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Qualité de travail post-Covid : la plus-value de l’architecte

À la une | publié le : 01.06.2023 | Irène Lopez

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Qualité de travail post-Covid : la plus-value de l’architecte

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Contrairement aux secteurs traditionnels de l’hospitalité que sont l’hôtellerie ou la restauration, l’architecte est encore trop peu associé au design et à la conception des environnements de travail. Il est pourtant un partenaire incontournable.

L’aménagement des espaces de travail est un enjeu d’actualité. D’après le baromètre CSA Parella 2022, « Locaux et espaces de travail : un enjeu RH de recrutement et de fidélisation », dirigeants et collaborateurs s’accordent à plus de 80 % sur le rôle positif que joue l’aménagement des espaces de travail sur le bien-être et la productivité dans l’entreprise.

Pour rimer avec bien-être, même le vocabulaire a changé. Luc Lacortiglia, fondateur associé de l’agence T3 Architecture donne une explication de texte : « Nous voyons nos clients comme des hôtes soucieux de transmettre leurs valeurs et d’offrir à leurs équipes l’expérience la plus gratifiante. C’est, selon nous, le sens profond de ce qui est dénommé aujourd’hui hospitalité. Un dirigeant doit pouvoir montrer qu’il a une attention pour chacun et qu’il met tout en œuvre pour que chaque collaborateur se sente chez lui dans les locaux de l’entreprise. »

C’est pourquoi, lorsque ces équipes travaillent sur le zoning (analyse de l’espace) d’un projet, elles emploient la métaphore du « foyer » plutôt que celle du « quartier » plus généralement utilisée. Chez T3 Architecture, le quartier est toujours tourné vers la vie publique, il est dynamique mais il offre trop de distractions et n’est pas, en fin de compte, un environnement propice à la réflexion et à la concentration. L’espace domestique, de son côté, est à la fois moins spécialisé et plus exclusif. L’architecte ajoute : « Nous réservons les honneurs de nos foyers à nos invités les plus prestigieux. C’est le signe de distinction par excellence. Nous pouvons alors nous installer en petit comité dans le bureau ou avoir de longues conversations animées au salon. Selon l’humeur, nous pouvons aussi profiter de la douceur sur la terrasse ou avoir une conversation informelle dans le couloir de la cuisine.

C’est donc avec cette conception de l’hospitalité que nous pensons les espaces sur lesquels nous intervenons. »

Ici, l’apport de l’architecte prend toute sa place puisqu’il est le concepteur, en collaboration avec son maître d’ouvrage, des espaces singuliers et exclusifs dans lesquels chacun trouvera sa place.

Façonné sur mesure

Les espaces personnalisés s’opposent aux espaces génériques. Au mois de février 2023, Kellogg France (180 collaborateurs) a emménagé dans l’ouest parisien, dans le bâtiment Metal 57, appartenant autrefois aux usines Renault. L’étage dédié au spécialiste des céréales du petit-déjeuner a été façonné sur mesure. De la moquette épaisse des salles de réunion au parquet en bois qui rappelle un salon domestique, tout a été choisi avec soin. L’aménagement n’est pas un copié-collé d’un espace existant. Tout a été pensé pour Kellogg France. « Avec une french touch industrielle toute particulière », s’extasie Hélène Boyer, une collaboratrice de Kellogg qui travaille à Dublin. Les bureaux sont ingénieusement éparpillés dans un espace qui relève davantage du loft que de l’open space. Des arbres trônent dans d’immenses pots. Avec les grandes baies vitrées qui baignent l’espace de soleil, l’environnement a tout d’une terrasse.

Fluidité, flexibilité et mobilité sont les maîtres-mots de l’aménagement. À leur arrivée, les collaborateurs se dirigent vers des casiers nominatifs pour prendre leurs affaires après être passés devant la cuisine ouverte sur l’accueil. Puis, ils s’installent, à leur convenance, côté Seine ou côté cour, en hauteur (tabourets et bureaux hauts) ou dans une position plus basse. Les salariés changent de bureau au gré des collaborations. Le matin, un espace à l’ombre d’un olivier favorise le travail individuel, l’après-midi, le partage d’un document aura lieu sur une table plus large, de l’autre côté du bâtiment. Enfin, une réunion amènera une partie de l’équipe à choisir de prendre place dans la salle de réunion à la table ovale ou dans la pièce entièrement vitrée en forme de triangle.

