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Vie des entreprises

Le « oui mais » des DRH et des secrétaires de CE

Vie des entreprises | JOURNAL DE LA FORMATION | publié le : 01.11.2004 | Anne-Cécile Geoffroy

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Diriez-vous que cette loi sur la formation tout au long de la vie est ? (en % des personnes interrogées)

Crédit photo Anne-Cécile Geoffroy

Si DRH et secrétaires de CE plébiscitent largement l'esprit de la récente réforme de la formation professionnelle, notre sondage exclusif « Liaisons sociales »-groupe Alpha relève que, sur le terrain, ils sont loin d'être préparés à sa mise en œvre.

Belle unanimité autour de la formation. Issue de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 20 septembre 2003 signé par l'ensemble des partenaires sociaux (une première !), la loi du 4 mai 2004 sur la formation tout au long de la vie remporte également les suffrages conjoints des DRH et des représentants du personnel. En effet, selon le sondage Liaisons sociales-groupe Alpha, 85 % des DRH et 93 % des secrétaires de CE jugent que la réforme est une bonne chose.

Par ailleurs, une très large majorité attend de cette loi des effets positifs sur les perspectives d'évolution professionnelle des salariés (91 % des DRH et 89 % des secrétaires de CE), leur employabilité (DRH : 89 % ; CE : 83 %), la motivation au travail (DRH : 82 % ; CE : 86 %), les conditions de travail (DRH : 76 % ; CE : 78 %), et enfin la productivité des salariés (DRH : 73 % ; CE : 86 %).

Manque de préparation

« Derrière cet engouement se cache l'espoir que la réforme va corriger les défauts de la loi de 1970. Notamment parce qu'elle concerne l'ensemble des salariés et qu'enfin les entreprises vont bénéficier des outils adéquats pour mettre en place un véritable management par les compétences », analyse Gilbert Hyvernat, conseiller auprès de Pierre Ferracci, P-DG du groupe Alpha. Point d'orgue du nouveau paysage de la formation tout au long de la vie : la création du droit individuel à la formation (DIF). Pour 83 % des DRH et trois quarts des secrétaires de CE, le nouveau DIF constitue le fait marquant de la loi, suivi, de loin, par l'augmentation des budgets de formation, la nouvelle organisation du plan de formation en trois parties (adaptation au poste de travail, évolution de l'emploi et maintien au poste et enfin développement des compétences) et la création des contrats et périodes de professionnalisation.

Par ailleurs, alors que la formation était restée un champ du dialogue social déserté par les syndicats, 68 % des secrétaires de CE comme des DRH ont compris que cette réforme sera l'occasion de renforcer le dialogue social dans l'entreprise. En revanche, les opinions sont partagées sur le rôle du CE en matière de formation. Environ la moitié des DRH (52 %) et des secrétaires de CE (47 %) ne pensent pas que le rôle du comité d'entreprise sera modifié. Reste que la meilleure des lois pourrait tomber dans l'oubli, rester lettre morte, voire faire office de vitrine sociale pour quelques grands groupes si les acteurs de terrain ne s'en emparent pas réellement. Et, à ce sujet, le sondage n'est pas totalement rassurant, au moins sur trois points.

Tout d'abord, les DRH comme les secrétaires de CE se sont jusqu'à maintenant peu formés pour comprendre et préparer la mise en œuvre de la loi. Seul un petit tiers des DRH a bénéficié d'une formation. Du côté des secrétaires de comité d'entreprise, on frise la désaffection. Selon notre sondage, seulement 9 % d'entre eux se sont penchés sérieusement sur la réforme. Par ailleurs, 51 % des DRH et 57 % des secrétaires de CE qui ne se sont pas formés ne comptent pas non plus s'y atteler dans les prochains mois. Quant à ceux qui affirment vouloir se former, la plupart (48 % des DRH et 45 % des secrétaires de CE) reportent l'échéance à la fin de l'année et, pour 47 % des secrétaires de CE, à l'année 2005.

Par ailleurs, le sondage souligne l'appréhension des DRH et responsables de formation face aux nouveaux textes. Près de deux tiers d'entre eux (63 %) jugent la loi complexe et pointent plusieurs éléments qui leur posent problème. En tête de leurs inquiétudes : la complexité des trois catégories du plan de formation sur lequel ils sont en train de plancher (47 % des DRH), suivie de l'organisation des formations dispensées hors temps de travail (44 % des DRH ; 61 % des secrétaires de CE) et des délais de mise en œuvre (38 % des DRH ; 25 % des CE).

Des négociations bien timides

Si les acteurs de la formation se déclarent inquiets des délais de mise en œuvre, une minorité d'entreprises a pour le moment commencé à négocier autour de la réforme. À la question : « Une négociation est-elle en cours dans votre entreprise ? » 84 % des DRH et 77 % des secrétaires de CE ont répondu par la négative. Pis, 47 % des DRH et 60 % des secrétaires de CE soulignent qu'aucune négociation n'est prévue par ailleurs. Quant aux DRH et secrétaires de CE qui déclarent qu'une négociation est prévue (respectivement 47 % et 33 %), la grande majorité estime qu'elle démarrera d'ici à la fin de l'année ou l'an prochain (82 % des DRH ; 79 % des CE).

Première explication à cette mise en route poussive de la réforme dans les entreprises, l'attente des accords de branche qui ont défriché le terrain et fixé un cadre à l'application de la nouvelle loi. Une trentaine d'accords ont d'ores et déjà été signés depuis juillet dernier. « D'autre part, les DRH comme les élus de comité d'entreprise focalisent leur attention sur des difficultés plus immédiates comme les délocalisations, les restructurations… La formation risque une fois de plus de passer en arrière-plan, estime Gilbert Hyvernat. C'est une erreur, car cette loi possède l'avantage de pointer du doigt le lien entre l'adaptation des salariés à leur poste et la pérennité de l'emploi. La formation et le développement des compétences sont des champs clés pour l'avenir des entreprises. » Reste enfin à convaincre le troisième acteur de cette nouvelle réforme : les salariés eux-mêmes, aujourd'hui nombreux – notamment les moins qualifiés d'entre eux – à avoir peu d'appétence pour la formation.

40 % des DRH et 75 % des secrétaires de CE citent en premier le DIF parmi les éléments les plus marquants de la loi sur la formation

* Sondage réalisé début septembre par l'institut CSA auprès d'un échantillon représentatif de 400 DRH et responsables de formation et de 400 secrétaires de CE d'entreprises de plus de 200 salariés.

Auteur

  • Anne-Cécile Geoffroy

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