Il faut évaluer les effets d'une éventuelle multiplication des périodes de soldes sur le niveau de la consommation, sur la santé financière des commerçants et sur le degré de satisfaction des clients. En premier lieu, les soldes peuvent inciter les ménages à consommer parfois au-delà du raisonnable. Leurs ressources n'étant pas extensibles, une multiplication des soldes les conduirait, dans certains cas, à un endettement excessif. En second lieu, des soldes, donc d'éventuelles ventes à perte, plus fréquents fragiliseraient le commerce de proximité.
Pour faire jeu égal avec les grandes enseignes de distribution, les commerçants indépendants devraient consentir des rabais importants sur de longues périodes. Les plus fragiles disparaîtraient. Enfin, les secteurs qui ne se prêtent pas à ce type de vente seraient encore plus pénalisés. Pourquoi, alors, réformer le régime des soldes ? D'autant que les commerçants peuvent organiser des promotions toute l'année sans devoir se soumettre à des formalités particulières. La politique actuelle des soldes paraît raisonnable et suffisante, même si des aménagements pourraient lui être apportés quant à sa durée, jugée parfois trop longue.
Oui, et l'évolution récente de la consommation dans l'Hexagone nous en donne encore la preuve. De par la faiblesse de leur pouvoir d'achat et des créations d'emplois, les ménages ont de moins en moins le choix : s'ils veulent continuer de consommer sans trop se restreindre, ils doivent de plus en plus s'endetter et surtout se porter sur les produits à bas prix. Dès lors, en dehors des périodes de « bonnes affaires », ils limitent leurs achats, y compris pendant les fêtes de fin d'année, comme cela a pu s'observer fin 2005. Pis, de plus en plus de Français essaient d'allonger eux-mêmes les périodes de soldes en augmentant leurs dépenses dans le hard discount ou sur Internet. Dans ce cadre, moderniser et libérer le régime des soldes reviendrait simplement à officialiser une situation de fait. De plus, cela permettrait aux entreprises du secteur de la consommation de réguler leurs prix en fonction de leur propre activité, de leurs stocks et des souhaits de la clientèle. À l'échelle nationale, enfin, la consommation deviendrait moins volatile qu'actuellement, engendrant une croissance plus linéaire, plus propice à la création d'emplois, donc au pouvoir d'achat et à la consommation…
Incontestablement, la réglementation actuelle des soldes n'est plus adaptée. Les modalités des échanges commerciaux se sont considérablement transformées ces dernières années. D'une part, les marchés se sont mondialisés, notamment dans le textile ou l'habillement-chaussures. D'autre part, les modes de production ont évolué: on produit désormais à flux tendu toute l'année, et non plus pour deux saisons dans l'année comme auparavant. Enfin, les modes de distribution ont eux aussi changé avec le développement du hard discount et le décollage du commerce par Internet. Nous sommes ainsi favorables à une déréglementation des périodes de soldes permettant aux commerçants d'écouler leurs invendus quand ils le souhaitent. Mais nous portons aussi une attention particulière à la vérité des prix et des marges pratiqués par les distributeurs. Dans une majorité de cas, le prix fixé en début de saison intègre les futurs rabais qui seront appliqués. Aussi, autoriser les soldes toute l'année et obtenir plus de transparence sur les marges permettraient une baisse effective des prix et une relance du pouvoir d'achat des ménages.
Centre d'observation économique, Lettre mensuelle de conjoncture, n° 487, janvier 2006.
Natexis Banques populaires, Économie & marchés, n° 444,
Crocis, Enquêtes soldes,
Credoc, Consommation et Modes de vie, n° 188, décembre 2005.
Insee, Note de conjoncture, décembre 2005,