Camille Felician, la responsable RH, déclare : « Les lieux, récemment investis, restent à apprivoiser, mais, d’ores et déjà, les salariés ont manifesté leur satisfaction. Il est gratifiant de venir travailler dans un bel endroit. Il procure un sentiment d’appartenance et de fierté. » Luc Lacortiglia commente : « L’esthétique est un véritable vecteur de sens. Ce qui est vrai dans les domaines du graphisme ou de la communication en matière d’image de marque se traduit de manière tout aussi prégnante en matière d’architecture et d’aménagement. Un espace valorisant est toujours un espace qui a été pensé spécifiquement. C’est un enjeu de premier plan pour toute entreprise qui s’intéresse au désir que son image suscite chez ses collaborateurs et ses clients. »

Un sentiment d’exception

Talan (5 000 collaborateurs dont 3 000 en France) a inauguré ses nouveaux locaux, rue Pergolèse dans le 16e arrondissement de Paris, en décembre 2022, dans un bâtiment neuf, récipiendaire de labels RSE exigeants. « En faisant le choix de rester au sein du quartier central des affaires (Paris intra-muros et ouest parisien), dans un luxueux bâtiment moderne et vitré, nous conservons un positionnement premium, différenciant pour nos clients, nos partenaires et nos collaborateurs », explique Nicolas Recapet, DRH. Le bâtiment, plutôt en longueur qu’en hauteur favorise les échanges. « Nous avions remarqué que les collaborateurs, une fois arrivés à leur étage, n’en bougeaient plus. Les grands plateaux horizontaux sont plus propices aux échanges. » Un jardin, trois terrasses, de grandes tables, des basses, des hautes, une cafétéria en rez-de-jardin, des casiers où les collaborateurs peuvent se faire livrer leurs colis (dans les anciens locaux, l’accueil était submergé par les colis)… Tout est fait pour rendre le lieu de travail fluide et agréable. Une tisanerie vient compléter les espaces collaboratifs. Le mot a son importance car il diffère de la cafétéria où l’on déjeune. À la tisanerie, on prend le café (ou le thé), on vient avec son ordinateur pour travailler, échanger à plusieurs.

La crise sanitaire a changé la donne. Pour tout nouvel aménagement, il y a désormais un cahier des charges type post-Covid.

Pour le fondateur de T3 Architecte, l’espace de travail doit renvoyer un sentiment d’exception : « Il faut entendre ce terme de deux manières. L’exception est d’abord une expérience valorisante par laquelle l’entreprise offre à ses collaborateurs un cadre digne des meilleurs standards du goût et du confort. Mais l’exception c’est aussi les valeurs particulières que l’entreprise cherche à communiquer et à perpétuer. Ces valeurs qui sont l’essence profonde de toute société et doivent être réactualisées dans tous les choix stratégiques opérés par le management. L’environnement de travail, dans sa dimension physique, est bien évidemment une composante majeure de l’image que transmet l’entreprise aussi bien auprès de ses clients qu’auprès de ses collaborateurs. Il doit être porteur du sens et des valeurs qui structurent notre relation au travail et que chacun, quelle que soit sa place dans l’entreprise, doit pouvoir s’approprier et communiquer. » L’aménagement des locaux devient ainsi un enjeu RH et doit être pris en compte prioritairement lorsqu’il s’agit d’attirer et de retenir les talents. Ce que confirment les résultats de l’enquête CSA Parella : plus de 70 % des dirigeants considèrent que les locaux sont un élément décisif ou important dans le choix d’une entreprise, faisant ainsi de la qualité des espaces un facteur décisif de l’attractivité et de la fidélisation des talents.

L’architecte revient à sa première vision : « Cette démarche a été forgée dans le secteur de l’hôtellerie dans lequel L’hospitality design s’est initialement donné comme objet d’offrir une expérience d’exception à des hôtes toujours plus exigeants. »

Lorsque le DRH et le DAF de Talan ont fait le choix, de concert, du bâtiment de la rue Pergolèse, les lieux étaient dénués de fenêtres, de moquette ou encore de climatisation. Ils ont été accompagnés par l’agence Saguez&Partners, l’agence de design qui avait déjà participé à la maîtrise d’ouvrage des anciens locaux et qui, par conséquent, connaît très bien l’ADN de Talan. Ressources humaines, affaires financières et architecte, le nouveau trio d’un aménagement réussi.

Auteur

  • Irène Lopez