Seul sur la scène du Théâtre de Belleville, Philippe Durand n’a pour unique compagnie qu’une montagne de petites boîtes de thé et d’infusion. Celles-ci n’ont pas été choisies au hasard. Elles proviennent de la marque « 1336 », comme le nombre de jours nécessaires aux Fralib pour faire plier le géant Unilever. Grèves, blocages, boycotts, bras de fer avec la justice. Pendant quatre ans, ces ouvriers ont réussi à résister à toutes les pressions des actionnaires pour sauver leur emploi et leur entreprise. Dans « 1336, paroles de Fralib », le comédien avec son accent provençal donne vie à ce combat de David contre Goliath des temps modernes. Des mois durant, il est parti à la rencontre de ces hommes et de ces femmes dans leur usine de Gémenos, près de Marseille, a recueilli minutieusement leurs témoignages, a écouté leurs confidences. De ces paroles brutes récoltées, il en a ressorti un récit social où les mots prononcés, les fautes de français, les répétitions sont restés intacts pour coller au plus près de la réalité vécue par ces personnages auxquels il prête sa voix. Malgré les coups bas diligentés par la multinationale pour faire capituler ces anonymes, cette aventure collective est aussi celle d’une reprise en coopérative d’une entreprise promise à la délocalisation. Donnés perdants dans cette bataille du pot de fer contre le pot de terre, les Fralib, devenus les Scop-ti, ont réussi en faisant front commun à déjouer les pronostics. Une leçon de courage et de pugnacité pour chacun.

, une pièce mise en scène par Philippe Durand, jusqu’au 31 mai au Théâtre de Belleville, Paris XI^e.