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Le Ciffop conserve la tête

Dossier | publié le : 01.09.2004 | Sylvia Di Pasquale

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Le Ciffop conserve la tête

Crédit photo Sylvia Di Pasquale

Le palmarès 2004 maintient ses poids lourds mais intègre aussi trois nouveaux cursus. Tous visent à former des professionnels éclairés plutôt que des techniciens, sans pour autant négliger la gestion de la paie ni le droit du travail.

Cela ressemble à une bande-annonce de téléréalité : 105 répertoriées, 39 sélectionnées, 10 finalistes et une gagnante. Mais là s'arrête toute comparaison entre les médiatiques cérémonies de remise de prix et le monde des ressources humaines. Si, pour la deuxième fois consécutive, après la première édition du palmarès des formations de troisième cycle aux ressources humaines réalisé par Liaisons sociales Magazine en septembre 2001, Paris II (Ciffop) remporte la palme, c'est le résultat de croisements de critères convergents et objectifs, d'interviews de responsables de toutes les formations répertoriées et du décorticage impitoyable des programmes de cours. Sur les dix premiers du classement, trois (Paris I, Reims et Rennes) n'étaient pas présents dans le top 10 de 2001. Au-delà des progrès réalisés par les uns ou les autres, l'évolution de nos critères de sélection explique cette promotion. Nous avons, cette année, déclassé des formations qui, comme celles de l'ENS Cachan ou de l'IGS, respectivement 2e et 10e du top 10, font assurer plus de 70 % de leurs enseignements par des professionnels extérieurs, considérant qu'une formation équilibrée doit comprendre suffisamment d'apports théoriques dispensés par des enseignants permanents. En matière de sélectivité, nous avons distingué des formations pour lesquelles l'entretien préalable est particulièrement éliminatoire. Enfin, nous avons sélectionné des programmes qui forment non pas des techniciens des ressources humaines, mais plutôt des professionnels éclairés de la fonction.

Tantôt humanistes, tantôt gestionnaires

Bien entendu, une bonne formation reste celle qui parvient à placer ses étudiants dans les meilleures entreprises et aux postes les plus élevés. Pour le vérifier, il faudrait disposer d'enquêtes d'insertion fiables, ce qui fait défaut dans 80 % des formations RH de troisième cycle. Leurs responsables ne font pas l'effort de contacter tous leurs anciens pour connaître le poste, le contrat et le salaire qu'ils décrochent après le diplôme. Restent d'autres critères pour distinguer les meilleurs. Car les formations sont loin d'aller dans le même sens. Et les diplômés qui en sortent sont loin de se ressembler. Tantôt humanistes, tantôt gestionnaires, leur identité est souvent façonnée par la personnalité du responsable du cursus. Alors que l'un d'eux indique qu'il fait visionner The Big One de Michael Moore à ses étudiants, la plaquette de l'ESCP-EAP rappelle que « les questions de ressources humaines sont toujours examinées d'un point de vue de direction générale ».

Cette mosaïque d'enseignements reflète les différentes manières d'appréhender le marché du travail. Les guéguerres entre métiers « opérationnels » et « supports » au sein d'une même entreprise n'ont pas échappé aux responsables pédagogiques. Pour caricaturer : les premiers gagnent de l'argent alors que les seconds se contentent d'en dépenser. Du coup, certaines formations tentent de faire des DRH en herbe de véritables business partners. Les huit premières formations de notre palmarès ont toutes intégré cette dimension. But avoué : façonner des DRH en mesure de se battre d'égal à égal avec leurs collègues du comité de direction, qu'ils soient supports ou opérationnels. Jean-Emmanuel Ray, du DESS Ressources humaines de Paris I, envisage ce combat assez frontalement : « Les cours de finances et de comptabilité permettent à mes étudiants confrontés à un plan social de ne pas se laisser balader par la présentation qui en est faite par le directeur financier. »

Une bonne moitié des formations en GRH s'y sont mises, parmi lesquelles le mastère spécialisé de l'ESCP-EAP. « Aujourd'hui, je suis capable de discuter avec plusieurs managers de différents services », confirme Paul-François Laplaud, diplômé du MS Management des hommes et des organisations de la grande école parisienne. C'est aussi ce que James Labbé, responsable de la GRH d'EDF Ouest-Armorique et parrain de trois étudiants du master GRH de Rennes I, transmet à ses filleuls : « Sur le terrain, je leur démontre comment se situer en permanence entre l'économique et le social. C'est ce que j'ai vendu à mes patrons quand ils m'ont embauché. »

