logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Dossier

Le deuxième pilier tarde à apparaître

Dossier | publié le : 01.12.1999 | Marie-Noëlle Terrisse

Créés par une loi de 1993, les nouveaux fonds de pension de branche ont bien du mal à décoller en Italie. Leur développement est handicapé par le niveau élevé des cotisations au régime public et par l'avantage très relatif qu'ils procurent.

Si les fonds de pension ne décollent pas, nous aurons des générations de retraités pauvres » : l'auteur de cette mise en garde n'est pas un pur produit du libéralisme, mais Massimo D'Alema, le président du Conseil italien, issu des Démocrates de gauche. Dans la Péninsule, c'est sous la contrainte que la gauche et les syndicats tentent de doper les fonds de pension. Certains existent depuis longtemps : créés par des entreprises, en général pour leurs cadres, ils concernent actuellement environ 600 000 personnes. Mais le gouvernement italien veut promouvoir aujourd'hui une nouvelle génération, qui aurait dû voir le jour après le vote de la loi sur les retraites de 1993. Un texte dont les décrets d'application ne sont sortis qu'en 1997, c'est dire si l'accouchement a été difficile. Tout en laissant aux banques et aux assurances la possibilité d'offrir des contrats « ouverts », souscrits par les particuliers, la récente législation favorise les fonds dits « fermés », créés par une branche ou par une entreprise et gérés de façon paritaire par le patronat et les syndicats.

Pour ces fonds à l'italienne, l'adhésion reste volontaire de la part du salarié. Au moment de partir en retraite, il pourra choisir entre le versement d'une rente ou pour partie en rente et en capital. Enfin, la constitution du capital, déductible de l'impôt jusqu'à un certain seuil, est obtenue de trois façons : par une cotisation additionnelle du salarié retenue sur sa fiche de paie, par une somme du même montant a bondée par l'entreprise, ainsi que par une partie du TFR, ou trattamento di fine rapporto, littéralement le « traitement de fin de rapport ». Sorte d'épargne forcée sur les salaires, restituée au salarié, avec de faibles intérêts au moment où il quitte l'entreprise. C'est précisément le TFR qui s'est révélé une pomme de discorde avec le patronat. Car les PME tirent une bonne part de leur autofinancement de ce bas de laine. Inutile de dire qu'elles ont freiné le décollage de ces fonds de pension new-look. Le gouvernement italien a ouvert une porte de sortie, en juin dernier, permettant aux entreprises de transformer leur TFR en actions et aux salariés de verser ces actions sur un fonds de branche ou d'entreprise.

Une deuxième « jambe » un peu courte

Selon les derniers chiffres publiés par la Covip, la commission de vigilance sur les fonds de pension, une vingtaine de fonds de branche ont été créés, couvrant près de 370 000 salariés. L'un des plus dynamiques est celui de la chimie. Opérationnel depuis début 1998, Fonchim a déjà attiré 85 000 adhérents sur un potentiel de 200 000 personnes. La fédération patronale de la chimie, Federchimica, et les syndicats du secteur ont joué le jeu, organisant conjointement une grande campagne d'information. « Il faut construire la deuxième jambe du système de retraite », estime Luciano Scapolo, représentant au conseil d'administration de Fonchim, de la CISL, le deuxième syndicat italien. Autre fonds prometteur, le Cometa, de la branche de la mécanique et de la métallurgie. Six mois après son lancement, il affichait au printemps un total de 270 000 adhésions sur un public potentiel de 1,2 million de salariés. « Nous progressons au rythme de 10 000 adhérents par mois », indique Maurizio Agazzi, directeur de la gestion opérationnelle du Cometa.

Mais le développement de la capitalisation se heurte à plusieurs obstacles. « On ne peut pas improviser la culture de la retraite complémentaire. Il nous faudra rompre avec celle de l'État paternaliste », note Sergio Corbello, directeur de l'Assoprevidenza, une association qui regroupe 150 fonds de pension. Autre frein important, le niveau élevé des cotisations au régime de base. Enfin, le bonus escompté grâce aux fonds de pension devrait rester limité. Selon la Covip, un jeune qui commencerait à travailler aujourd'hui et cotiserait sans interruption à un fonds de pension, au maximum des plafonds prévus, bénéficierait, au moment de prendre sa retraite, d'un taux de remplacement de 70 %. Alors que le régime public lui servira, de toute manière, une pension égale à 60 % de son salaire. La « deuxième jambe » du système de retraite italien risquerait donc de rester bien courte. C'est pourquoi, pour donner un coup d'accélérateur au système, le gouvernement réfléchit au transfert automatique des futurs TFR aux fonds de pension. Tout en laissant aux salariés la liberté de refuser cette possibilité.

Auteur

  • Marie-Noëlle Terrisse