Nos Batailles s’ouvre sur un drame : Laura est partie. Sans laisser un mot ou une lettre pour expliquer son départ. Davantage préoccupé par les combats sociaux qu’il mène au travail, Olivier n’a pas su percevoir le profond mal-être de sa femme. Rongé par la culpabilité, l’angoisse et les non-dits, ce contremaître dans un entrepôt de marchandises vendues sur Internet se retrouve du jour au lendemain abandonné avec ses deux enfants. Dès les premières minutes, Romain Duris, bonnet enfoncé sur la tête et mine fatiguée, disparaît derrière ce héros des temps modernes qui bataillera pour maintenir à flot le foyer avec un salaire en moins tout en jonglant avec ses responsabilités professionnelles. Les cadences infernales au travail, les luttes avec la direction qui tend à considérer les salariés comme des pions, la course le soir pour récupérer les enfants à l’école, les disputes familiales mais aussi les solidarités entre collègues et les passions éphémères… Toutes ces péripéties de la vie quotidienne, avec leur lot de joies et de contrariétés, sont évoquées au fil du récit avec sobriété, sans aucune fausse note. Dans son second long-métrage, le cinéaste Guillaume Senez réussit à entremêler tout en délicatesse la chronique d’une famille ébranlée par une disparition et celle d’un monde du travail de plus en plus violent et destructeur. En prenant les traits d’Olivier qui se saigne aux quatre veines pour défendre les intérêts des ouvriers et apporter une once d’humanité dans son usine, Romain Duris signe avec Nos Batailles l’un de ses plus beaux rôles treize ans après De battre mon cœur s’est arrêté.

(1 h 38), film de Guillaume Senez, sortie le 3 octobre 2018