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Idées

Redonner du souffle au syndicalisme

Idées | Livres | publié le : 01.01.2023 | Lydie Colders

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Redonner du souffle au syndicalisme

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Dans « Le syndicalisme d’après », le politologue Jean-Marie Pernot esquisse des pistes pour redynamiser les syndicats affaiblis. S’ouvrir aux mutations du travail, mais aussi de la société, s’impose…

Pouvoir d’achat, attachement aux services publics, à la retraite à 60 ans : les revendications des syndicats sont en phase avec l’opinion. Alors, comment expliquer leur perte d’influence ? Et surtout comment les redynamiser ? Dans son essai politique, Jean-Marie Pernot, spécialiste du syndicalisme, livre sa vision personnelle sur ces enjeux. Côté état des lieux, son constat est parfois sévère : s’il y a encore des victoires locales non négligeables, les grandes manifestations contre des réformes (cheminots, retraites) ne font plus plier les gouvernements « prêts à les affronter dans la durée ». Sondant le déclin des principaux syndicats, sur le plan national ou dans les branches, le chercheur à l’Ires y voit surtout « une panne stratégique » dont il faut sortir. Pour lui, l’heure n’est plus à « la chimère » de la grève générale, irréaliste « au regard des forces mobilisables ». Pour autant, se réfugier dans le dialogue social serait aussi une impasse : « Un réformisme qui n’intègre pas la nécessité du rapport de force a l’efficacité d’un couteau sans manche et dépourvu de lame ». Aux syndicats de trouver une ligne de crête entre les deux…

Élargir le répertoire

En entreprise, s’occuper uniquement des CDI est obsolète. Face aux mutations du capitalisme et du travail, les syndicats doivent intégrer les précaires, les faux indépendants ubérisés et les donneurs d’ordres, juge le politologue. Or, ils dédaignent trop ces nouvelles luttes. Retrouver le sens de la négociation collective doit se défendre au niveau de la branche, de l’entreprise. Si les syndicats ne veulent pas subir et devenir de simples gestionnaires, « il faut se battre pour un changement systémique des institutions de la négociation collective », en dehors des convenances patronales, estime le chercheur, critique envers la loi Travail et les ordonnances Macron. L’autre enjeu pour Jean-Marie Pernot serait d’intégrer les changements profonds de la société. Son livre appelle les syndicats à s’ouvrir à d’autres formes d’émancipation, comme la lutte contre le sexisme ou l’écologie. Ils ont besoin d’alliances pour sortir de l’immobilisme et reconquérir « une puissance », notamment auprès des jeunes. « Pacte du pouvoir de vivre », « Plus jamais ça », des alliances associatives existent à la CFDT et à la CGT. Mais reste selon lui à les traduire en mobilisation, en revendications et à les diffuser au sein de leur organisation. Sur le fond, plaide-t-il, rien n’oppose « un syndicalisme de mouvement social » aux revendications sur les salaires, les conditions de travail ou la protection sociale. Fin connaisseur, Jean-Marie Pernot a une opinion plutôt réformiste, mais fait preuve d’honnêteté dans sa critique des principales centrales. Et il précise bien : le syndicalisme n’a rien de caduque face au « capitalisme triomphant » et aux inégalités de richesse grandissantes. Son essai ambitieux est surtout une large invitation à s’emparer d’autres zones à défendre. Sans opportunisme…

« Le syndicalisme d’après »,

Jean-Marie Pernot, éditions du Détour, 224 pages, 19,90 euros

Auteur

  • Lydie Colders