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Idées

Des vertus du RUE

Idées | Livres | publié le : 14.02.2021 | Frédéric Brillet

Après avoir défendu l’idée d’un revenu universel d’existence (RUE) lors de la dernière campagne présidentielle, Benoît Hamon revient à la charge dans ce plaidoyer en s’appuyant sur des travaux récents.

Ainsi la Finlande vient de tirer le bilan d’une expérimentation sur 2 000 chômeurs tirés au sort pour percevoir pendant deux ans une indemnité de 560 euros non imposée, indépendamment de leurs autres ressources. En comparant l’évolution de ces bénéficiaires à un échantillon de deux mille Finlandais couverts par le système social traditionnel, l’étude constate que le RUE n’incite en rien à la paresse ou à l’abandon de la recherche d’emploi, mais augmente le niveau de satisfaction des allocataires qui contrôlent mieux leur budget et leur avenir. Cette étude, rappelle Benoît Hamon, rejoint les conclusions du prix Nobel Esther Duflo sur la pauvreté : l’économiste observe qu’un revenu de base inconditionnel versé aux pauvres ne les détourne pas du travail mais leur redonne de l’autonomie pour se former, mener à bien un projet professionnel… Même les métiers répétitifs, usants et aliénants ne seraient pas délaissés en cas d’instauration du RUE tant les travailleurs concernés en retirent leur raison d’être et de la fierté. Tout est aussi semble-t-il une question de dosage : dans les expérimentations conduites, les montants alloués ne permettent pas aux allocataires de vivre confortablement en demeurant oisifs.

Résultat, l’Italie, l’Espagne, l’Allemagne débattent ou lancent à leur tour des expérimentations sur le RUE. Et la France ? Elle semble en retrait, regrette Benoît Hamon. Les gouvernements et milieux économiques s’en méfient, orthodoxie budgétaire oblige : « Quand l’État finance les entreprises, il relance « bien » l’économie, quand il aide les pauvres, il dépense « mal » leurs impôts et creuse les déficits. » Les réticences viennent aussi des bénéficiaires potentiels qui perçoivent le RUE comme une aide illégitime, voire comme une forme de déclassement. La raison ? Selon l’auteur, l’insécurité économique chronique, l’exacerbation de la concurrence internationale enferment une partie des classes populaires dans la recherche d’une sécurité que n’offrent plus les grands récits d’émancipation sociale de la gauche. Les perdants de la mondialisation se réfugieraient alors dans des projets conservateurs ou réactionnaires qui offriraient « un remède moral et identitaire à leurs peurs, sans rien régler cependant à leur relégation sociale ».

Ce qu’il faut de courage. Plaidoyer pour le revenu universel.

Benoît Hamon, éditions des Équateurs, 18 euros

Auteur

  • Frédéric Brillet