors que les arrêts maladie s'étaient littéralement envolés entre 2000 et 2004, entraînant, selon le Centre technique des institutions de prévoyance (CTIP), une hausse de 50 % des prestations versées par les institutions de prévoyance – et, par contrecoup, de 33 % des cotisations à la charge des employeurs –, 2005 devrait marquer un palier. « C'est une année d'amélioration technique », se félicite Yanick Philippon, du cabinet Siaci. Une embellie que tous, professionnels du secteur comme entreprises, s'accordent à mettre au crédit de la multiplication des vérifications. « La prise de conscience générale et les contrôles tendent à modifier le comportement de tout le monde, assurés comme prescripteurs », souligne ainsi Jean-Louis Faure, délégué général du CTIP.

Une très large majorité (84 %) des DRH interrogés dans le cadre de notre baromètre Liaisons sociales-Aprecialis pensent que « les contrôles médicaux sont efficaces dans la lutte contre les arrêts de travail ». Un quart d'entre eux l'ont déjà mis en place tandis que 82 % s'y déclarent favorables. « En l'espace de deux ou trois ans, la perception des contrôles a changé. Ils sont beaucoup mieux acceptés par les directions d'entreprise », confirme Typhaine Delorme, de GAN Eurocourtage.

À l'évidence, les contrôles médicaux ont eu tendance à se multiplier ces deux dernières années. À commencer par ceux pratiqués par l'assurance maladie. Avec 750 000 vérifications diligentées en 2005 contre 450 000 en 2003, la branche a fait un axe prioritaire de sa lutte contre les abus. Mais les organismes complémentaires, confrontés à une multiplication des contrats déficitaires, ont également mis sur pied de nouveaux dispositifs de vérification. À l'instar du groupe de prévoyance MV4 Parunion qui y a affecté une équipe de trois personnes dont un médecin-conseil. Basés sur l'envoi systématique d'un questionnaire au médecin traitant visant à s'assurer du bien-fondé des arrêts de longue durée et sur la possibilité d'organiser des contre-visites médicales, ces dispositifs ont eu, de l'avis des assureurs, « un effet dissuasif assez fort », note-t-on à MV4 Parunion, en leur attribuant 5 % des reprises de travail.

Reste que si le nombre d'abus ainsi mis au jour reste marginal (un cas en sept mois pour MV4 Parunion), les contrôles se heurtent à une difficulté : nombre de pathologies motivant ces arrêts et liées à des lombalgies et à des troubles psychiques sont difficilement objectivables. De leur côté, les entreprises ont, elles aussi, été incitées à agir. Notamment sous l'aiguillon des assureurs complémentaires qui ont fait en sorte de les « responsabiliser au suivi de l'absentéisme de leurs salariés », tant par la hausse des cotisations que par la suspension des prestations « pousse-au-crime ». « Alors qu'auparavant nous acceptions de nous substituer à l'employeur au bout de quinze jours et à hauteur de 100 % du salaire, nous allons plutôt chercher à instaurer une franchise de quatre-vingt-dix jours et ne payer que 90 % de leur rémunération », reprend Typhaine Delorme.

Un message reçu cinq sur cinq par les employeurs. Notamment à Carrefour où les hypermarchés, confrontés à une envolée des arrêts de travail, ont mis en place, explique Michel Enguelz, le délégué FO du groupe de distribution, en plus de nouveaux dispositifs de prévention, « une panoplie de mesures coercitives », à commencer par une révision des jours de carence. « Une réaction que nous avons plutôt mal ressentie dans la mesure où l'entreprise n'avait auparavant conduit aucune étude sur les causes réelles de l'augmentation de cet absentéisme, qu'il soit de courte ou de longue durée. »

Parallèlement, comme le rappelle Alain Rouché, directeur santé de la FFSA, « à la différence des arrêts de courte durée, la charge des arrêts de longue durée est, elle, encore en légère augmentation ». Notamment dans certains secteurs d'activité où elle s'est déjà traduite par une multiplication des mises en invalidité, comme dans la grande distribution ou encore le secteur sanitaire et social. Une tendance qui ne manque pas d'inquiéter les professionnels de la prévoyance. « Alors qu'historiquement la couverture prévoyance constituait un bon risque avant 2002, la pression démographique et l'allongement des durées de cotisation vont fragiliser durablement les résultats de la couverture des arrêts maladie », prévient Yanick Philippon, du cabinet Siaci. En clair, « le risque d'assister à une augmentation des « préretraites » pour motif médical existe », précise Dominique Chaignon, de la Mutualité française. À raison de huit à dix années en moyenne de prestations à provisionner par salarié en invalidité, l'équilibre de ces régimes n'y résisterait pas longtemps.

Conséquence, tous les opérateurs du secteur ont mis en place de nouveaux dispositifs de prévention et surtout d'aide à la réinsertion des salariés en arrêt maladie. Quitte à faire le bonheur des cabinets de conseil spécialisés, comme le canadien Solareh, centrés sur la prévention et surtout la réduction des arrêts de travail, ou encore le français Psya, spécialisé dans l'accompagnement psychologique des salariés. Mais l'effet sur la sinistralité reste encore à mesurer : « Pour une proportion allant d'un tiers à la moitié de salariés en arrêt de plus de trois mois volontaires pour suivre un tel dispositif, nous avons obtenu un retour au travail dans près de la moitié des cas », constate Hervé Bachellerie, le directeur général du groupe Agrica. Et de souligner que si ces accompagnements ne sont pas diligentés dans les six premiers mois d'arrêt, les personnes ont toutes les chances de s'enfermer dans leur maladie et d'être toujours en incapacité trois ans plus tard.

En cas d'arrêt de travail, avez-vous mis en place des contrôles médicaux ?

OUI à 30 %

À défaut, êtes-vous favorables à leur mise en place ?

OUI à 82 %

Si oui, trouvez-vous cela efficace ?

OUI à 84 %

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  • V.D.