Formés pour des postes à cinq ans

Mais un programme de DESS ou de master n'est pas extensible. Alors, à Aix-Marseille III, Olivier Roques a tranché : « On a enlevé des cours techniques pour renforcer la dimension business partner. Il vaut mieux que nos étudiants parlent le même langage que les autres services de l'entreprise, plutôt qu'ils soient incollables sur un logiciel. » Certes, cette vision globale de la fonction RH, à l'honneur dans les formations de pointe, trouve sa limite dans la taille des entreprises où les étudiants sont recrutés. François Geuze, enseignant au master GRH de Lille I, prévient : « En dessous d'un effectif de 500 personnes, nos diplômés formés à la GRH sont sous-employés. » Et, actuellement, la surqualification est un gage d'employabilité. « Nous les formons pour dans cinq ans, ajoute-t-il, pour d'autres postes plus conformes à leur calibre. »

Ces troisièmes cycles de haut vol doivent produire des « athlètes » complets, capables d'accéder aux comités de direction. Admis dans le Saint des Saints, les DRH doivent prouver la valeur ajoutée de leurs équipes. Les étudiants s'entraînent donc à l'utilisation d'outils permettant de mesurer le retour sur investissement de leurs actions. Au master de Lille I, on s'initie au scorecarding RH, une technique d'analyse de la performance par rapport à des objectifs de business. Au Ciffop, une session de vingt heures baptisée Langage de l'expert RH forme aux statistiques et analyses de données appliquées aux RH. à Reims, les étudiants du DESS Gestion stratégique des RH et de la qualité apprennent à installer des procédures d'autocontrôle pour piloter la qualité totale dans l'entreprise.

Les troisièmes cycles RH n'en négligent pas pour autant le basique, à savoir la gestion de la paie. à Aix-Marseille III, Olivier Roques constate que « les entreprises demandent aux étudiants de connaître les bons logiciels ». « Nous ne sommes pas là pour former des techniciens de la paie, mais on sait que cela représente 80 % du travail dans les PME », renchérit François Geuze, de Lille I. Mais si la paie est le cœur du métier, le droit du travail est certainement son âme. Et plusieurs formations classées en tête du palmarès lui font la part belle. Au Ciffop, les étudiants planchent durant cent quarante heures sur les « Tables de la Loi ». à Dijon, le volume est moindre, mais le master accueille un inspecteur du travail. À l'opposé, François Geuze, à Lille I, se contente de trente heures de droit pour « apprendre aux étudiants à travailler avec des experts ».

Des camelots ou des pédagogues

Sans être dictés par les besoins de l'entreprise, les programmes des troisièmes cycles RH sont néanmoins largement inspirés par eux. La place des professionnels fait d'ailleurs débat. Si l'ensemble des 105 formations RH de troisième cycle fait appel à des intervenants extérieurs, certains sont plus réticents. Car, entre les DRH en poste, les consultants, les inspecteurs du travail, les juristes et autres syndicalistes, le choix est vaste et la tentation est grande de confier aux professionnels les rênes du cursus. « Si nous voulons former des gens capables de réfléchir par eux-mêmes, il faut aussi une approche théorique suffisante », estiment David Jacotot et Samuel Mercier, de l'université de Bourgogne.

Si l'apport des DRH est indispensable aux étudiants, soit au cours des stages en entreprise, soit lors de résolutions de cas pratiques, celui des consultants est plus controversé. Martine Moule, de Reims, sélectionne sévèrement ses intervenants. Certains DESS les font évaluer par les élèves eux-mêmes. Toutefois, ce système montre ses limites, car les présentations de ces pros multipliant les effets vidéo ou informatiques sont plus appréciées qu'un cours traditionnel au tableau noir. Il n'empêche que cet appel à l'extérieur est tentant. À l'IGS, dont les cours sont animés à 80 % par des intervenants extérieurs, c'est donnant-donnant. « On ne peut pas payer les consultants à leur tarif de conseil, alors on signe des partenariats pédagogiques exclusifs avec certains, explique Gilles Faure, directeur du troisième cycle parisien Management et développement des RH. Nous savons que c'est un élément de promotion pour eux, mais on contrôle tous les supports de cours avant diffusion. »

