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VIE : une filière de recrutement ?

Dossier | publié le : 06.04.2018 | Audrey Pelé

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VIE : une filière de recrutement ?

Crédit photo Audrey Pelé

La formule du VIE séduit de plus en plus d’entreprises qui y voient un atout pour se déployer à l’international. Mais faire appel à de tels profils permet aussi d’identifier et de tester de potentielles recrues.

Plus de dix mille VIE ! Le dispositif du Volontariat international en entreprise cartonne avec 10 112 jeunes en mission dans 129 pays en décembre 2017, selon les derniers pointages de Business France, l’agence qui gère et développe le programme. Ils ont en moyenne 26 ans avec un niveau d’études Bac + 5 et plus, effectuent une mission d’une durée d’environ 20 mois pour le compte d’entreprises. Et des multinationales aux PME, toutes les catégories d’entreprises y ont recours. « L’enjeu est double. D’une part, le VIE leur permet d’accélérer leur développement à l’international. Il complète des équipes locales ou il peut partir seul pour prospecter un marché à l’étranger. D’autre part, la formule permet de tester des talents à l’international », précise Michel Bauza, directeur exécutif du VIE chez Business France. Selon lui, les sociétés peuvent ainsi s’assurer que le jeune fait l’affaire puis l’embaucher ensuite. 68 % des VIE se sont vus proposer un poste à l’issue de leur mission, et 8 jeunes sur 10 ont trouvé un emploi 4 mois après leur expérience (pour 78 % d’entre eux un CDI).

Des VIE embauchés comme des CDI

Le VIE constitue effectivement un excellent moyen de sourcer les futurs cadres de l’entreprise à l’international. Une enquête, menée par le CSA sur 1 200 VIE de retour de mission dans 500 entreprises utilisatrices, révèle que 95 % des sociétés considèrent le VIE comme un vivier de recrutement. Chez Faurecia, l’équipementier qui élabore, fabrique et commercialise des solutions technologiques à destination des constructeurs automobiles, plus de la moitié des VIE (profils ingénieurs en R& D, ingénieurs opérations en usine ou achats) ont été embauchés en CDI sur les 3 dernières années. Depuis 2010, l’entreprise a fait appel au total à 1 500 volontaires. « Le programme VIE a grandi dans notre groupe en corrélation avec notre croissance. Pour nous, l’objectif est de faire vivre les jeunes VIE dans l’entreprise et de garder les meilleurs ensuite », confirme Siegrid Tartanson, Country Talent acquisition manager chez Faurecia qui compte aujourd’hui 374 VIE dans 32 pays différents. Même jugement positif chez Forsee Power, une entreprise qui conçoit, fabrique et commercialise des systèmes de batterie intelligents sur les marchés du transport, des équipements portables et mobiles ainsi que sur celui du stockage d’énergie stationnaire. 75 % des VIE sont embauchés à l’issue de leurs missions. Le directeur de l’unique filiale de l’entreprise en Chine est d’ailleurs un ancien VIE. « Nous formons nos VIE, nous les testons sur le terrain puis quand ils rentrent, ils connaissent bien l’entreprise et nous les embauchons en France ou en Chine, assure Nicolas Cailloux, le DRH du groupe. Pour nous le VIE est bien une filière de recrutement pour les talents. Ce sont de toute façon des jeunes qui se destinent à l’international et c’est précisément le type de profils que nous recrutons. » Comme Faurecia, cette entreprise qui compte 300 collaborateurs fait appel à des VIE depuis 2004 sur des fonctions d’ingénieurs.

Pour les services RH, l’enjeu est de choisir le bon VIE. Il incombe aux entreprises d’établir une fiche de mission (pays, compétences recherchées, contour de la mission…) et les RH peuvent ensuite mettre en ligne l’annonce sur leur site ou sur la plateforme Civiweb.com. Avec cet outil, elles peuvent puiser dans une CV-thèque de 55 000 candidats aux compétences variées (techniques, commerciales, linguistiques, comptables…). « Quand je mène un entretien avec un VIE, je le fais de la même manière qu’avec un jeune diplômé. C’est presque une pré-embauche. L’objectif pour nous n’est pas d’avoir un super-stagiaire mais bien de recruter quelqu’un qui va avoir une vraie fonction dans l’entreprise, précise Nicolas Cailloux. Beaucoup d’étudiants postulent après une année de césure à l’étranger et un stage de longue durée. Et il est certain que c’est plus facile de sélectionner quelqu’un qui a déjà eu une expérience d’expatriation. » Le responsable du recrutement est attentif au savoir-être du VIE et à ses compétences techniques et linguistiques. Parler chinois n’est pas un prérequis pour les aspirants VIE chez Forsee Power mais la maîtrise de l’anglais, la langue du groupe, est indispensable.

