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Idées

Retraites : halte à la double peine pour les femmes !

Idées | Livres | publié le : 01.06.2023 | Lydie Colders

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Retraites : halte à la double peine pour les femmes !

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Dans « L’enjeu féministe des retraites », la chercheuse Christiane Marty dresse un état des lieux éclairant des inégalités de pensions qui touchent les femmes, grandes perdantes des réformes néolibérales.

La réforme « injuste » des retraites est aussi une lutte féministe. Quelle que soit la justification avancée, le recul de l’âge à 64 ans et l’augmentation de la durée de la cotisation marquent une « régression historique », qui touchera « plus durement les personnes modestes […], celles aux carrières courtes et hachées ». En particulier les femmes, qui cotisent moins longtemps et s’interrompent pour les enfants. Dans cet essai féministe et engagé, la chercheuse Christiane Marty, chargée de la question du genre à Attac et spécialiste des retraites, fustige la réforme « Borne-Macron ». Elle analyse avec rigueur « trente ans de logique néolibérale » des réformes des retraites, synonymes d’inégalités entre femmes et hommes. De celle de Balladur en 1993 au projet de retraite à points en 2019, son panorama technique illustre le courant visant à réduire le niveau des pensions, dans les modes de calcul, le recul de l’âge légal ou les décotes, y compris des régimes complémentaires. La retraite reste le miroir grossissant des inégalités salariales, rappelle l’autrice. Et les faits sont têtus : « Le salaire des femmes reste inférieur en moyenne de 22 % à celui des hommes. » Elles sont aussi davantage touchées par le temps partiel. Résultat : en 2020, avec en moyenne 1 931 euros brut de pension pour les hommes, contre 1 154 euros pour les femmes, « la pension des hommes est supérieure de 67 % à celle des femmes » et cet écart « n’évolue guère depuis environ huit ans », souligne-t-elle. Pour éviter de subir une décote, 19 % des femmes, contre 10 % des hommes, attendent 67 ans pour liquider leur retraite. Quant aux dispositifs de solidarité retraite et autres avantages familiaux, ils ne corrigent pas les inégalités entre femmes et hommes, montre Christiane Marty. Le système les amplifierait plutôt…

Un « objectif » d’emploi pour les femmes

À côté de ce constat éclairant, la spécialiste émet des pistes de réflexion pour diminuer ces inégalités, suggérant de supprimer une décote « injuste » ou de refondre les avantages familiaux. Idem dans le calcul des pensions : il serait « très positif de revenir aux dix meilleures années » (et non 25 ans comme aujourd’hui) pour relever les pensions. Agir en amont pour améliorer l’emploi féminin est bien sûr indispensable. Or, si l’égalité salariale est bien intégrée par les syndicats, ces derniers ne vont pas assez loin, pointe Christiane Marty. Par exemple, « le faible taux d’activité des femmes ou le fait qu’elles soient prépondérantes dans l’emploi à temps partiel ne sont que rarement critiqués ». Le débat explosif sur le recul de l’âge à 64 ans se concentre sur le taux d’emploi des seniors. Mais pourquoi ne pas plutôt prioriser « l’emploi des femmes en tant qu’objectif ? », questionne l’autrice. La France, rappelle cette militante, est en queue de peloton en matière de taux d’emploi des femmes parmi les pays de l’OCDE. Un fait ignoré par les gouvernements…

« L’enjeu féministe des retraites »,

Christiane Marty, Éd. La Dispute, 216 pages, 13 euros.

Auteur

  • Lydie Colders