Idéalistes s'abstenir

Autre critère distinctif, toutes les formations répertoriées n'opèrent pas la même sélection. Pour entrer au Celsa, il faut passer le barrage d'un concours d'entrée. Paris I a un faible pour les mentions. Aix-Marseille III exige des stages en entreprise. Bordeaux IV craque pour les candidats capables de lire un bilan. À l'ESG, on assume le « tamisage par l'argent ». À Marseille, Olivier Roques se déclare « ouvert à un discours syndicalisant, à condition qu'il ne soit pas stéréotypé. À l'IGS, « les idéalistes de la fonction RH, les psychologiquement fragiles » sont prévenus des risques qu'ils courent. Des profils très différents, à l'image des postes offerts dans la fonction RH.

Pas de recette miracle pour être admis dans l'un des 10 troisièmes cycles décrits ci-contre. La classique double procédure (dossier et entretien) est parfois renforcée par un concours d'entrée. C'est le cas au Celsa.

D'autres exigent un prémémoire.

Celui de Paris I fait 30 pages, histoire de décourager les moins motivés. Ce mémo est plus léger à Paris II, Grenoble II et Paris IX, alors que l'université de Bourgogne impose un questionnaire musclé. Tous les moyens sont bons pour écrémer le flot de candidats afin qu'ils soient moins d'une centaine à passer l'entretien. Tous les responsables pédagogiques apprécient une mention « bien » en maîtrise.

Mais cela ne suffit pas. Avoir effectué des stages en RH est aujourd'hui indispensable pour postuler en troisième cycle. La personnalité du candidat et la pertinence de son projet professionnel sont décisives lors de l'entretien. Celui-ci peut durer de dix à trente minutes, face à un jury de 2 ou 3 personnes (un enseignant, un DRH et parfois un psychologue) qui cherchent à évaluer les prédispositions du candidat pour la fonction RH.

Deux des formations figurant au palmarès organisent même des tests de mise en situation (Ciffop et Reims). Pour l'heure, seules 4 des formations (celles d'Aix-Marseille III, ENS Cachan, Reims et Paris V) vérifient le niveau de langue de leurs candidats. Un examen qui deviendra systématique l'an prochain puisque la procédure de sélection des masters l'impose. Cette année, 4 formations (celles de Paris IV, Aix-Marseille III, Reims et Grenoble II) font leur apparition au palmarès.

LES 10 FORMATIONS LES PLUS PROFESSIONNALISÉES

Les 10 formations arrivées en tête privilégient une connaissance empirique de la fonction RH en entreprise à travers stages, rencontres directes avec les professionnels et partenariats avec les entreprises. Nous avons primé les formations en alternance (celles de Paris II, Paris IX, ENS Cachan, UCO) ou celles dont la durée de stage est supérieure ou égale à cinq mois, car plus cette durée est longue, plus le stagiaire a de chances de décrocher une mission consistante. La possibilité d'alternance est un atout supplémentaire, la confrontation entre théorie et pratique étant incessante. Pour figurer dans ce palmarès, le nombre d'heures assurées par des professionnels extérieurs intervenant régulièrement auprès des étudiants doit être supérieur à 50 %. Quand il dépasse 70 %, les formations sont pénalisées, car un nombre excessif de praticiens extérieurs risque de limiter l'apport de connaissances théoriques. Mais cette seule raison n'empêche pas ENS Cachan, Paris IV, IGS et Essec-Isfogep de figurer au palmarès. Enfin, la prime est donnée aux formations qui incitent au contact très direct entre les entreprises et les étudiants : tutorat d'étudiants par des DRH en poste (Ciffop, IGS, Rennes I), visites d'entreprises (IGS, UCO, Tours, Rennes I), témoignages d'opérationnels (toutes les formations), résolution de cas en présence de DRH (Lille I, IGS, Essec-Isfogep, UCO).

Cette année, trois formations (Paris IV, Paris IX et Rennes I) font leur entrée dans le top 10.

