Barbara Stiegler est maître de conférences au département de philosophie de l’université Bordeaux Montaigne. Dans cet essai, elle s’intéresse à l’évolution qui a débuté avec l’observation de la nature, et qui se répand dans les domaines économique, social et politique. Elle parle de colonisation. Pour cela, elle mobilise les grands courants de l’évolutionnisme philosophique contemporain : William James (pionnier du pragmatisme et fondateur de la psychologie américaine), Henri Bergson (hostile au positivisme matérialiste) et John Dewey, Herbert Spencer (qui prétendait expliquer tous les phénomènes de la nature). C’est la pensée politique qu’elle a choisi de décortiquer : « D’où vient ce sentiment diffus, de plus en plus oppressant et de mieux en mieux partagé, d’un retard généralisé, lui-même renforcé par l’injonction permanente à s’adapter au rythme des mutations d’un monde complexe ? » L’auteur part du constat du retard de l’espèce humaine par rapport à son environnement et sur son avenir. Cet essai n’est pas aussi austère que l’éditeur le laisse entrevoir dans la présentation qu’il en fait. Barbara Stiegler offre un récit très articulé, pédagogique et reprend le fil de l’histoire pour expliquer l’évolution de notre société. Ceux qui ont étudié les sciences économiques durant leur cursus scolaire auront le plaisir de réviser leurs classiques. Tous les lecteurs se plongeront dans le débat sur une autre interprétation possible du sens de la vie et de ses évolutions, nécessaire pour comprendre le monde d’aujourd’hui. Surtout celui du travail.

Barbara Stiegler. Gallimard. 336 pages, 22 euros. (sortie le 24 janvier 2019)