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Un climat social sous surveillance

Dossier | publié le : 01.11.2005 |

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Un climat social sous surveillance

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En dépit d'une conflictualité en baisse, le mécontentement des salariés attisé par la suppression des préretraites et l'évolution négative de certains indicateurs alimentent l'inquiétude des DRH. Et ils ont beau afficher de bonnes intentions en matière de développement durable, ils semblent à la peine pour faire face à cette situation.

L'optimisme de façade cache-t-il quelques inquiétudes quant à l'avenir ? Les indicateurs traditionnels qui fondent le climat social, la conflictualité, l'absentéisme ou les litiges devant les prud'hommes ne sont pourtant pas dans le rouge. Pour chacun d'entre eux, la majorité des DRH constate une évolution positive. Néanmoins, près des deux tiers des responsables RH indiquent que le suivi du climat social interne sera la priorité de leur politique de gestion du capital humain pour l'an prochain. Interrogés sur ce paradoxe apparent, certains évoquent la lassitude des salariés soumis à des injonctions paradoxales, comme l'obligation de s'impliquer davantage alors que l'entreprise recherche toujours plus de productivité. Situation qui peut se traduire par des réorganisations, des réductions de personnel, voire des fermetures de sites. D'autres avouent à demi-mot qu'une enquête de climat social permet de sensibiliser l'encadrement. Sachant que son équipe est régulièrement interrogée, un cadre fait plus attention à la qualité de son management.

Bien que, la peur du chômage aidant, une minorité de DRH s'attendent à une augmentation des conflits sociaux au cours des douze prochains mois, leur analyse du moral des troupes est partagée. Les trois quarts d'entre eux considèrent que les salariés perçoivent positivement leurs perspectives de carrière. Mais il s'agit là du seul point franchement encourageant. Seule une petite moitié des professionnels interrogés estiment que l'évolution des effectifs (53 %) et des rémunérations (54 %) jouent de manière favorable sur le climat au sein de leur entreprise. Alors qu'a contrario les efforts demandés aux salariés dans ces domaines continuent d'empoisonner la tâche de plus de 4 DRH sur 10. Et 54 % d'entre eux estiment que l'évolution des conditions et de la charge de travail ne satisfont pas leurs collaborateurs.

De même, cette appréciation mitigée ressort d'une analyse fine de certains autres indicateurs. Certes, les licenciements pour faute, les contentieux devant les prud'hommes ou encore les affaires de harcèlement sont en diminution dans la majorité des entreprises interrogées, mais la proportion des responsables RH constatant leur augmentation devient significative. 41 % des DRH font état d'une augmentation des litiges devant les prud'hommes, contre 27 % en 2004. Une petite moitié d'entre eux (43 %) révèle une augmentation des licenciements pour faute contre un sur cinq l'an dernier. Même évolution à la hausse pour les affaires de harcèlement moral (46 %, en hausse en 2005, contre 16 % en 2004) ou encore pour les cas d'incivilité : plus d'un tiers des DRH font état d'une augmentation cette année, contre seulement 13 % l'année dernière.

Une politique contractuelle atone

De l'avis des DRH, la perspective de devoir travailler plus longtemps (voir aussi page 74) recueille la palme du mécontentement. Avec, respectivement, 69 % et 72 % d'opinions négatives, l'arrêt des préretraites et l'éloignement du départ à la retraite sont dorénavant les moteurs de la dégradation du climat social. « C'est tellement vrai que certains quinquas en viennent à espérer le retour des mesures d'âge en cas de restructuration, estime Jacques Lauvergne, DRH d'Arcelor. Même si ce n'est pas l'optique de l'entreprise. » Un avis confirmé par une majorité de DRH (55 %), qui considère les restructurations comme un facteur plutôt propice à l'amélioration du climat social dans leur entreprise…

Face à cette situation, les responsables des ressources humaines ont-ils les moyens de réagir ? Oui, estime Gérard Hochapfel, DRH de SAP France. « Nous voulons signer un accord sur le droit syndical qui nous permettrait d'optimiser le dialogue social, mais pour le moment, nous n'avons plus de délégué syndical. » Sur l'ensemble du panel, la politique contractuelle s'est sensiblement ralentie en 2005. Particulièrement sur le temps et l'organisation du travail (43 % des DRH ont signé de tels accords contre… 87 % en 2004), ou sur le droit syndical et la représentation du personnel (29 % contre 62 % l'an dernier). Un quart des responsables de ressources humaines interrogés souhaitent, d'ailleurs, améliorer les relations avec les syndicats. De bonnes intentions qui se heurtent à la faiblesse syndicale. Dominique Franchot, DRH d'Eramet, fait un lien entre le manque d'implication des salariés et l'« inexistence des syndicats ». Pour sa part, René Maisonneuve, DRH de Thales, constate qu'on n'est plus confrontés aux « bonnes vieilles grèves qui, en crevant l'abcès, permettaient de trouver des solutions au malaise ».

L'enjeu des conditions de travail

Pour Hervé Hannebicque, le DRH d'Altran, comme d'ailleurs pour plus de 4 DRH sur 10, l'amélioration des conditions de travail est également incontournable. « On ne peut pas nier l'augmentation du stress ces dernières années », souligne-t-il. Arrivé en mars 2005 pour redéfinir la politique RH du groupe, le DRH d'Altran met également en avant ses ambitions en matière de développement durable et notamment les actions de la Fondation Altran pour l'aide aux handicapés et le respect de l'environnement. « Une telle implication de l'entreprise modifie son image auprès des salariés », estime-t-il. Un positionnement approuvé par un certain nombre de ses homologues (41 %), qui rangent les conditions de travail parmi leurs priorités en matière de développement durable pour l'année à venir. 40 % d'entre eux citent également le chantier de l'égalité hommes-femmes. Et une proportion équivalente évoque également la déontologie et la création d'une charte d'entreprise comme mesures prioritaires. À l'instar de beaucoup de groupes internationaux, Arcelor s'apprête ainsi à présenter une charte éthique à l'ensemble de ses salariés dans le monde. Mais la diffusion d'un tel outil crée des obligations pour l'entreprise et la DRH. Selon Christian Brière de la Hosseraye, ancien DRH de Thomson et directeur de Crossknowledge, « la création d'un tel document est à double tranchant. Les intentions présentées par écrit doivent ensuite se concrétiser dans la gestion des ressources humaines. Car les salariés en ont ras-le-bol de vivre une situation qui ne correspond pas au discours de l'entreprise ».

Que deviennent les bonnes intentions affichées ? On ne peut s'empêcher de noter que l'amélioration des conditions de travail n'est citée qu'en avant-dernière position par le panel de professionnels interrogés, avec 6 % de réponses, parmi les axes prioritaires d'amélioration de la politique RH. En contradiction flagrante avec les objectifs en matière de développement durable. Un hiatus qui illustre la position difficile des responsables RH, coincés entre la nécessité de se mettre au service du business et des résultats financiers et celle de renforcer la gestion du « capital humain » de l'entreprise.

72 % des DRH estiment que l'éloignement du départ à la retraite est mal perçu par les salariés. Quelle est votre appréciation du climat au sein de votre entreprise concernant

mais en revanche…

75 % des DRH estiment que les perspectives de carrière sont un moteur pour les salariés