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Le bloc-notes

Saut d'obstacles

Le bloc-notes | publié le : 01.10.2005 | Raymond Soubie

Rentrée sociale

Il est curieux de constater combien les mythes ont la vie dure. Ainsi, celui de la rentrée sociale : chaque année on l'annonce agitée, lourde de conflits et menaçante pour le pouvoir en place et, généralement, on constate ex post qu'il n'en a rien été. Bref, la météorologie sociale est un art difficile. Tout au plus peut-on dresser un tableau imparfait des menaces potentielles et tenter de décrypter le jeu des acteurs. Tentons donc cet exercice pour cette rentrée 2005.

Les Français sont manifestement moroses, mécontents du chômage et de leur pouvoir d'achat. L'heure est au désenchantement, au rejet des élites, au repli sur soi. Le climat n'est propice ni à la croissance économique, ni à la conduite de grands desseins, ni à la confiance en l'avenir. Mais, pour autant, il ne semble pas que des risques bien identifiés de conflits existent. Le passé a montré que les crises éclatent quand se rejoignent un mécontentement profond et un rejet des réformes, en particulier dans le secteur public.

La manifestation du 4 octobre ne constitue pas par elle-même un élément déterminant. De telles manifestations d'une journée, accompagnées de débrayages dans le secteur public, ont été fréquentes dans le passé et apparaissent souvent comme un exutoire aux mécontentements. Les syndicats eux-mêmes ont du mal, au-delà du discours traditionnel de mobilisation, à appréhender jusqu'où veut et peut aller leur « base ».

L'échéance Unedic

La convention Unedic vient à expiration à la fin de cette année. Cette renégociation va être l'événement dominant du dialogue social national dans les prochaines semaines, d'autant que le contexte est difficile. Le déficit cumulé dépasse 13 milliards d'euros, le déficit d'exploitation annuel est supérieur à 3 milliards. L'État, lui-même impécunieux, peut difficilement contribuer. Les syndicats, à la suite des affaires des intermittents du spectacle et de quelques autres, ont du mal à accepter des compromis, et le Medef ne peut inaugurer le nouveau règne par un échec, c'est-à-dire des coûts supplémentaires pour les entreprises sans contreparties.

Deux scénarios sont possibles dont aucun n'est vraiment exaltant. Le premier serait le constat de l'impossibilité d'un accord, l'État devant alors intervenir : le pire des scénarios pour les partenaires sociaux qui montreraient leur impuissance et pour l'État qui serait bien embarrassé. Le second scénario serait celui d'un accord sans imagination et sans réelle portée sur la base d'un compromis modeste : « cantonnement » de la dette financée par emprunt et laissée au remboursement des générations futures, hausse des cotisations, dégressivité symbolique des allocations de chômage.

Pour aller plus loin, il faudrait profiter de cette échéance pour aborder, sinon traiter, deux vrais sujets. Le premier est celui d'une activation plus forte d'une partie des dépenses d'assurance chômage, pour participer au financement du reclassement des demandeurs d'emploi, l'Unedic jouant son rôle d'assureur appréciant l'efficacité des divers modes d'intervention, public ou partenariats public-privé. Le second concerne les rapports et l'éventuelle fusion entre l'Unedic et l'ANPE. On sait que des projets en ce sens circulent. Si l'État veut les mener à bien, il aurait intérêt à questionner à leur sujet, à partir de schémas précis, les partenaires sociaux à l'orée des négociations qui vont s'ouvrir.

La ronde

La Cour des comptes vient de publier un rapport bien intéressant sur la Sécurité sociale. Il pose de bonnes questions, même si, au fond, il n'apporte pas d'élément nouveau à la connaissance de la situation. Rappelons que le déficit annuel d'exploitation des trois branches est supérieur à 13 milliards d'euros à l'heure où les autres déficits publics sont ce que nous savons, que partout le poids de la dette augmente, laissant la charge aux générations futures, pour des dépenses qui ne sont pas des investissements sur l'avenir. En réalité, les deux réformes intervenues sur les retraites en 2003 et l'assurance maladie l'an passé ont été utiles. La première a permis de régler à l'échéance de quinze ans environ 40 % du problème. La seconde a produit quelques premiers effets sur l'infléchissement des dépenses d'assurance maladie. Mais elles restent cruellement insuffisantes, alors que les Français ne semblent pas prêts à accepter d'autres mesures de rigueur. Le décalage entre les promesses électorales pour 2007 et les contraintes auxquelles le vainqueur sera soumis risque d'être plus grand qu'il ne l'a jamais été.

Auteur

  • Raymond Soubie