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Édito

Du bon usage du référendum

Édito | publié le : 07.06.2018 | Jean-Paul Coulange

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Du bon usage du référendum

Crédit photo Jean-Paul Coulange

Le référendum d’entreprise est, décidément, un outil à manier avec précaution. Il ne s’agit nullement, ici, de revenir sur le « vot’action » organisé par la seule CGT à la SNCF et qui s’est traduit, sans surprise, par un rejet quasi unanime du pacte ferroviaire concocté par le gouvernement. Cette pseudo-consultation des cheminots n’avait rien d’un référendum, ni dans la lettre ni dans l’esprit. En revanche, c’est bien la consultation des salariés d’Air France sur les salaires qu’il faut analyser. Quand plus de 55 % des votes (avec une participation de plus de 80 %) manifestent un rejet des propositions de la direction, le scrutin révèle surtout un profond malaise du corps social au sein de la compagnie aérienne. De cette sorte de quitte ou double où l’on a vu le P-DG mettre en balance sa démission pour forcer l’opposition des syndicats, tout le monde est sorti perdant. À telle enseigne que certains salariés désemparés tentent aujourd’hui de susciter un sursaut, en créant un collectif (voir page 12). Chez Air France, l’ancien P-DG Christian Blanc, passé maître dans l’art de négocier, tant à la RATP que sur la Nouvelle Calédonie, était parvenu à obtenir des salariés de substantielles concessions, par voie de référendum. Mais c’était avant…

Plus près de nous, plus de 70 % des salariés de RTE (avec un taux de participation de 76 %) ont rejeté, par référendum en 2017, l’accord sur le temps de travail dans la maintenance proposé par la direction et rejeté par la CGT majoritaire. Ce qui montre au moins deux choses. D’abord, que les consultations directes dans les entreprises connaissent une forte participation, car elles concernent les salariés au plus près. Ensuite, qu’il est vain de penser qu’un référendum permet de contourner à coup sûr l’obstacle syndical. À ce titre, le référendum en 2015 chez Smart avait fait grand bruit. Une majorité de salariés du constructeur automobile avaient accepté une augmentation du temps de travail en contrepartie d’une garantie de maintien de l’emploi contre l’avis des syndicats majoritaires. Mais le scrutin, révélant un profond clivage entre les opérateurs de production et l’encadrement, s’était avéré être une victoire à la Pyrrhus pour la direction. Un conseil aux nombreux partisans d’une consultation directe des salariés, et il s’en est découvert beaucoup après le vote chez Smart, notamment dans la classe politique : en France, le référendum est une affaire trop sérieuse pour être confié aux entreprises. C’est pourtant le sens de l’histoire, la loi Travail ayant encore élargi les possibilités de consultation des salariés. Les ordonnances de septembre dernier ont également accru les prérogatives des employeurs, mais uniquement dans les TPE dépourvues de représentation syndicale ou de représentants du personnel. Ce qui est un tout autre sujet. En tout cas, le vote d’Air France nous rappelle que la consultation directe des salariés est une arme à double tranchant.

Auteur

  • Jean-Paul Coulange