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À quoi ressembleront les espaces de travail après la crise sanitaire ?

Dossier | publié le : 01.10.2021 | Irène Lopez

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À quoi ressembleront les espaces de travail après la crise sanitaire ?

Crédit photo Irène Lopez

Bureaux partagés, à la maison ou dans un espace de coworking, les lieux de travail se réinventent à l’aune de la pandémie. S’il y a autant de bureaux et de façon de travailler que d’entreprises, un point commun existe : le nouveau bureau doit donner envie de travailler. Et ce, sans rogner sur la qualité de vie et le bien-être.

Il a d’abord été surpris. Il manquait de repères. Et puis, il a adopté le concept. Le matin, lorsqu’il arrive au bureau, Emmanuel Dion, account director chez Avaya, prend un casier doté de roulettes dans lequel se trouvent ses affaires (dossiers, ordinateurs, etc.). Il déambule dans les allées colorées de la société et s’installe dans le bureau disponible le plus adéquat à son programme du jour : celui avec une grande table car il a prévu une réunion avec le service avant-vente ou celui, fermé et plus petit, car il doit boucler un dossier et a besoin de concentration. Durant la journée, il a tout le loisir de faire une pause à la cafétéria au design moderne ou sur la terrasse, elle aussi agréable, qui possède deux balancelles et une cabane de jardin. Le soir, il fait place nette et range ses affaires dans le casier. Il confie dans un grand éclat de rire : « J’ai eu l’impression de rajeunir et de travailler dans une start-up. »

Des canapés dans le patio

Avaya est une entreprise internationale spécialisée dans les communications en entreprises qui réalise 3 milliards de CA dans le monde et emploie 8 000 salariés. La filiale France, avec 74 collaborateurs, réalise 25 % du CA de l’Europe de l’Ouest. La démarche flex office, puisque c’est de cela dont il s’agit, n’est pas tout à fait nouvelle chez Avaya. « Nous n’avons pas attendu la Covid-19 pour passer au flex office. En 2014, nous avons signé un accord sur le télétravail. Depuis, l’utilisation des bureaux est en baisse. On vient au bureau pour communiquer et échanger, pas pour lire et répondre à ses mails », explique, avec ironie, Emmanuel Schupp, directeur général France. Avaya France a récemment changé de locaux à Issy-les-Moulineaux et opté pour une surface moins grande (40 % de bureaux en moins). Les économies de loyer s’élèvent à plusieurs centaines de milliers d’euros par an. Pour Emmanuel Dion, la démarche est logique : « Il n’y a plus de dépendance à un lieu physique. Aujourd’hui, le bureau est partout, même à la maison. Je trouve que le flex office est enthousiasmant. » Il y a néanmoins des conditions à son succès. « Il faut embellir l’aménagement sinon, ça ne marche pas. Le mobilier est moderne, des canapés trônent dans le patio, les éléments du décor sont colorés. Il faut que l’on ait envie de venir au bureau le matin. Des réticences, il y en a eu. On ne passe pas du jour au lendemain à un bureau où sont accrochées les photos de ses enfants au casier à roulettes et au bureau vide de toute personnalisation », détaille Emmanuel Schupp. Pédagogie et souplesse ont été nécessaires pour que tous les salariés se sentent bien. Ainsi, une personne dédiée à des tâches administratives répétitives et rétive au changement a gardé l’habitude de positionner des photos personnelles au mur de son bureau. Mais elle les enlève le soir, en partant.

François Chauvin, directeur général de Directskills, peut se vanter de travailler dans l’entreprise qui a le plus beau rooftop de Paris. De la terrasse de l’immeuble, on peut admirer la Tout Eiffel. Ce qui fait toujours son petit effet sur les clients ou les nouvelles recrues. La PME, qui emploie 45 collaborateurs, édite un outil de gestion du travail temporaire. La direction a fait le choix de quitter Poissy, en région parisienne pour louer un espace en plein cœur de la capitale en juillet 2021. Choix esthétique ? Pas uniquement. « Dans le cahier des charges, j’avais spécifié que l’endroit devait donner envie de venir. Mais le plus important est la situation centrale. Directskills est en forte croissance et nous recrutons. Or, à Poissy, il était difficile de faire venir les jeunes recrues. Il y avait un vrai problème d’attractivité pour les ingénieurs. En outre, désormais, les bureaux sont parfaitement desservis par les transports. Réunir les collaborateurs qui sont en télétravail (plus d’un quart le sont à 100 %, le reste télétravaille deux jours par semaine) est plus facile. » Si le prix du loyer a considérablement augmenté, la diminution du nombre de mètres carrés a rendu l’opération blanche. Le directeur général a à cœur de faire passer le message aux DRH : « La crise n’est pas une parenthèse mais une rupture. Avant, il y avait les collaborateurs internes et le personnel en intérim. Si cela ne se passait pas bien avec ces derniers, ce n’était pas grave. Aujourd’hui, avec les ajustements nécessaires que nous allons de plus en plus vivre, les DRH vont devoir se focaliser aussi bien sur les équipes internes qu’externes. Elles n’auront pas le choix si elles veulent attirer et fidéliser les salariés. Sinon, ils partiront ailleurs. D’où l’importance des bureaux et de leur emplacement. »

La chaise, le bureau et la lampe souhaités

La direction de You Sign, éditeur de logiciel français qui propose des prestations de signature électronique, a toujours été pro-télétravail. Elle encourage les 160 collaborateurs, lorsqu’ils sont en télétravail, à opter pour le lieu le plus propice à leur bien-être. Anna Kowalska, DRH de Yousign, déclare : « La notion de bien-être au travail est un concept qui fait référence à un sentiment général de satisfaction et d’épanouissement dans et par le travail, au-delà de l’absence d’atteinte à la santé, avec une portée plus large que les notions de santé physique et mentale. Il n’est pas possible pour nous de dissocier le bien-être au bureau et le bien-être personnel, les deux étant intimement liés. » De fait, l’entreprise participe aux frais de matériel de ses collaborateurs en télétravail. Anna Kowalska précise : « Les personnes en full remote ont une enveloppe de 350 euros pour s’installer chez eux. Le petit matériel IT (souris, clavier, second écran…) est acheté directement par You Sign. Les collaborateurs achètent ensuite eux-mêmes la chaise, le bureau et la lampe qu’ils préfèrent. En outre, nous participons à hauteur de 150 euros par mois pour financer l’abonnement à un espace de coworking ou un tiers-lieu. » L’entreprise éditrice de logiciel est en avance sur le chèque bureau plébiscité par 33 personnalités dont l’ancienne ministre du Travail Myriam El Khomri, l’ancien secrétaire général de Force ouvrière Jean-Claude Mailly ou encore Louis Gallois, ancien patron notamment d’EADS, la SNCF et PSA. À l’image des tickets-restaurants ou des chèques vacances, financés par l’employeur et utilisables par le salarié, ils proposent un chèque bureau universel avec lequel les salariés pourraient payer l’accès à un espace de travail partagé où un réseau de travailleurs pratiquent l’échange et l’ouverture. Il n’existe pas un bureau du futur mais une multitude de lieux à choisir en adéquation avec la mission, le travail, les contraintes du moment. Le temps du métro, boulot, dodo est révolu. Le collaborateur travaille désormais où il le souhaite.

Auteur

  • Irène Lopez