Malgré quatre arrivées dans ce palmarès (Rennes I, Montpellier III et I, ESC Grenoble, Aix-Marseille III), il serait faux de prétendre que les formations RH françaises se préoccupent massivement de l'international.

Depuis notre enquête précédente, seules quelques formations s'y sont ouvertes ou ont accentué leurs efforts. Mais le piètre niveau de langue de la majorité des étudiants arrivant en troisième cycle ne facilite pas les opérations. Reste que les progrès seront inévitables puisque le grade de master ne pourra être délivré qu'avec un certain score au Toeic.

Dans ce palmarès, quatre des dix sélectionnés proposent une formation dont l'intitulé comporte le mot « international » ou « européen » (université d'Angers, ENS Cachan, ESC Clermont, Grenoble II). Notre sélection 2004 s'est d'abord appuyée sur l'étude de la pratique de l'anglais. Mais elle peut revêtir deux formes : soit des cours classiques de langue, soit des enseignements RH donnés dans cette langue. Seule Angers impose la pratique de deux langues étrangères. Deuxième critère d'importance : les stages, séminaires ou voyages d'étude à l'étranger qui prouvent une ouverture de la formation sur l'étranger.

Celles qui organisent un voyage d'étude chaque année ont été avantagées (ENS Cachan, Ciffop, Montpellier III et I, ESC Clermont et Grenoble II). Les formations proposant des contenus de cours liés à l'international et des interventions d'experts et de DRH habitués à travailler à l'international sont également favorisées.

LES 10 FORMATIONS LES PLUS ACCESSIBLES AUX SALARIÉS

Il faut comparer des troisièmes cycles comparables. Pour cette raison, nous excluons désormais les troisièmes cycles uniquement accessibles par la voie de la formation continue. La liste ci-dessous* répertorie les principaux. Dans ce palmarès n'apparaissent donc que les 10 formations initiales les plus compatibles avec la poursuite d'une vie professionnelle. Au moins la moitié des places sont accessibles aux salariés en activité. Et, à l'exception de Lille I et de l'IGS, elles acceptent toutes des salariés non spécialistes des RH. Six d'entre elles, dont les trois premières du classement, ont séparé les deux promotions, initiale et continue, ce qui leur permet d'offrir plus d'une vingtaine de places aux salariés en activité (Bordeaux IV, Tours, Rennes I, Lyon III, Poitiers, IGS).

Trois autres maintiennent des promos « mixtes ». Les responsables pédagogiques estimant que ces échanges sont bénéfiques aux uns comme aux autres. Une seule (Metz) propose les deux formules, l'une réservée à la formation continue, l'autre mixte.

Toutes les formations figurant dans ce classement ont prévu un aménagement des cours : le week-end ou en soirée, séminaires bimensuels regroupés sur plusieurs jours, étalement du cursus sur deux ans, etc.

Enfin, dernier critère essentiel, toutes ces formations pratiquent la validation des acquis de l'expérience. Si celle instaurée en 1985 est assez courante (la VAP, qui dispense des titres ou diplômes requis pour entrer dans un cursus de formation), la VAE, instaurée en 2002, n'est pas du goût de tous les responsables pédagogiques, qui ont la désagréable impression de brader leur diplôme. Par conséquent, il faut savoir cibler les formations qui pratiquent déjà la VAE new-look. Ce sont celles qui considèrent que l'université n'est pas la seule détentrice des savoirs.

Et que, dans sa partie, l'entreprise peut aussi s'avérer formatrice.

Les 10 meilleures formations initiales aux ressources humaines

* Principales formations uniquement accessibles en formation continue :

Master Gestion des ressources humaines de l'université de Caen, mastère spécialisé en management des ressources humaines du Cesi, DESS Administration et gestion du personnel du Cnam, chaire fonction personnel, mastère spécialisé Responsable des ressources humaines de l'ESC Toulouse, mastère spécialisé en management des ressources humaines de l'Essec, mastère spécialisé en management stratégique des ressources humaines de HEC, DESS Management avancé des ressources humaines et de la relation d'emploi de Paris I (IAE), 3e cycle Master in european human ressources management de Reims Management School.

Auteur

  • Sylvia Di Pasquale

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