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Un itinéraire de syndicaliste

Livres | publié le : 01.02.2005 | H. G.

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Un itinéraire de syndicaliste

Crédit photo H. G.

Ma voix ouvrière Bernard Thibault Entretiens avec Pierre-Marie Thiaville et Marcel Trillat. 228 pages, 18 euros.

Bien qu'il dirige la première confédération syndicale depuis 1999 et qu'il ait été le principal animateur du plus important mouvement social des quinze dernières années, Bernard Thibault reste un inconnu, sinon une énigme. Entre sa volonté affichée de moderniser le fonctionnement et la ligne revendicative de la CGT et son souci de maintenir un consensus à l'intérieur de la centrale, le successeur de Louis Viannet donne souvent l'impression de se refuser à choisir un cap, encore plus à prendre des risques personnels.

Le premier intérêt de ce livre d'entretiens est de fournir des clés à ce comportement parfois déroutant. Si l'on en croit l'intéressé lui-même, son ascension s'est faite presque à son insu. Le jeune banlieusard, passionné de handball et de courses de Solex, se retrouve en apprentissage au centre de Noisy-le-Sec de la SNCF, lieu privilégié de recrutement pour la CGT, à laquelle il adhère en 1977, année de ses 18 ans. L'étroit contrôle du parti communiste sur la CGT de l'époque ne le frappe pas : « Ma grille d'engagement se limitait à l'entreprise. Je n'étais pas du tout branché sur les enjeux nationaux. » Bernard Thibault ne rejoindra le PC qu'en 1987, lorsqu'il prend des fonctions importantes à la Fédération des transports. Aujourd'hui, il reconnaît, avec des précautions de langage, que cela a « fait partie des paramètres qui ont compté » dans sa carrière syndicale.

Ce retour sur ces années, où des débats intenses opposent les « durs » de la CGT à ceux qui défendent une ligne d'ouverture à l'égard de la gauche gestionnaire, le montre plus proche des conceptions accommodantes d'un Georges Séguy que du point de vue orthodoxe d'un Henri Krasucki. Les débats sur le rôle de courroie de transmission du syndicat par rapport au parti et les questions de doctrine semblent avoir glissé sur Bernard Thibault « comme la pluie sur une toile cirée », selon l'expression de Séguy. L'homme est prudent, d'une prudence nécessaire pour surmonter les pièges d'un système politicosyndical aussi codé, mais peut-être contre-productive une fois parvenu au sommet.

Le deuxième grand centre d'intérêt de l'ouvrage est celui de vivre l'histoire sociale de la dernière décennie au poste de commandes du premier syndicat français. Exaltation des luttes à travers le récit de la bataille de 1995 ; défense timide et critique des 35 heures ; critique violente et personnalisée de l'attitude de François Chérèque, le leader de la CFDT, lors de la réforme des retraites de 2003. Le cocktail est assez révélateur des partis pris du militant cégétiste des années 2000. En revanche, on reste sur sa faim quant aux objectifs stratégiques d'un secrétaire général si attaché à se présenter comme un « suiveur meneur ».

Auteur

  • H. G.