Directeur général ressources humaines groupe de Sagecom, une entreprise spécialisée sur le marché des terminaux communicants à haute valeur ajoutée (décodeurs, box Internet, compteurs électriques…), Michel Brunet sélectionne aussi des VIE à fort potentiel. Comme ses propres salariés. « Je choisis les VIE avec les mêmes critères d’embauche que nos CDI à Bac + 5. Ils ont souvent un double diplôme et viennent des grandes écoles d’ingénieurs comme Mines Paris, Supélec, ou des grandes écoles de commerce, détaille Michel Brunet. Depuis deux ans environ, nous remarquons que certains profils postulent alors qu’ils ont déjà travaillé et qu’ils sont prêts à quitter un CDI pour vivre une expérience à l’international. » Dans sa société, qui compte 22 VIE, 80 % des jeunes VIE rentrants se voient offrir une proposition d’embauche et 10 ont été embauchés l’année dernière.

Des profils exigeants

Attention toutefois. Même si la plupart des entreprises affirment que leurs VIE sont intégrés à leurs modes de fonctionnement et process comme n’importe quel collaborateur, ils n’ont pas le statut de salarié : chaque jeune signe une lettre d’engagement avec Business France et l’entreprise signe une convention avec l’agence en précisant le cadre et les conditions de la mission. « Le VIE est un volontaire, c’est une forme de service civique. Il est pleinement opérationnel pour réaliser ou contribuer à un projet à l’international mais il ne peut pas avoir d’obligation de résultat. Il ne peut pas, par exemple, signer et engager l’entreprise », rappelle Michel Bauza. Reste que pendant leur expérience internationale, les jeunes VIE développent des compétences professionnelles et personnelles qu’ils pourront faire valoir pour se faire embaucher. La majorité des recruteurs assurent que les VIE reviennent grandis de leur expérience. « Quand un VIE rentre, il est généralement plus mature, plus autonome, et il a pris confiance en lui. Le fait de se retrouver seul à l’étranger, l’ouverture à d’autres cultures et sur un autre monde, permet même à certaines personnes de se révéler à eux-mêmes, affirme Michel Brunet, chez Sagecom. Et chez nous, être embauché après un VIE permet d’accéder à un niveau de responsabilités immédiat. Cette expérience est aussi valorisée dans le package de rémunération. » Pour le DRH, le parcours VIE est clairement un « booster de carrière ». Les ex-VIE de l’entreprise qui deviennent par la suite des salariés gardent un poste avec une dimension internationale ou repartent à l’étranger avec un contrat local ou d’expatriation. Même sentiment pour Siegrid Tartenson chez Faurecia qui voit dans le VIE un « parcours de carrière ». « Six mois avant leur retour, nous demandons à nos VIE ce qu’ils veulent faire et nous identifions des postes en adéquation dans nos effectifs. Ces profils accèdent d’ailleurs à des postes plus seniors que des jeunes qui sortiraient d’école et c’est une demande forte de leur part ». 85 % des jeunes reconnaissent que le VIE a bien été un tremplin pour trouver l’emploi qu’ils occupent actuellement tandis que 73 % des entreprises ayant eu recours au VIE ont vu leur CA progresser. Un partenariat gagnant-gagnant en somme.

Les 5 principaux secteurs des VIE en mission

• banque,

• fabrication de véhicules,

• industrie pharmaceutique,

• services informatiques,

• services et conseils aux entreprises

Les 5 principaux pays d’affectation des VIE :

• Belgique,

• États-Unis,

• Allemagne,

• Royaume-Uni,

• Chine/Hong Kong

Auteur

  • Audrey Pelé